La justice congolaise mise à l’épreuve pour affirmer l’indépendance de la magistrature. De la maison d’arrêt de Brazzaville où il est injustement incarcéré, depuis près de trois ans, le Général Jean Marie Michel Mokoko a appris la triste nouvelle du décès de sa mère, Maman Louise Ongagna, le 18 octobre 2019, à Pointe Noire, à l’âge de 92 ans. Un calvaire, de plus, pour la famille du Général. Particulièrement pour le Général lui même.

Congo Brazzaville: Décès de Maman Louise ONGAGNA, mère du prisonnier politique, le Général Jean Marie Mokoko
En photo, Madame Maman Louise Ongagna, décédée le 18 octobre 2019, à Pointe Noire, à l’âge de 92 ans et mère du prisonnier politique, le Général Jean Marie Michel Mokoko © 2019 

 

Il y a, quelque temps, de ses dures conditions de détention, il a vécu, à distance, le drame de deux disparitions. Sa sœur et son compagnon de route, Gérard Boukambou, l’ont quittés, sans qu’il n’ait pu approcher leurs funérailles, le cœur et l’âme des autorités de l’administration pénitentiaire ne s’étant pas émus pour penser à accorder au Général la permission de s’y rendre.

Deux décès qui l’ont amoindri. Les hommes cuirassés n’existent pas sur terre. La nature n’en a pas encore créé.
Seul, dans sa cellule, comme s’il y était placé pour attendre l’extinction progressive des siens, le Général Mokoko, tout en écrasant des larmes de souffrance, a résisté à l’épreuve, tenu par la force et le courage de l’homme de conviction qu’il s’est construit.
Pour ceux dont les droits humains ne sont guère une préoccupation, les prisonniers, ont, d’une certaine manière, échangé leurs droits contre leurs délits. Aussi clament-ils que ces derniers ne doivent prétendre à aucun droit.
C’est là une fausse assertion parce que toute personne a les mêmes droits et ne doit jamais en être privée, quelque ce soit le lieu où elle se trouve et ce qu’elle exerce.


Excepté le droit d’aller et venir, les détenus condamnés ne perdent ni leurs droits familiaux, culturels, économiques, ni leurs droits politiques. Et le maintien des liens des prisonniers avec leurs proches est une donnée utile pour leur faire tenir l’attache avec le monde extérieur.
Le Général Jean Marie Michel Mokoko est, donc, en droit de demander une permission de sortie dont la durée et les modalités de l’escorte de sécurité qui l’accompagne sont à déterminer, auprès des autorités judiciaires habilitées, pour assister aux obsèques de sa mère. Que celles ci se déroulent à Pointe Noire ou à Brazzaville, selon la décision de la famille.

Les autorités judiciaires congolaises, dans l’affirmation de l’indépendance de la magistrature, n’ont aucune raison juridique de s’opposer à une telle sollicitation du Général Mokoko. Etre privé de liberté n’implique pas un dépouillement de ses droits fondamentaux. Les magistrats le savent. Que le droit soit appliqué. Et que la grandeur du geste humanitaire l’accompagne.


Des cas récents de détenus autorisés à prendre part aux funérailles de leurs proches ont marqué la communauté internationale.

Le 2 mars 2019, à la faveur d’une permission d’absence d’une journée, l’ex Président brésilien Lula a regagné sa cellule après avoir assisté, avec émotion, à l’incinération, au cimetière de Jardim Da Culina, près de Sao Paolo, de son petit fils Arthur qu’une méningite a brutalement emporté à l’âge de 7 ans.
Le déplacement du président Lula qui purge sa peine à Curitiba, au Sud du Brésil, a été entouré de strictes mesures de sécurité, tout en fournissant à ses sympathisants l’occasion de l’acclamer. Condamné pour le meurtre de son amie Reeva Stennkamp, l’ex athlète paralympique sud africain Oscar Pistorius a été amené, sous escorte, le 11 août 2017, à quitter sa prison pour l’enterrement de sa grand mère maternelle Joyee Bekker. Précédemment, il était présent à la mise en terre de la grand mère paternelle Gerti Pistorius.


Les permissions de sortie des prisonniers Lula et Oscar Pistorius, indépendamment de leur caractère humanitaire, portent en elles un indéniable versant symbolique pour la cohésion nationale dans les deux pays concernés. Nul au monde, comme l’a écrit Jean François Ducis, ne pourrait compter les bienfaits d’une mère. A peine, à la naissance, nous ouvrons les yeux à la lumière, que nous recevons d’elle, en respirant, le jour, les premières leçons de tendresse et d’amour. L’amour maternel est l’instinct que la nature implante dans le cœur de chaque femme. Un amour sans bornes.

Maman Louise Ongagna, partie, pour toujours. Mais restera, à jamais, dans la mémoire du Général Mokoko. Elle qui a su lui transmettre son caractère combatif, sa pugnacité, son attachement aux causes justes, sa joie de vivre et le sens de l’altérité. Elle dont la vie demeurera le modèle inégalé pour le Général, à la manière dont elle a su mener de front sa vie familiale, ses activités sociales, dans un inépuisable amour pour les autres. Signe des temps, la disparition de Maman Louise Ongagna est le présage de la prochaine remise en liberté du Général Jean Marie Michel Mokoko, de son allié d’infortune, le ministre André Okombi Salissa et des autres prisonniers d’opinion. Une remise en liberté que les républicains et démocrates congolais attendent dans la sérénité.


Pour le Général, Maman Ongagna rejoint les étoiles. Bientôt, tous les soirs, libre, les yeux tournés vers le ciel, il contemplera ces étoiles dans l’espoir d’y voir un signe de sa mère. Que le Général Mokoko, sa famille, les milliers de compatriotes sur le territoire national et au sein de la diaspora qui prennent faits et cause pour lui, trouvent ici l’expression de notre solidarité. Nos condoléances les plus attristées s’adressent également à eux.


Maman Louise Ongagna, ce jour là, aux côtés du Général Mokoko, dans le respect absolu de nos traditions, nous t’accompagnerons à ta dernière demeure et te dirons adieu.

Repose en paix.

Fait à Paris le 19 octobre 2019

Source: dworaczek-bendome.org