Le sommet de Pau, qui débute aujourd’hui, devrait être un tournant décisif dans la lutte contre le terrorisme au Sahel. Au départ, Macron l’avait convoqué pour que les Chefs d’Etats concernés clarifient leurs positions quant à la présence militaire française dans la zone. Aujourd’hui, il semble que l’éclaircissement soit valable pour les deux parties. Le président français semble bien décidé à dire ses vérités aux présidents du G5 Sahel. A eux aussi, d’en faire même.

Le président Macron aurait été choqué de constater que de plus en plus de Sahéliens s’insurgent contre la présence militaire française dans la zone alors que l’hexagone consent d’énormes efforts matériels et humains dans la lutte contre le terrorisme. Certainement, il n’a pas fourni l’effort intellectuel et moral de comprendre la position de ces populations vis-à-vis de l’insécurité dans leurs pays. Car beaucoup d’Africains subsahariens trouvent douteux que la lutte contre le terrorisme connaisse un tel enlisement alors que la France est une des plus grandes puissances militaires du monde. Et le doute s’épaissit lorsque les vieux démons du passé colonial resurgissent. La France serait en train de s’accaparer en douce les immenses richesses du nord malien en complicité avec les rebelles indépendantistes. Ou, du moins, préparerait le terrain pour une telle besogne qui se concrétiserait dans un futur proche. La lutte contre le terrorisme ne serait qu’un sous-couvert pour que la Realpolitik de la France au Sahel soit mise en œuvre.

Mais, la France a aussi sa fierté de grande puissance à préserver et à renforcer. D’où l’intérêt pour elle de sortir de sa contradiction dans le dossier sahélien. 3500 hommes pour tout le Sahel est très peu pour une bonne lutte contre une guerre asymétrique. Même si une telle opération militaire coûte les yeux de la tête à la France, elle devra mettre davantage de moyens matériels et humains à la disposition de Barkhane. Et c’est cette vérité que les Chefs d’Etats du G5 Sahel devront dire au président Macron. L’Elysée devra sortir de sa propre contradiction et surtout afficher pleinement son partie à l’Etat malien dans le processus de paix. Il faut aussi dire que lorsque l’on est à la tête d’un pays pauvre qui a brillé par son incapacité à assoir sa propre souveraineté, l’on est moins enclin à dire certaines vérités.

Mais, vu la gravité sécuritaire qui sévit au Sahel, toute vérité doit être dite. Du courage politique et diplomatique, il en faut aux présidents de la zone. Au nom de la vérité, qu’ils disent la vérité !

Ahmed M. Thiam

Source: Infosept