La Région de Ségou, a abrité du 7 au 17 août l’atelier de restitution des résultats d’enquête auprès des ménages agricoles dans deux zones agro-écologiques du Mali, à savoir Ségou dans le Delta du Niger et Sikasso sur le plateau de Koutiala. Après l’étape de Sikasso, celle de Ségou a concerné les localités de Séribala, Sibila, Niono et le Cercle de Ségou.

 

L’enquête portait sur : «l’évaluation de l’impact de la subvention des engrais auprès des producteurs» et entre dans le cadre du projet de recherche sur les politiques de sécurité alimentaire au Mal. Ce projet est financé par l’USAID à travers «Feed the Futur». L’enquête s’est déroulée en 2017-2018 dans 120 villages en zone cotonnière et rizicole de Ségou et Sikasso. Ce sont donc les résultats de cette recherche qui ont été partagés avec les paysans, afin de valider le document de recherche.

Ainsi pendant 10 jours, les producteurs des zones cibles se sont appropriés les conclusions de ladite recherche. La rencontre a été initiée par le bureau de l’Université d’état du Michigan (MSU) à Bamako, en partenariat avec l’IER/Ecofil. Lors des rencontres avec les producteurs, les chercheurs de MSU et de L’IER ont présenté les conclusions de l’analyse des impacts de la subvention des engrais sur les quantités d’engrais appliquées, les rendements, la commercialisation, la qualité de l’alimentation. Ce n’est pas tout, le nouveau programme pilote de distribution des engrais «evoucher» a fait l’objet d’un débat intense. Lors de la rencontre les points de vue des paysans sur les intrants agricoles et la commercialisation ont été pris en compte afin de parfaire les résultats de l’enquête.

Il ressort des analyses que le pourcentage des parcelles qui reçoivent de l’engrais minéral est plus élevé par rapport à l’utilisation de la fumure organique dans les zones de la Compagnie malienne pour le développement des textiles (CMDT) que dans les directions régionales d’agriculture (DRA), soit respectivement 77% et 65% des parcelles. Bref, l’utilisation de l’engrais minéral est plus répandue dans les zones encadrées par la CMDT et l’Office du Niger (ON). Il y a plus de parcelles avec fumure organique (FO) dans les zones DRA que dans des zones CMDT et ON. Il est à noter que les deux zones ont des systèmes d’encadrement différents et des accès différents aux engrais subventionnés.

L’étude fait aussi ressortir les difficultés d’accès à l’engrais minéral. Ainsi, il est plus facile d’avoir de l’engrais dans les localités de la CMDT que dans les localités DRA, car dans ces dernières zones les producteurs sont, en général, faiblement encadrés ou moins organisés. De façon générale, les producteurs reconnaissent l’utilité de la fumure organique pour les sols. Cependant, l’engrais minéral reste l’option préférée pour la simple raison qu’il serait très difficile de trouver une quantité suffisante de fumure organique pour les grandes superficies, comme les parcelles de coton.

Les pluies tardives expliqueraient aussi la préférence de l’engrais minéral par les paysans. Il faut aussi souligner, que le plus souvent, la fumure organique est appliquée sur les parcelles de sorgho ou de mil appartenant aux hommes ou sur des parcelles de sorgho des femmes, généralement de petites tailles. Dans la pratique, les parcelles de sorgho et de mil ne sont pas entièrement accessibles à la subvention. Selon les résultats présentés aux participants de l’atelier, l’utilisation de l’engrais minéral sur les parcelles est plus importante que celle de la fumure organique et ce, quel que soit le niveau d’équipements des producteurs.

Au niveau du genre, les résultats révèlent, de façon globale, que les hommes emploient plus d’engrais minéral par hectare que les femmes. Il a été par ailleurs remarqué que les hommes et les femmes ont presque le même niveau d’utilisation de l’engrais minéral par hectare sur le riz dans le plateau de Koutiala, tandis que les dernières dépassent les premiers dans le cas de la production de sorgho. L’enquête montre la difficulté d’accès des femmes à l’engrais minéral notamment dans la zone CMDT où l’accès à l’engrais minéral est conditionné à la culture du coton.

Les engrais sont beaucoup plus utilisés sur les riz dans le Delta avec les taux d’application de 275kg/ha pour les hommes et 221kg/ha pour les femmes. Dans le plateau de Koutiala, les engrais sont beaucoup plus utilisés sur le coton, le maïs et le riz avec, respectivement 224k/ha, 217kg/ha et 154kg/ha pour les hommes et 207kg/ha, 90kg/ha et 152 kg/ha pour les femmes.

En ce qui concerne l’engrais subventionné, les résultats ont démontré que la grande majorité des parcelles dans les zones du Delta et du plateau ont reçu des engrais subventionnés. On constate aussi que plus de parcelles ont reçu de l’engrais subventionnés dans les zones CMDT et ON que celles encadrées par les DRA. Dans la zone du Delta-ON le pourcentage des parcelles ayant reçu la subvention d’engrais est de 79% contre 94% dans la zone Plateau-CMDT. Les zones DRA du delta ont reçu moins de subvention que la zone DRA du plateau de Koutiala. Il ressort de la recherche que la subvention d’engrais contribue à l’augmentation de la quantité d’engrais utilisée, au rendement à l’hectare et au revenu d’un certains types de culture comme le maïs et le riz.

Par contre l’impact de la subvention sur le rendement à l’hectare du coton et du mil n’est pas significatif. En ce qui concerne l’impact de la subvention sur le rendement du coton, le résultat montre qu’elle n’a pas d’effet sur cette culture bien qu’elle ait permis l’augmentation des superficies. Pour les taux de commercialisation des principaux produits, il ressort que les quantités des céréales sèches (riz, sorgho, maïs ou mil) sont plutôt dédiées à la consommation qu’à la vente, contrairement aux produits tels que le coton, le sésame, les produits maraîchers, l’arachide, le niébé ou le fonio. Dans les localités CMDT, les producteurs disent vendre d’autres produits pour avoir un revenu complémentaire, en plus du coton.

Par ailleurs, dans les localités DRA, les paysans qui ne produisent pas de coton disent vendre une partie de leurs céréales afin de rembourser leur crédit d’engrais. L’enquête montre aussi que seulement 45% des femmes ont atteint le score minimum de diversité alimentaire pendant la période de soudure contre 80% pendant la période post-récolte.

La consommation des boissons sucrées et de jus est très faible et les plantes sauvages font toujours partie de l’alimentation en milieu rural. Les producteurs sont toujours conservateurs des semences des variétés locales, indique l’enquête. La zone du plateau reste championne dans l’utilisation des pesticides comparée au Delta et les pesticides les plus utilisés sont les herbicides dans la zone du plateau. à l’issue de la rencontre, plusieurs recommandations ont été formulées par les paysans, notamment l’accès à plus de semences, d’engrais et de pesticides de qualité.

Mariam A. Traoré
Amap-Ségou

Source : L’ESSOR