La question des chemins de fer au Mali fait couler beaucoup d’encre. Plusieurs problématiques s’y retrouvent. De la corruption à ciel ouvert au sommet des autorités en charge de ladite question, des phénomènes sociaux voire de l’immoralisme, etc. Cette situation n’a que trop duré et une solution certaine n’est trouvée pour amoindrir toutes ces nombreuses souffrances des travailleurs de cette compagnie. Drissa Traoré est chauffeur et membre du comité syndical de Kayes, il a pris le soin de nous faire une brève description de leur situation.

 « Il n’est pas dans les habitudes d’une chèvre de mordre, mais quand elle se trouve dans certaines conditions, cela reste son dernier recours », dit un proverbe bambara. La situation des cheminots n’a que trop duré. Ils traversent d’énormes difficultés qui les poussent maintenant à faire des révélations qui dépassent l’entendement. Contacté, Drissa Traoré, chauffeur et en même temps secrétaire général du comité syndical des cheminots de Kayes, laisse entendre qu’à la veille de l’élection présidentielle, les autorités ont fait savoir à la télévision que trois têtes de train ont été réceptionnées. Mais bizarrement, s’étonne-t-il, la réception a été faite en Afrique du Sud et on disait qu’elles devaient arriver au Mali dans les trois semaines qui ont suivi leur réception.

Très émus de cette nouvelle, les syndicats se sont rendus chez le ministre de l’Economie et des Finances, Boubou Cissé, pour le féliciter. Quel n’a été l’étonnement des cheminots en apprenant de ce dernier qu’il n’est au courant de grand-chose et pire, il se trouve au même pied d’information que les cheminots, explique M. Traoré ! À en croire aux propos de Drissa Traoré, les machines (2205) que possède le Mali actuellement datent de 1984, mais les autorités continuent à les repeindre. Les rames (wagons) indiennes datent de 2007, grâce à ATT, précise-t-il.  Ces wagons d’ATT ainsi que ces têtes datant de 1984 (machines) ont été repeintes sous les couleurs du RPM, sans installation de nouvelles pièces de rechange, martèle-t-il.

Lorsque le président actuel, Ibrahim Boubacar Kéita, est venu au pouvoir en 2013, les Blancs qui étaient là pour épauler les cheminots ont pris leur départ et une phase transitoire a été instituée et qui a vu venir au pouvoir Djribril Nama Kéita comme financier et Joseph Gabriel Samou comme directeur général.  Il a été attribué à ces autorités de la phase transitoire 6 milliards 500 millions FCFA dont 2 milliards étaient destinés à la réparation des endroits du chemin de fer qui étaient endommagés, 2 milliards pour payer les pièces de rechange et 2 milliards 500 millions pour le paiement des salaires, a-t-il expliqué. Chose regrettable, dans le rapport de 2016 fourni par Joseph, il est dit que 87 millions ont été investis dans les pièces alors que rien n’a été acheté, précise Drissa Traoré.

Outre cela, au temps de Baber Gano, ministre des Transports, ils ont dit que 250 millions FCFA ont été investis dans la réparation d’un pont à Kayes qui avait été endommagé par une pluie diluvienne. Cette somme n’a pas été investie dans ces travaux ce qui fait que le pont est encore endommagé, regrette-t-il, avant de préciser que cela fait huit mois que les travailleurs des chemins de fer ne sont plus payés.

Le ministre des Transports, contacté par les syndicats, avait demandé d’attendre la réponse de l’audit qui a été donné le 13 février 2018, suite auquel le Premier ministre avait institué d’écarter les membres de la transition qui ont détourné l’argent public. Ce détournement a fait que les cotisations à l’INPS, l’AMO, etc., sont prélevés sur les salaires des travailleurs sans être reversés, a tenu à préciser le chauffeur syndicaliste. Cette décision du PM n’a jusqu’à présent pas été mise en application. Du coup, des cheminots sont morts faute d’argent pour se soigner, beaucoup ont été chassés de leur logement pour non-paiement de loyer, beaucoup de leurs enfants sont déscolarisés, etc., souligne le syndicaliste. Plus de 500 cheminots vivent dans des conditions pareilles.

Aujourd’hui, de Bamako à Kayes, les espaces réservés au chemin de fer ont tous été vendus avec la complicité de Djibril Nama Kéita, martèle-t-il, avant de noter que ces espaces font fructifier chaque mois 240 millions de FCFA. Or, précise-t-il, la masse salariale de tous les cheminots maliens ne vaut pas 240 millions. Nous savons que les textes en matière d’installation dans les zones ferroviaires châtient toute installation à moins de 50 mètres du rail, explique Drissa Traoré, pour ensuite montrer que dans les derniers textes, il est dit que cet écart doit être moins de 25 mètres. Selon les dires de Drissa Traoré, il n’y a plus de chemin de fer au Mali, puisque les trains ne circulent plus.

Fousseni TOGOLA

Source: Le Pays