Lors du sommet du G5 Sahel (Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger et Tchad) et de la France à Nouakchott mardi dernier, les chefs d’Etats ont abordé la question des exactions dont sont victimes les populations civiles. Emmanuel Macron a même déclaré que « les communautés peules ne sont l’ennemi de personne ».

 

Les propos du président français ont été bien accueillis par des organisations de la société civile comme le Collectif contre l’impunité et la stigmatisation des communautés au Burkina Faso. Selon cette association, c’est un premier pas dans la lutte contre le terrorisme et la protection des civils qui voient leur espace de sécurité se réduire de plus en plus.

Daouda Diallo, porte-parole du collectif et représentant de Kisal au Burkina Faso, un observatoire des droits humains des pasteurs nomades et des minorités, félicite le président Macron « d’avoir porté haut ce message de la question dite délicate des exactions auxquelles on assiste de plus en plus dans la zone du G5 Sahel » mais il invite le chef de l’Etat français à passer « de l’acte à la parole ».

« Pour nous, la stratégie utilisée jusque-là n’est pas la bonne pour garantir la sécurité des citoyens burkinabè. La stratégie ne doit pas être seulement militaire, il faut aussi des initiatives de dialogue avec tous les grands acteurs, les grandes communautés. Il faut un programme national sur les questions de communauté pour amener les communautés à se parler, à se solidariser afin de mieux réussir cette lutte contre le terrorisme. »

En Mauritanie aussi, des voix s’élèvent pour appeler à protéger davantage les populations civiles suite aux propos du président français. Dans une conférence de presse tenue au lendemain du sommet de Nouakchott, le parlementaire et leader du mouvement abolitionniste IRA, Biram Dah Abeid, a demandé à Emmanuel Macron de faire pression sur les chefs d’Etat du Sahel, afin que cessent notamment les exactions perpétrées contre les populations peules par les armées du G5. « Le Sahel vit une situation globale de déliquescence, d’absence et d’injustice de l’Etat, une situation globale de déni d’état de droit, d’humanité. Les peuls sont visés, persécutés dans la sous région par les armées du Sahel. »

Les déplacés du centre du Mali

Parmi les populations civiles victimes de la situation au Sahel, celles du centre du Mali subissent une situation toujours plus dégradée. Le centre du pays est le théâtre d’attaques jihadistes ou criminelles, poussant de nombreux habitants à l’exil. Notre correspondante Coralie Pierret a rencontré des déplacés dans leur camp de la capitale malienne.

A Bamako, les déplacés du centre du Mali ont reconstruit leur village en miniature. Les femmes lavent les enfants dans les bassines tandis que les hommes sont assis sous une hutte. L’année dernière, Pathé Kelly a perdu des proches, sa maison et son bétail dans une attaque d’hommes armés. « Ceux qui sont restés au village sont dans une prison à ciel ouvert. Parce qu’il ne peuvent pas bouger. Les menaces planent même si les Fama et la Minusma sont là pour la sécurité. Ils ne peuvent pas reconstruire leur maison ni travailler. »

La peur se lit aussi sur le visage de Ousmane Diallo. Originaire de Bankass, il a des difficultés à retourner dans sa ville natale, à cause de la multiplication des menaces. « Il y a les jihadistes mais il y a aussi d’autres milices qui menacent les gens. Même avec les Fama, ils se sentent pas sécurisés. »

Pourtant, cette situation est peu au menu des grands sommets internationaux, insiste au milieu de ce marché à bétail, Hamadoune Dicko, le président des jeunes Tabital Pulaaku, une association communautaire peule. « Certes, même si on parvient à maîtriser la zone des trois frontières et le lac Tchad, tous ces groupes vont se réfugier vers le centre du Mali et créer d’autres nids à partir desquels ils vont mener d’autres opérations. C’est le centre du Mali qui est le noyau aujourd’hui. » Au Centre, selon les Nations unies, plusieurs centaines de civils ont été tués depuis le début de l’année.

Source: RFI