Plus de 72 heures après les massacres d’Ogossagou qui ont fait plus de 135 morts, le 23 mars dernier, l’identité des assaillants n’est toujours pas connue. Cependant, depuis samedi, les regards se tournent vers la milice dogon, Dan Nan Ambassagou. Le gouvernement a annoncé sa dissolution, ce qui équivaut déjà à une forme d’accusation implicite.

Cette décision du gouvernement s’annonce comme un aveu d’impuissance, voire une complaisance avérée des pouvoirs publics alors qu’aucune preuve avérée n’établit encore l’implication directe de l’association dans le massacre d’Ogossagou, malgré les dénonciations et accusations de nombreuses organisations des droits humains et autres associations communautaires contre Dan Na Ambassagou.

« Depuis un certain temps, l’association DAN NA AMBASSAGOU s’est écartée de ses objectifs initiaux, en dépit des mises en garde répétées des autorités administratives locales », se défend le gouvernement.

Selon bon nombre d’observateurs, ce drame est en effet, le fruit de la négligence des autorités, restées sourdes aux appels de l’administration locale, des populations, des organisations de défense des droits de l’homme et autres organisations de la société civile.

Pour rappel, en mars 2018, le chef du gouvernement, au terme d’une tournée dans le Pays Dogon, avait annoncé sa volonté de désarmer ‘’les milices de gré ou de force’’. Lors d’une rencontre avec les chasseurs dogons et des notabilités à Koro, Soumeylou Boubèye MAÏGA avait annoncé sa décision de désarmer tous ceux qui détiennent des armes, sans autorisation. Dans un communiqué du Gouvernement daté du 16 avril 2018, le Premier ministre, chef du gouvernement, ordonne aux forces de défense et de sécurité de désarmer systématiquement tous les détenteurs d’armes. Noir sur blanc, il est y écrit que ‘’toute personne trouvée en possession d’arme de guerre serait purement et simplement désarmée de force. Parallèlement, des poursuites judiciaires seront engagées contre tous ceux qui seraient impliqués de près ou de loin dans les actions de violence, la diffusion de messages de haine ou d’incitation à la violence’’.

En septembre de la même 2018, une lueur d’espoir pointe à l’horizon, des Dogons signent un cessez-le-feu unilatéral et rencontrent à plusieurs reprises le Premier ministre Soumeylou Boubèye MAÏGA. But de la manœuvre : aboutir au désarmement.

Malheureusement depuis, rien ne semble bouger. Et le 20 mars 2019, ce groupe d’autodéfense annonce dans un communiqué, la reprise de ses patrouilles dans le pays Dogon, après le carnage enregistré dans le camp militaire de Dioura, le 17 mars 2019. Quelques jours plus tard, c’est l’horreur à Ogossagou et DAN NA AMBASSAGOU pointé du doigt ; déclare n’être ni de près ni de loin impliqué dans ces tueries.

Au lieu de chercher des arguments solides compromettant l’association avant de la dissoudre, on se hasarde quand même à choir la solution facile. Pire, pourquoi Da Na Ambassagou alors qu’elle est loin d’être la seule milice armée qui menace la paix et la stabilité du Mali. Le commun des Maliens allait être plus à l’aise d’entendre de son gouvernement : « À partir de ce jour, en République du Mali, l’État a seul le monopole légal de la violence. Par conséquent, toute autre personne retrouvée avec une arme, sans autorisation, est passible sanction… » Malgré l’ampleur du danger de la prolifération des armes par des personnes connues de tous et qui propagent la violence, à travers le pays, l’Etat continue à faire la complaisance et préfère désigner un coupable dans le drame d’Ogossagou en violation des règles de présomption d’innocence.

Par Abdoulaye OUATTARA

 

Source: info-matin