Des milliers d’Hommes dans les rues de Tunis le samedi 10 mars 2018 pour montrer leur mécontentement face aux traitements inégalitaires faits aux femmes en matière d’héritage. Cette manifestation est une lutte noble.

La marche pour l’égalité hommes-femmes dans un monde de droit devrait être le nom de cette journée de manifestation.  Les milliers de femmes sorties pour marcher contre les traitements inégalitaires auxquels elles sont victimes en Tunisie avaient pour slogan « Égalité !», « Egalité ! » Environ 2000 personnes sont sorties pour dire non aux discriminations genres en matière d’héritage. Les femmes héritent de la moitié de ce que gagnent les hommes, explique Emna Ben Milet, initiatrice de ce mouvement. pour lui,  « C’est un événement historique ».

Les femmes sont victimes du poids des traditions. Cette discrimination relève juste de la mentalité selon laquelle le « foyer d’une femme est celui de son mari ». À travers ces propos, ce que nous appelons les « mères de l’humanité » sont privées de beaucoup de leurs droits. N’ayant pas à s’occuper de foyer, elles n’ont pas besoin d’une grande somme de biens. Alors que les hommes sont les « maitres de la maison » et par conséquent ont une lourde charge.

Ces mentalités sont celles qui expliquent ces privations des femmes d’un de leurs droits les plus absolus, l’héritage. Comment ose-t-on priver une dame du bien de ses parents ? Les femmes ne sont-elles pas des enfants d’un homme au même titre que les hommes ? S’il est vrai qu’il faut traiter les enfants sur les mêmes pieds d’égalité, alors, il va de soi, que priver une femme d’une partie de l’héritage familiale est inégalitaire.

Ces pratiques existaient jadis dans nos sociétés parce que ces êtres étaient considérés comme des « sans-droits ». Mais au fur et à mesure que la société évolue, certains de ses éléments que sont les hommes et autres sont appelés à évoluer naturellement. Nul ne pouvait imaginer que des débats de ce genre allaient pouvoir se mener dans des sociétés comme celle tunisienne où le poids des traditions religieuses est assez accentué. C’est la raison pour laquelle cette manifestation peut être considérée comme emblématique dans la mesure où c’est une première en Tunisie.  Il y a certes eu des manifestations plus massives que celle-là, mais les causes sont différentes.

La question de l’égalité en matière d’héritage entre l’homme et la femme a toujours été une question tabou. Cependant, est-il certain que les autorités tunisiennes doivent marcher les têtes baissées ? Dans un monde de droits, un monde dans lequel on clame haut et fort chaque jour le «  droit des femmes », « la lutte contre les violences faites aux femmes », ces genres de discriminations ne doivent pas exister.  « J’ai honte de devoir manifester aujourd’hui contre une telle injustice qui est censée ne plus exister depuis l’indépendance  »,affirme  Emna Mornagi, étudiante en écologie.

Cette histoire d’héritage laisse d’ailleurs transparaitre une question à savoir pourquoi les femmes ne doivent pas hériter la même part que les hommes. Toute réponse donnée à cette question laissera transparaître un paradoxe. Car « le sexe faible » mérite toute la solidarité. Alors s’il est vrai que la gent féminine est considérée comme le « sexe faible », elle doit avoir une part supérieure ou égale à celle de l’homme. Ce dernier en tant que naturellement fort est en mesure de se battre pour gagner pleines choses de lui-même. Or, la faiblesse naturelle de la femme constitue un obstacle pour son épanouissement.

En outre de cela, puisqu’elle est réservée uniquement pour la maison en tant que gardienne, alors,  ce poste ne lui permet pas d’être pleinement productive dans la société. À ce titre aussi, si sa part d’héritage ne dépasse pas celle de la gent masculine, elle doit être égale.

Cependant, face à cette pratique discriminatoire, Cinda Basly, experte-comptable  met en garde contre « les mauvaises interprétations des textes religieux qui oublient les valeurs nobles » « Le bon Dieu ne peut aimer que l’équité entre les êtres humains. » En effet, ces violences ne doivent pas être justifiées en instrumentalisant les principes religieux. Cela renvoie d’ailleurs à une mise en garde faite aussi par l’islamologue suisse, Tariq Ramadan : « L’islam n’a pas de problèmes avec les femmes, mais il apparait clairement que les musulmans ont effectivement de sérieux problèmes avec elles, et il faut en chercher de l’intérieur, les raisons et parfois les (…) justifications. »

Ces luttes contre les violences genres ne doivent plus constituer le quotidien des sociétés actuelles, des sociétés dans lesquelles les droits de l’homme doivent devenir une réalité palpable. La place de la femme se fait de plus en plus nécessaire avec l’augmentation des besoins et de la démographie. Priver la gent de la moitié d’un héritage, c’est faire d’elle une victime d’injustice.

Fousseni TOGOLA.

Source: Le Pays-Mali