Dimanche est une nouvelle journée sous tensions en République démocratique du Congo, où les catholiques sont appelés à marcher après la messe contre le maintien au pouvoir du président Joseph Kabila, malgré l’interdiction des autorités et le traumatisme des précédentes violences le 31 décembre.

Les fidèles auront-ils la possibilité de sortir des paroisses avec « nos rameaux de paix, nos bibles, nos chapelets, nos crucifix, pour sauver le Congo », selon l’appel des organisateurs, un collectif proche de l’Eglise ?

« Demain (dimanche), nous allons nous déployer pour empêcher toute marche dans la ville de Kinshasa », a déclaré à l’AFP le chef de la police, le général Sylvano Kasongo.

« Aucune action ou tentative visant à troubler l’ordre public ne sera tolérée », a-t-il prévenu dans un autre message.

La marche a été interdite vendredi par les autorités locales de la capitale, tout comme celle d’un mouvement politique proche du Premier ministre Bruno Tshibala.

La mairie de Kisangani, grande ville de l’est du pays, a également refusé d’autoriser une marche de laïcs catholiques.

Les appels à manifester dans la deuxième ville du pays Lubumbashi (sud-est) et à Goma (est) vont sans doute recevoir les mêmes réponses. La RDC interdit toute manifestation depuis les journées sanglantes de septembre 2016, juste avant l’expiration du deuxième et dernier mandat du président Kabila le 20 décembre 2016.

Il y a trois semaines, le 31 décembre 2017, la dispersion d’une précédente marche avait fait six morts dont cinq à Kinshasa, d’après les Nations unies et la nonciature apostolique, aucun d’après les autorités.

La mission de l’ONU en RDC (Monusco), la plus importante dans le monde, a promis de déployer ce dimanche des observateurs pour rapporter d’éventuels cas de violences ou de violations des droits de l’homme.

La Monusco, qui a pour mandat la protection des civils, rappelle que « le droit de manifester pacifiquement est inscrit dans la Constitution congolaise et est protégé par les engagements internationaux de la RDC ».

– ‘Le Congo est malade’ –

A l’initiative de ces marches se trouve un « collectif laïc de coordination » animé par huit intellectuels et militants chevronnés, qui affirment vivre dans la clandestinité depuis le 28 décembre.

Des mandats d’arrêt ont été émis contre cinq d’entre eux, a indiqué jeudi un magistrat du parquet à l’AFP.

Après les violences du 31 décembre, ils ont reçu le soutien de l’archevêque de Kinshasa, le cardinal Laurent Monsengwo, un proche du pape François.

Le 12 janvier, Mgr Monsengwo avait célébré une messe à la mémoire des victimes du 31 décembre, en présence de plusieurs ambassadeurs occidentaux. La cérémonie a pris des allures de meeting politique pour l’alternance.

Les organisateurs demandent à Joseph Kabila de déclarer publiquement qu’il ne sera pas candidat à un troisième mandat, ce que lui interdit d’ailleurs la Constitution.

Ils demandent aussi le respect d’un accord politique de la Saint-Sylvestre 2016 prévoyant la libération des prisonniers politiques.

L’accord prévoyait des élections fin 2017 au plus tard. Début novembre, la commission électorale a renvoyé ces élections au 23 décembre 2018, estimant que les violences dans le Kasaï avaient retardé le recensement.

Le deuxième et dernier mandat du président Kabila a officiellement pris fin le 20 décembre 2016. L’un de ses principaux opposants en exil, l’ancien gouverneur de l’ex-Katanga Moïse Katumbi, l’accuse de vouloir organiser un référendum qui lui permettra de demeurer en place.

D’autres chefs religieux ont apporté leur soutien ou se sont montrés critiques envers la gestion de la RDC, dont la richesse des sols n’a d’égale que la pauvreté d’une grande partie des 80 millions de Congolais.

Le chef des musulmans a demandé samedi aux autorités de ne pas « réprimer » la marche des catholiques. D’habitude silencieux, l’Imam M’Kuu, qui revendique dix millions de fidèles sur 70 à 80 millions de Congolais, avait déclaré vendredi que « le Congo est malade ».

Mardi, un pasteur protestant avait déclaré que « l’Etat n’existe pas » en République démocratique du Congo lors d’un culte à la mémoire de l’ex-président Laurent-Désiré Kabila, et en présence de la famille de son fils, l’actuel chef de l’Etat.

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