Le vent de la démocratie qui a soufflé vers la fin des années 80, début des années 90 a été un tournant décisif dans la vie de millions d’hommes et de femmes de la planète. Aucun continent n’a été épargné. Les Etats d’Amérique latine, une partie de l’Europe de l’Est, l’Afrique…Déjà plusieurs années à l’avance, George Bureau écrivait :’’la démocratie est aujourd’hui une philosophie, une manière de vivre, une religion et presque accessoirement une forme de gouvernement…Ce n’est pas seulement l’objet d’analyse scientifique, mais aussi pour des millions  d’individus, une manière de vivre ensemble, et pour chacun d’eux une possibilité de répondre à sa vocation d’hommes. C’est d’eux que dépend l’avenir du régime qu’ils ont construit…’’

Cette démocratie au sens où l’entendent les Occidentaux s’est traduite en Afrique vers le début des années 90 par des régimes multi partisans, auxquels il faut ajuster la prolifération de radios et journaux privés. Certes, liberté d’expression, d’association, de presse, du droit au travail, à l’instruction etc. sont des droits universellement reconnus. Mais est c-ce suffisant pour parler de démocratie ?

En effet, la plupart des dirigeants africains avaient cru qu’il suffisait de proclamer le multipartisme, de libérer la presse, pour se réclamer de la démocratie.

Cette situation a donné le résultat suivant : D’un côté ceux qui ont accepté de jouer le jeu  démocratique et de l’autre, ceux qui font semblant en jouant le jeu des puissances étrangères. Ainsi nous nous sommes trouvés en Afrique en présence de ce que les politologues qualifient de politique de la démocratie à plusieurs vitesses ou encore une démocratie à la carte…

Les expériences qui nous ont été offertes après les conférences nationales-marathons dans différents pays africains sont riches d’enseignements.

Des régimes ont été renversés suite à des soulèvements populaires (preuve que les gens en avaient assez). Alors, des  comportements insolites se sont faits jour dans beaucoup de pays. Une sorte d’anarchie, de nihilisme, s’est emparé de nos villes et campagnes. Dès lors, un laisser-aller, laisser-faire s’est instauré. Plus rien n’est respecté, plus rien n’est sacré. Ces déviations constituent des menaces sérieuses contre la cohésion sociale, la paix, la sécurité, l’unité nationale et l’intégrité territoriale. L’exemple des guerres civiles, ethniques ou fratricides illustre bien les limites qu’il ne faut pas franchir dans l’exercice de ses droits.

La démocratie est sœur jumelle de l’ordre.

Elle est incompatible avec l’anarchie, l’instabilité, l’insécurité. En effet, pour pouvoir bien jouir de ses droits, il faut accomplir ses devoirs vis-à-vis de la société.

La promotion des droits de l’Homme en Afrique

Dans nos sociétés traditionnelles africaines, la démocratie a toujours fait bon ménage avec les droits de l’Homme. Dans ces sociétés, l’arbre à palabres, pratique coutumière, avait pour rôle d’établir un équilibre entre les droits des membres de la communauté et leurs devoirs. Il s’agissait non seulement de réguler de manière harmonieuse les rapports de l’homme avec ses semblables, mais aussi de l’homme avec la société. L’individu ne s’accomplissait que par rapport au groupe… La rencontre de la société traditionnelle et du modernisme a provoqué en Afrique une cassure où il est devenu difficile de faire une distinction.

En effet, dans ce long cheminement, il faut remarquer que chacun est arrivé avec des normes et des valeurs. C’est cette base philosophique qui tantôt unit ou divise les hommes dans leurs démarches. De ce fait, il s’agit plutôt d’un problème de choix, de choix économique, d’un problème d’intérêt matériel.

Les gouvernés peuvent disposer à l’intérieur de l’Etat des libertés variables selon les lieux et les époques : ce sont les libertés publiques. Traditionnellement, elles s’analysent en faculté de faire ou de ne pas faire. Mais de nos jours, on rapproche des libertés publiques les droits fondamentaux qui sont des droits consistant à obtenir de l’Etat certaines prestations : droit à l’enseignement, droit au travail, etc.

Politiquement, on ne considère que les libertés politiques sont surtout reconnues dans les Etats reposant sur le principe démocratique… Georges Burdeau a écrit que : ‘parmi l’infinie variété des facteurs qui commandent, il en est un qui dans les sociétés modernes joue un rôle prépondérant : le travail. Dans un univers où l’homme s’apprécie en fonction du volume des biens dont il peut disposer, la distinction s’efface entre l’individu et le travail qu’il accomplit. L’homme s’identifie au travailleur puisque sans travail il cesse d’être. (D’où le peuple des hommes apparaît essentiellement homme le peuple des travailleurs…). Economiquement et socialement, le profit de la démocratie s’analyse dans l’exercice au sein de la collectivité des conditions de vie assurant à chacun la sécurité de vie assurant à chacun la sécurité et l’aisance requises pour son bonheur. Une société démocratique est celle d’où sont exclues les inégalités dues aux aléas de la vie économique, où la fortune n’est pas une  source de puissance, où les travailleurs sont à l’abri de l’oppression qui pourrait faciliter leur besoin de trouver un emploi, où chacun enfin peut faire valoir un droit à obtenir de la société une protection contre les risques de la vie. La démocratie sociale vise ainsi à établir entre les individus une égalité de fait que leur liberté théorique est impuissante à assurer…’’ En effet, le manque de culture politique de nos populations, et le manque de culture démocratique de nos dirigeants et responsables politiques, mettent en danger l’exercice des droits de l’homme et des peuples. Ce déficit de culture politique et démocratique est aggravé par l’ignorance, l’analphabétisme. De même, qu’il a été dit qu’on ne peut pas faire du socialisme sans socialiste, l’Afrique ne saurait faire de démocratie sans démocrates. Donc, il s’agira d’étudier les voies et moyens d’introduire l’étude des droits de l’homme dans l’enseignement en vue de favoriser l’émergence d’une véritable culture des droits de l’Homme et de la démocratie en Afrique. Notre élite intellectuelle, nos penseurs, ont la responsabilité historique de sortir les Africains de l’obscurantisme, et de trouver des voies africaines de la démocratie et des droits  de l’Homme. Par leur action permanente, l’Afrique doit cesser de dépendre de l’extérieur, des modèles importés. Nos gouvernants doivent introduire dans les programmes scolaires et universitaires, l’enseignement des valeurs patriotiques et civiques, la connaissance des lois et leur respect.

L’instruction civique doit enseigner le respect de soi et d’autrui, de la chose publique, l’amour du prochain, la tolérance et l’acceptation de la différence, l’amour de la patrie.

Malick Camara

Source: Le 26 Mars