“Notre vie commence à s’arrêter, le jour où nous gardons le silence sur les choses graves” Martin Luther King.

 

Vingt-huit ans après la révolution du 26 Mars 1991, le Mali vit une des périodes les plus sombres de son histoire. Aucun patriote ne peut rester silencieux aussi longtemps, face aux drames qui martyrisent notre pays.

Le 26 Mars avait soulevé un immense espoir chez le peuple Malien. Aujourd’hui, c’est la frustration qui prévaut.

Sans prétention aucune, ni fausse modestie, je suis fier (par la mobilisation et l’engagement des Maliens de France, travailleurs et étudiants à l’époque), d’avoir été un des acteurs du mouvement qui a conduit à l’insurrection populaire.

Cette révolution « inachevée » a fait des centaines de martyrs.

En revisitant mes archives, en relisant nos écrits, nos tracts, nos déclarations, nos manifestes, produits au temps de la clandestinité, je pose la question : est-ce pour ce type de « démocratie » actuellement en cours, que nous avons mené le combat durant 23 ans contre le régime militaro-UDPM ?

Où sont les camarades de Faso, bulletin du Parti Malien de la Révolution et de Démocratie (PMRD), où sont les camarades du Bulletin du Peuple, ceux de Sanfin, du Groupe Tiémoko Garan Kouyaté, où sont les camarades qui ont paraphé le manifeste du Front National Démocratique et Populaire (FNDP) ?

Avons-nous oublié notre serment, en abandonnant notre engagement révolutionnaire ?

Le débat politique et idéologique a disparu au Mali, alors que l’idéologie de la classe dominante et des pays occidentaux ravage les esprits. Nous sommes soumis quotidiennement à un matraquage idéologique sans précédent.

La démocratie pour laquelle nous nous sommes tant battus et pour laquelle tant des nôtres, ont payé de leur liberté et de leur vie, est totalement pervertie. Une poignée d’hommes et de femmes s’accaparent des richesses du pays, détournent l’aide internationale, exacerbent les conflits, au mieux, ils les laissent, perdurer.

En ces jours dramatiques pour notre pays, ma pensée va vers le président Modibo Keïta et ses proches compagnons. Malgré les difficultés (intérieures et extérieures), auxquelles ils ont eu à faire face, ils   nous ont laissé un Mali digne, fier avec la volonté de sortir notre du sous-développement. Quelle tristesse les emparerait s’ils pouvaient assister à la décomposition de notre nation.

  • Notre patrie est en danger.

Plusieurs phénomènes caractérisent la situation que nous vivons : la corruption, l’enrichissement illicite de quelques-uns. Des formes les plus pernicieuses d’atteintes à la démocratie

La corruption gangrène le pays mêlant trafics de drogue, d’armes, d’êtres humains. Cette corruption à tous les étages de la société, produit une énorme manne financière servant à entretenir la guerre, le terrorisme, le djihadisme, les massacres de nos populations.

Comble du comble, notre «  démocratie » est malade de la pléthore de partis dits «  politiques », plutôt «  alimentaires » (130 partis pourun pays de 16 millions d’habitants).

Le vote qui devrait traduire et exprimer le libre choix du peuple, s’est transformé en foire, où l’électeur va au plus offrant, notamment aux distributeurs de billets.

Que dire des spéculateurs fonciers et immobiliers ? Les villas de la sécheresse, ont laissé la place aux châteaux de la démocratie”.

Nous assistons par ailleurs, à la partition méthodiquement, de notre pays avec la bénédiction de l’ancienne puissance coloniale. Le Nord échappe au contrôle de l’Etat, le Centre s’embrase avec des massacres de centaines de nos concitoyens. Le Sud et l’Ouest vivent sous la peur et la hantise avec les braquages, les attaques à main armée, les assassinats.

Massacre, terreur, paupérisation grandissante, des masses populaires, maintenues dans la misère économique, sociale, culturelle, telle est la réalité de notre pays.

Le 26 Mars 1991, nous avions ouvert une page d’espoir pour notre pays, pour notre peuple. Pour un triste bilan, 28 ans après. Mais l’histoire ne s’arrête jamais.

Tirons toutes les leçons, tous les enseignements des 28 années passées.

Les 28 années de notre expérience et pratique démocratique.

Allons vers la constitution d’un Conseil National de la Résistance (CNR)

  • Résistance contre la corruption, l’enrichissement illicite, qui minent les fondements mêmes de notre pays et de sa démocratie.
  • Résistance contre le démantèlement de notre territoire.
  • Action pour le bien-être économique, social et culturel du peuple malien dans la justice et la paix.
  • Action pour la reconstruction de notre unité nationale, et de la cohésion sociale des maliens, tant ébranlés.

Un Conseil National de la Résistance (CNR) rassemblant les forces vives de la nation – dans la diversité des opinions, patriotes et démocrates, catholiques et musulmans, sans appartenance politique et religieuse, jeunes et moins jeunes, femmes et hommes – pourrait ouvrir une voie crédible, pour le développement de notre pays et pour qu’enfin, notre peuple vive dans la paix, la justice et l’entente.

Ce Conseil National de la Résistance, Démocratique et Populaire aurait pour première mission, celle d’un Mali à la dignité retrouvée vers une nouvelle République. Un Mali de Paix, réconcilié, libre et prospère.Un Mali de justice et de progrès.

Ce Mali qui dispose d’énormes richesses naturelles (le sous-sol, la terre, l’eau, la diaspora) n’a pas pour vocation de rester pauvre. Ce qui est en cause, c’est le partage des richesses au profit du plus grand nombre. Une gestion d’un autre temps, la main mise néo-coloniale toujours d’actualité.

Une autre alternative est possible.

Il faut en finir avec le fatalisme. Il faut changer le Mali. Il faut travailler à la construction d’un pays nouveau. Ensemble, nous pouvons écrire l’Histoire, car ce sont les peuples qui font l’histoire.

(1) Officier de l’Ordre National du Mali.

Chevalier de la Légion d’honneur de France.

Ancien Secrétaire Général Adjoint, de la Présidence de la République.

Ancien Président du Comité Franco-Malien sur l’Immigration,

Ancien Secrétaire Général du Front Démocratique des Patriotes Maliens (FDPM).

Ancien porte-parole à l’extérieur, du Front National Démocratique et Populaire (FNDP).

Ancien journaliste au quotidien « l’Humanité » en France,

Ancien Promoteur en France, du journal “Mali Kibaru”,

 

Par Bassirou Diarra (1)

 

SourceLe republicain mali