Aissata Cissé est ainsi partie à jamais. Dignement. Comme elle était entrée dans la profession de journalisme du temps de Radio Soudan sous l’œil connaisseur de Dr Mamadou Gologo, un pionnier de l’observation et de la détection des talents qui sauront non seulement relever le défi, assurer la relève et surtout bâtir du solide. Il est vrai qu’en ce temps en matière de recrutement tout était fait avec éthique contrairement à la pratique des arrangements qui est de nos jours un sport national, touchant toutes les professions.


Aissata d’hier à aujourd’hui, une voix radiophonique captivante logée dans un corps de générosité dynamique actionné par une conscience professionnelle inoxydable ; le tout baignant dans une confraternité rarement prise à défaut avec une ouverture à tous car serviable jusqu’à la moelle des os.
Voilà campée Aissata. Quel conseil peux-tu donner au débutant que je suis, le diplôme étant seulement un soupçon de capacité lui ai-je demandé à mon entrée à Radio Mali.

Après son habituel large sourire, elle me dit clairement : « la radio c’est comme dans le désert. On apprend à connaître ce que l’on vaut et on apprend aussi à connaître tous les autres. Il faut avoir la tête sur les épaules en toute situation et Dieu fera le reste. »
Rien d’étonnant que durant son long parcours elle se soit montrée digne de l’estime et de la confiance des différentes générations de journalistes, de techniciens, d’animateurs de la maison mère de Bozola et d’ailleurs par la suite. Pétrie d’expérience, elle savait rassurer auditeurs et confrères, n’ayant jamais nagé dans le nauséabond marigot d’un clanisme destructeur de compétences.

Aissata Cissé a su relater au micro de Radio Mali toutes les grandes étapes et transformations pacifiques ou violentes de ce Mali qu’elle respirait à pleins poumons. Connue et aimée de la multitude des coins et recoins de ce pays, elle n’a pourtant jamais abusé de son aura. Loin s’en faut celle-ci lui permettait seulement de tirer d’affaire ceux qui traversaient une passe difficile et qui parvenaient à l’alerter. De grands acteurs du Mouvement démocratique en savent quelque chose.

Doux fruit d’une union peulh-dogon, elle avait ces temps-ci grande peine à dissimuler la douleur qui la tenaillait et découlant des affrontements intercommunautaires dans le Centre du pays « J’ai mal, me disait-elle. Ils veulent m’enterrer puisqu’ils savent tous qu’un enfant saint d’esprit ne peut et ne doit opérer un choix entre un père et une mère ».
À présent qu’elle a été rappelée à Dieu, puisse son souvenir contribuer à calmer la situation au bénéfice du Mali qu’elle a tant bien servi. Amen.

Tiona Mathieu Koné

Journaliste

Source: Journal L’Essor-Mali