Aussi invraisemblable que cela puisse paraitre, le mystère qui entoure l’instabilité sécuritaire dans le Centre du Mali n’est qu’un secret de polichinelle.

Le phénomène  «Kouffa», et sa horde de «pseudos djihadistes» qui écument le Centre du Mali, selon des sources locales, n’est que le fruit d’un conflit communautaire qui a pris les proportions que l’on connait à ce jour. Nos sources rapportent que tout le problème est lié à la gestion des bourgoutières. Il s’agit des plaines inondées, où poussent des herbes très prisées par le bétail. Ces bourgoutières sont gérées par les «Dioros», ces propriétaires terriens qui les héritent de leurs pères. Chaque année, à la période de décrue dans le delta central du Niger, les éleveurs viennent y faire paitre leurs innombrables troupeaux. Selon un élu national originaire de la zone, les chefs Dioros percevaient jadis une vache laitière par éleveur en guise de redevance. Vache qu’ils traient durant tout le séjour du troupeau dans les bourgoutières. Au fil du temps, les descendants des Dioros ont abandonné cette pratique et réclament désormais de l’argent aux éleveurs. Le montant de cette redevance s’élèverait à 5 000 FCFA par tête. Ainsi, ils amasseraient des montants faramineux chaque année. La pratique culturelle serait donc devenue un commerce très florissant. Nos sources ajoutent que cette situation a provoqué des frustrations au sein des différentes communautés peules dans le Hairé et le Séno.

De plus en plus, des révoltes s’organisent donc pour protester contre ces pratiques jugées arbitraires et exagérées. Notre source affirme que l’administration publique avait connaissance de la détérioration de la situation et que certains gouverneurs et juges auraient préféré s’enrichir de la manne financière que leur verseraient les Dioros plutôt que de prendre la situation à bras-le-corps.

Face à l’impunité dont bénéficieraient les Dioros, des mouvements de résistance et d’autodéfense naquirent çà et là.  Les éleveurs auraient donc perdu toute confiance aux forces de l’ordre. Ils auraient décidé de se rendre justice eux-mêmes.

Le prédicateur Amadou Kouffa, qui séjournait en 2012 auprès des djihadistes Moktar Belmoctar et Iyad Ag Ghali, se serait radicalisé et a appris le maniement des armes. Après la libération des régions Nord du Mali, Kouffa profita de la débandade des terroristes pour se refugier dans le Macina. Dans cette zone, il profite des frustrations sociales pour rallier des communautés à sa cause.

C’est cette situation que le Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga résumait, dans une déclaration au Figaro, en ces termes : “Il faut lutter contre les groupes terroristes et en même temps engager une série d’actions urgentes pour rétablir la confiance en l’Etat des habitants du Centre”.

Nos sources estiment aussi que Soumeylou Boubèye mesure l’ampleur de la tâche qui l’attend dans cette partie du Mali, lorsqu’il confie au journal français: «Nous allons déployer très prochainement un volume important de forces militaires et sécuritaires sur une vingtaine de postes fixes dans des agglomérations. Elles seront jumelées avec des patrouilles et des opérations de nettoyage. En parallèle, des services publics vont être installés pour répondre aux besoins d’éducation, de santé, de sécurité alimentaire, de justice et de droits de l’Homme. Nous prévoyons aussi des mesures d’apaisement pour recréer un lien de confiance. Nous devons gagner le cœur et l’esprit des populations. »

Le Premier ministre est parfaitement imprégné de la situation, estime l’élu qui se réjouit du fait que Soumeylou Maïga reconnait  que Kouffa profite des tensions séculaires et qu’il prospère sur le recul de l’Etat.

Notre interlocuteur affirme par ailleurs que la situation est tellement poreuse que les communautés, vivant dans la peur, sont obligées de donner un fils par famille ou un montant énorme pour participer à l’effort de guerre de la ‘’katiba’’ d’Amadou Kouffa.

Jean JACQUES 

 

Source: Azalaï-Express