A quelques jours d’intervalle, notre pays a l’occasion de vivre la commémoration successive de deux évènements, qui ont provoqué  chacun de profonds  bouleversements dans la vie de la Nation.

moussa traore amadou haya sanogo dioncounda traore

Par un de ces pieds de nez dont seule l’Histoire a le secret, ces deux évènements sont intervenus dans le même mois, en mars,  et pratiquement dans la même semaine. Mais là s’arrêtent sans doute les similitudes. En effet, autant le 26 mars 1991 a été pour le Mali la date phare d’une rupture révolutionnaire, qui consacrait la fin d’une dictature anachronique et le début d’une nouvelle ère de liberté et de démocratie ; autant le 22 mars 2012 symbolise la réaction, au sens propre, c’est-à-dire un mouvement de  retour en arrière. A tel point qu’un an après, les putschistes de l’ex – Cnrdre restent toujours perçus par l’écrasante majorité des Maliens comme ceux par qui le malheur est arrivé.
Pourrait- il en être autrement lorsqu’on jette un regard rétrospectif sur les conséquences, désastreuses pour le pays et la sous –  région, de l’équipée funeste qui,  après avoir commencé le 22 mars 2012 par une simple mutinerie, finit par le renversement d’un gouvernement dirigé par un président de la République démocratiquement élu. Un pays moralement et matériellement à genoux, une économie exsangue avec son lot de licenciements de travailleurs et de départs massifs des investisseurs nationaux et étrangers  vers des cieux plus cléments ; des régions entièrement occupées pendant plusieurs mois par des mouvements terroristes et finalement libérées grâce à l’intervention salvatrice de l’ex-puissance coloniale ; un avenir politique toujours incertain avec une Transition bancale faisant une place de choix aux auteurs et associés du coup d’Etat ; une vie politique toujours marquée par des immixtions incessantes d’une junte omniprésente qu’on dit pourtant dissoute, et j’en passe.
Voilà le tableau peu reluisant qu’offre le Mali, une année après le 22 mars 2012, jour où  quelques dizaines d’officiers subalternes et d’hommes de rang, à la faveur d’une mutinerie et «profitant de la situation»,  ont décidé de mettre un terme à ce qu’il était convenu d’appeler l’expérience démocratique malienne.
La communauté internationale et nombre de nos compatriotes croient que la tenue des élections le plutôt  possible sera le remède miracle qui permettra au Mali de sortir de la crise institutionnelle et de poursuivre les efforts de développement qu’il avait si brillamment engagés les de 1992 à 2012. L’on peut se demander cependant si l’optimisme affiché  par tout ce beau monde ne relève pas de l’angélisme, en tenant compte du peu de progrès enregistrés dans la préparation technique même des élections et des risques de manipulation qui pèsent sur les scrutins à venir. En raison précisément des velléités d’intervention dans la sphère politique manifestées par les  membres  de l’ex – junte, qui semblent déterminés à tout mettre en œuvre pour se maintenir aux affaires, fût – ce par procuration, le maître mot doit rester pour tous les acteurs et observateurs de la vie politique malienne, la vigilance. Ce qui n’exclut nullement l’espoir, en particulier celui de voir revenir la raison et de voir les élections programmées se tenir librement et démocratiquement, comme le souhaitent nos compatriotes épuisées par les effets combinés d’une instabilité devenue chronique en seulement une année et de la récession économique provoquée par le coup d’Etat.
Birama FALL