Ressortissants du secteur privé, unissons-nous !  Transition 2020, l’occasion de réaliser des réformes économiques Pendant que les Maliens sont dans les tractations pour mettre en place des autorités de la transition après le renversement du pouvoir du président Ibrahim Boubacar Kéita (IBK), au Conseil national du Patronat du Mali (CNPM) l’heure des échéances a sonné. On entre en phase de renouvellement des instances du Conseil. Votre hebdomadaire économique, Les Secrets Bancaires a approché le président sortant, candidat à sa propre succession, Mamadou Sinsy COULIBALY, pour un entretien en avant-première des bilans.

Les Secrets Bancaires: Nous sommes à quelques jours de l’élection du président du patronat malien, pouvez-vous nous parler des préparatifs?

Mamadou Sinsy COULIBALY: Nous sommes certes, à l’approche de notre élection, mais je ne peux pas en parler en ce moment, de crainte de trahir la discrétion des alliances faites depuis la création du CNPM en 1980. Il y a des pactes signés entre nous, pour éviter la division et garantir la prise de toutes les décisions à l’unanimité. C’est pourquoi au CNPM, depuis sa création, on n’entend pas parler de campagne électoraleLa vraie raison est que nous ne sommes que 150 votants, qui se connaissent tous ; et nous travaillons de manière collégiale.

Le secteur privé malien est très faible, et on doit être ensemble, valoir cette collégialité, pour mener à bien toutes les réformes nécessaires, pour le développement de l’économie et par ricochet celui du secteur privé dans sa globalité. Je n’aimerai pas enfreindre à ces alliances, à ces pactes qu’on a signés entre nous.  Avec l’évolution des choses, le jour viendra où on aura un secteur privé fort, où l’ensemble des ressortissants du CNPM va décider de changer de méthode, alors cela va changer. Mais pour l’instant, nous sommes dans une période où cette sagesse africaine et tout ce qui concerne le fondement même de notre société, sont en train de disparaître. Le CNPM s’efforcera au maximum d’être à l’abri de ce vent destructeur. C’est pourquoi je ne peux pas parler d’élection en ce moment, parce que la sagesse africaine et la parole des anciens, doivent être  respectées d’une manière ou d’une autre pour être en phase avec le développement économique de notre pays et de notre culture.

Les Secrets Bancaires: A vous entendre parler, on a plutôt l’impression qu’il n’y aura pas d’élection au patronat, doit-on comprendre que le consensus va prévaloir et que vous allez être reconduit au poste de président?

Mamadou Sinsy COULIBALY: Bien sûr, il y aura une élection. Il y aura deux listes, cela se fera dans la loyauté, dans la légalité, dans la transparence et bien supervisé. Mais je ne peux rien dire pour le moment sur ma victoire ou non, ce n’est pas dans ma culture. Je ne peux pas le dire, même si je crois que je vais gagner, je le garde pour moi-même.

Les Secrets Bancaires: Le Mali semble être en voie de refondation en ce moment, dites-nous, qu’est ce que le secteur privé peut attendre de ces reformes?

Mamadou Sinsy COULIBALY: Les besoins du secteur privé sont énormes. Le secteur privé est très faible, les besoins réels sont les réformes nécessaires, pour amener le secteur privé à se développer facilement, afin de créer le maximum de richesses. Sans ces reformes, pour la réalisation desquelles, il faut l’adhésion de tout le monde, le secteur privé ne peut pas se développer. Ainsi ces reformes nécessitent l’adhésion du monde politique, du monde économique, de la société civile et des partenaires au développement du pays. Ces reformes pour le développement du secteur privé, passent par l’instauration de la bonne gouvernance, une concurrence saine entre les entreprises pour servir de socle à une vraie démocratie dans notre pays. La démocratie ne peut que s’appuyer sur l’économie et la justice pour être une réponse aux problèmes de la société malienne, aux besoins de développement.

Les Secrets Bancaires: Quel appel avez-vous à  lancer aujourd’hui?

Mamadou Sinsy COULIBALY: Lors des évènements de 1991, le secteur privé n’a pas bénéficié de l’attention requise. En 1992, la priorité a été donné à l’organisation de l’Etat démocratique, aux institutions (Assemblée nationale, gouvernement, président de la République), les textes de leur organisation, fonctionnement et procédure. L’accent n’a pas été mis sur l’économie, qui a été fortement oubliée.

Je dis à tous les ressortissants du secteur privé que la transition de 2020 est l’occasion unique qui nous reste, qu’il ne faut pas rater pour réaliser toutes les réformes nécessaire. Le secteur privé est à la base du développement économique de notre pays. Quelle que soit la durée de cette transition, il faut faire en sorte que l’économie soit mise sur les rails. On ne peut pas espérer  sur le développement et ne pas mettre tout ce qu’il faut pour atteindre cet objectif.

Aujourd’hui le secteur privé est engagé pour sauver la junte. J’ai trahi un secret et je suis obligé de trahir ce secret. Lors de mes discutions avec l’association des Banquiers (Association professionnelles des Banques et Etablissements financiers – APBEF), il est ressorti qu’ils ont décidé au cours d’une réunion d’accompagner la transition pour éviter une crise sociale liée au non payement des salaires, des pensions, de l’assurance maladie (AMO/ CANAM). Ils ont décidé à l’unanimité de faire des prêts sans intérêt à l’Etat malien, quelle que soit la durée de la transition, pourvu qu’il n’y ait pas de crise sociale. C’est du jamais vu.

C’est à nous aussi de trouver les moyens de discuter avec les autorités de la transition pour que les banques, les assurances et tout le monde financier puissent continuer à jouer ces rôles dans les années à venir.

Propos recueillis par Philippe Charles le Bon MESSE