Bon nombre de maliens se souviennent, amères et pleins de déception, des déclarations françaises discourtoises à l’endroit de l’Etat du Mali, faisant l’apologie de la Rébellion touareg. Des déclarations qui visaient à « légitimer » un supposé combat du MNLA octroyant à ses membres le droit de mener une guerre contre la Mère-Patrie. C’était sous la présidence de Nicolas Sarkozy, premier soutien de la bande à Bilal Ag Chérif sur le plan international et, de nouveau, candidat à la présidentielle française. D’où cette question qui se pose de plus en plus avec acuité, la crise du septentrion malien serait-elle à un tournant décisif majeur à quelques encablures de la présidentielle française ?

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A l’éclatement de la dernière insurrection touareg, le 17 janvier 2012, les relations entre Bamako et Paris s’étaient dégradées. Koulouba soupçonnait l’Elysée d’avoir « dealé » avec les rebelles Touareg. Ces derniers devraient quitter les légions guerrières du guide libyen Mouammar Kadhafi et en échange, l’Etat français leur apporterait tous les soutiens nécessaires pour obtenir la scission du Mali. Une allégation d’autant argumentée que Paris aurait incessamment instruit à Niamey de céder le passage au convoi d’un haut gradé du MNLA, Mohamed Ag Najem, afin que le groupe armé rebelle puisse s’installer au nord malien. Les pions étaient déjà donc en place pour une déstabilisation à longue durée du Mali.

Le 7 février de la même année, à la stupeur générale des maliens, le ministre des Affaires Etrangères de la France, Alain Juppé, déclarait devant le Sénat français que « la rébellion touarègue a remporté récemment d’importants succès militaires au Nord du fleuve Niger. (…) Un cessez-le-feu immédiat est pour nous impératif ». Plus qu’un maladroit écart de langage, l’emploi du terme « succès militaire » pour qualifier des attaques d’une insurrection armée contre les forces d’un Etat souverain prouvait que la France de Sarkozy était bien dans une logique de soutien aux rebelles touareg. Des attaques qui ne peuvent être qualifiées que de crime grave contre la Nation. Plus tard, le ministre français de la Coopération de l’époque, Henri De Raincourt, affirmait le 21 février 2012 toujours devant le Sénat que « le non-respect des accords d’Alger de 2006, venant après l’échec de ceux de 1992, a incontestablement alourdi le climat entre les Touaregs et les gouvernements maliens ». Là encore, il est des détails qui ne trompent point. Pourquoi l’opposition «  Touaregs et gouvernements maliens » ? Allégation qui voulaient faire entendre qu’au Mali, tous les Touaregs sont en conflit avec l’Etat malien et aussi que ces derniers ne seraient pas partie de la Nation malienne. Sacrilège diplomatique !

Tous ces propos et bien d’autres encore prouvent que la France de Sarkozy avait résolument pris fait et cause pour la rébellion touareg. La présence sur son territoire de cadres du MNLA chantant à tout va l’Azawad date bien de l’époque de Nicolas. De son côté, le président Amadou Toumani Touré avait refusé l’installation d’une base militaire française à Mopti certainement par crainte d’une accélération de la chute du pays dans une crise multidimensionnelle. La présence d’une base militaire aux ordres de Sarkozy au centre du pays aurait été une aubaine pour les rebelles Touaregs de parvenir sournoisement à la séparation du pays en deux. Plus tard, cette crise multidimensionnelle éclatera sous le même président ATT rattrapé par une mauvaise gouvernance notamment au sein de l’Armée malienne.

Une fois Hollande au pouvoir, un changement significatif de discours sur le Mali est à noter même si toujours un  jeu trouble persiste concernant la crise du septentrion malien. Désormais, le président français parle volontiers du Mali comme d’un Etat indivisible. Il n’est plus question de mentionner « succès militaires » ou encore « Touaregs » quand une agression du MNLA et alliés est commise. Néanmoins, l’Administration Hollande ne daigne hausser le ton sur la rébellion touareg. Elle seule peut mettre fin à l’insolence de la CMA en l’absence d’autorité de l’Etat du Mali. Mais pour des raisons de Réalpolitik, elle s’emmure dans un silence complice aux rebelles.

Une chose est sûre néanmoins, la rébellion touareg ne peut avoir le cran de défier l’Etat du Mali si elle ne jouissait pas du soutien d’une grande puissance, en l’occurrence la France, qu’elle soit de Sarkozy ou de Hollande.  N’oublions pas que l’Administration est une continuité. Tout changement significatif de politique étrangère prend du temps. Cependant, entre un Sarkozy, allié de la première heure des rebelles du MNLA, complice actif de la crise malienne et un Hollande qui, malgré tout, a considérablement réduit la capacité de nuisances des narcoterroristes, le choix est vite fait.

Pour le salut diplomatique du Mali, François Hollande semble bien plus faire l’affaire des nôtres. Quant à l’ultime verrou de Kidal, la balle est beaucoup plus dans le camp de Koulouba que dans celui de l’Elysée. Qui pour reconquérir la dignité des maliens à la place des maliens eux-mêmes ?

Ahmed M. Thiam

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Source : Inf@sept