Au moins quarante morts, civils et militaires, ont été dénombrés mercredi 1er juillet dans l’attaque de plusieurs villages du centre du Mali. Une région en proie aux violences djihadistes et communautaires, où le sentiment d’abandon par l’État grandit. L’armée malienne déplore la mort de sept de ses hommes dans un « accrochage ».

L’attaque de villages dogons du centre du Mali livrés pendant des heures à la rage meurtrière d’hommes armés, puis une embuscade contre les soldats maliens ont fait au moins quarante morts civils et militaires, dans les dernières tueries à ensanglanter le pays.

Les évènements survenus mercredi et jeudi dans le secteur de Bankass, près de la frontière du Burkina Faso, illustrent une fois de plus le cycle de violences djihadistes et communautaires au Sahel et au Mali, malgré l’intervention de forces onusiennes, africaines et françaises.

Des hommes armés surgis sur des pick-ups ont tué 30 civils, hommes, femmes, enfants et vieillards. L’armée malienne déplore 7 morts dans un accrochage impliquant une patrouille envoyée dans la région après les massacres.

Foyer de violences

Le centre du Mali, et notamment cette région de Mopti, la grande ville à quelque 600 kilomètres de la capitale Bamako, est l’un des principaux foyers des violences parties du Nord en 2012 et qui se sont propagées depuis 2015 vers le sud du pays, mais aussi au Burkina Faso et au Niger voisins.

Elles sont dans cette région le fait de groupes armés, parfois « d’autodéfense », et jihadistes, opposant aussi les communautés.

On ignore pour l’instant qui est derrière ces nouveaux carnages.

Les forces armées maliennes annoncent ce vendredi sur Twitter la mort de 7 soldats dans un accrochage intervenu dans la nuit du 2 juillet, à l’entrée de Gouari, l’un des villages attaqués :

Dégradation sécuritaire

C’est dans le même secteur de Bankass qu’une trentaine de villageois avaient été tués mi-février à Ogossagou, où 160 civils avaient déjà été massacrés un an plus tôt – il s’agissait alors de Peuls.

Cette nouvelle tuerie illustre à nouveau la dégradation sécuritaire à laquelle sont en proie le Sahel et le Mali, malgré l’intervention de forces onusiennes, africaines et françaises.

Le centre du Mali, et notamment cette région de Mopti, la grande ville à quelque 600 kilomètres de la capitale Bamako, est l’un des principaux foyers des violences parties du nord en 2012 et qui se sont propagées à ces vastes étendues, mais aussi au Burkina et au Niger.

Depuis l’arrivée en 2015 de groupes armés, à commencer par celui de l’imam peul Amadou Koufa affilié à Al-Qaida, le centre est le théâtre d’exactions en tous genres : attaques contre le peu qu’il reste de l’État, massacres, représailles et actes crapuleux.

Les violences ont pris un caractère communautaire accru, surtout entre Dogons et Peuls – ces derniers souvent accusés par leurs voisins de soutenir les djihadistes – le groupe d’Amadou Koufa recrute prioritairement parmi les Peuls.

À ces violences s’ajoutent les abus des forces de sécurité contre les civils, Peuls surtout, selon le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’Homme. En tout, 580 personnes sont mortes dans le centre depuis le début de l’année, selon le Haut-Commissariat.

« Nombreux disparus »

On ignore les motivations de l’attaque de mercredi.

Des hommes armés en tenue de combat et montés sur plusieurs pick-ups ont attaqué quatre villages dogons où ils ont semé la terreur du milieu de l’après-midi jusqu’au début de la nuit, a dit un responsable local joint par téléphone et s’exprimant sous le couvert de l’anonymat pour des raisons de sécurité.

L’attaque a fait au moins 30 morts, dont des femmes, des enfants, des vieillards (et) de nombreux disparus, ainsi que d’importants dégâts, a-t-il dit.

Un haut représentant de l’administration s’exprimant lui aussi sous le couvert de l’anonymat a confirmé la mort d’une trentaine de civils, tués de manière barbare par des hommes armés.

Une organisation de défense des Dogons a accusé les Peuls sans que rien ne permette de corroborer de manière indépendante ces accusations.

La peur vide de nombreux villages. Devant l’insécurité, les communautés ont constitué des groupes d’autodéfense, qui contribuent à alimenter le cycle des violences.

Sentiment d’abandon par l’État

Les conflits prolifèrent sur les anciens antagonismes liés à la terre, fertile mais disputée, entre éleveurs et agriculteurs et entre ethnies. Les Peuls sont traditionnellement éleveurs, les Dogons agriculteurs.

Les djihadistes proposent un discours religieux, mais aussi social et économique, à des populations pauvres. Ils offrent protection à certains groupes contre d’autres et embrigadent des hommes guidés par la religion ou l’opportunisme.

Ils prospèrent sur le sentiment d’abandon par l’État. Une nouvelle fois, l’absence de l’armée est montrée du doigt mercredi.

De 15 à 21 heures, personne n’est venu à notre secours. Je déplore l’inaction de l’armée qui est toujours en retard et n’affronte jamais les bandits même si on leur dit où (ils) se logent, a témoigné auprès de l’AFP Youssouf Tiessougue, notable de Gouari, l’un des villages attaqués.

L’impuissance de l’État est l’un des principaux griefs de la contestation à laquelle fait face le pouvoir du président Ibrahim Boubacar Keïta et qui alarme ses alliés internationaux.

Les violences ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés depuis 2012. Depuis janvier, la France et ses alliés ont concentré leurs efforts sur un autre secteur, la zone dite des trois frontières (Mali, Burkina, Niger), contre l’organisation État islamique.

Source: ouest-france.fr