Pendant que la guerre fait rage entre héritiers de la démocratie au Mali, un second « printemps arabe » se dessine dans le Sahel. La lutte contre le terrorisme a raison des démocrates qui font, de plus en plus, place à des régimes militaires incertains. 

Quand, en 2011, nous assistons à la chute des pouvoirs dits « autocrates » de l’Afrique du nord, le monde s’exaltait de voir la démocratie libératrice dominer la nouvelle histoire des pays arabes. La Tunisie, la Lybie, l’Égypte et plus tard l’Algérie ont connu des transitions loin des espérances primaires et montré à la face du monde que la pression de la rue et son aspiration à la démocratie ne sont pas toujours jauge idéale.

Bien que chaque pays ait connu un sort propre, le cas de la Lybie et ensuite de l’Égypte sont interpellatrices. Le premier parce qu’il a été le déclencheur d’une guerre terroriste dans le Sahel, le second parce qu’il n’a pas résisté, malgré une parenthèse démocratique, aux sirènes de l’autocratie des pouvoirs militaires.

Dans le Sahel, un second printemps du même ordre se dessine avec une variante inattendue. En effet, les pouvoirs démocratiques, confrontés à la réalité du terrorisme, peinent à faire long feu face à la colère et la horde de manifestants réclamant plus de sécurité. Le Mali a connu l’épisode du renversement d’un pouvoir élu qui n’a pas su prendre la mesure des défis sécuritaires. La Guinée, pour une raison autre, a vu son Président, Alpha Condé, déposé par les militaires. Le Tchad, face à la rébellion naissante venue du Nord, a dû assister à un changement familial à la tête de l’Etat. Le Burkina-Faso, quant à lui, sous le feu terroriste depuis quelques années, avec des pertes colossales en vie humaine, entend son peuple reprendre le chemin de la rue pour réclamer la démission de son Président, pourtant élu démocratiquement.

L’asymétrie de la guerre contre le terrorisme intégré, sans doute, cette dimension de la déstabilisation des pouvoirs démocratiques par ses conséquences directes sur les populations. Un peuple qui n’est pas en sécurité, qui ne mange pas, qui ne s’épanouit pas, est un peuple qui ne s’attache pas aux systèmes de gouvernances, fussent-ils démocratiques. 

La chute des démocraties, qui fait en quelques sorte le jeu des terroristes, interroge sur la profondeur de vue de la situation militaire de nos États. En renversant un pouvoir élu, quelle garantie donnons-nous au peuple de faire mieux ?

Y.KEBE

Source: Bamakonews