Dr Aly Tounkara : « On ne peut pas parler de succès »

Dr Aly Tounkara, enseignant-chercheur, sociologue et spécialiste des questions de genre et d’extrémisme violent répond à nos questions sur le sommet du G5 Sahel en Mauritanie, six mois après celui de Pau.

 

Lors du sommet du G5 Sahel à Nouakchott ce mardi, le président français s’est montré optimiste sur une victoire contre les terroristes, le pensez-vous trop optimiste ?

A la suite du sommet de Pau, un certain nombre de changements restent observables dans les pays du Sahel notamment les trois pays les plus touchés par le terrorisme qui sont le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Les armées africaines et la force Barkhane seraient plus dans un rapport de partages et de fournitures de renseignements. C’est une avancée incontestable. Dans le même temps les actions menées par Barkhane appuyé par ces forces nationales, notamment dans la zone des trois frontières, elles ont été couronnées de succès. Je pense que c’est plus la mort de Droukdel qui a amené le président Macron à apprécier les efforts dans le Sahel, qui n’est pas une fin en soi du terrorisme. Mais il y’a quand même des difficultés majeures dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Puisque en dépit du partage de renseignements, si vous suivez l’actualité, vous vous rendrez compte que les armées africaines évoluent parallèlement à la force Barkhane. Si les deux armées menaient des actions conjointes de façon effective et réelle, les bavures qui sont reprochées à ces armées le seraient aussi pour Barkhane. Cela démontre donc que la coopération n’est que de façade. De la même manière quand vous regardez les besoins qui sont satisfaits notamment par l’Union Européenne à travers la France ou encore les Etats-Unis, ce ne sont ceux exprimés par les armées africaines elles-mêmes. On ne peut pas lutter efficacement contre le terrorisme lorsqu’on n’a pas d’avions de chasse, ce qui avait été demandé par nos armées. Ce sont des difficultés qui font qu’on ne peut pas parler de succès, ou de fin du terrorisme dans les années à venir.

Plusieurs pays avaient fait des promesses de financement pour le G5 Sahel, mais qui peinent à se matérialiser, qu’est-ce qui bloque ?

Les raisons du blocage sont plurielles. Il y’a déjà l’attitude des chefs d’Etat du G5 Sahel eux-mêmes. Vous ne pouvez pas prétendre à une quelconque souveraineté et au même moment délégué les négociations d’une levée de fonds à d’autres acteurs notamment la France. Ce ne sont pas les chefs d’Etat qui sont en contact direct avec les pays qui ont fait des promesses. Ces derniers ne font pas non plus confiance à ces chefs d’Etat du G5 quant à leur capacité d’endiguer le terrorisme, ni même à gérer les fonds qui seront alloués pour. Il y’a une question d’éthique, de morale, de capabilité de ces Etats africains. Je crois que c’est cela qui explique pour beaucoup que ces pays qui ont fait des promesses n’arrivent pas à les tenir.

Journal du Mali

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