Avoir notre propre monnaie nous rendra-t-il plus prospères dans un futur proche? Oui, si l’on en croit les très actifs meneurs de la lutte pour l’abandon du franc CFA, et les chantres de l’intégration sous régionale.

 

Les premiers, criant sans cesse à l’entreprise néocolonialiste de la France, voient dans le CFA un goulot d’étranglement pour les économies des Etats qui l’utilisent. Les seconds, charmés et inspirés par l’exemple de l’Euro, sont convaincus que l’union monétaire sera l’atout maître du développement de la zone Cédéao.

Sensibles à ce débat monétaire qui passionne  et agite leurs populations respectives, les 15 chefs d’Etat de l’espace Cédéao ont décidé de semer la graine d’une nouvelle monnaie commune. Elle s’appellera « l’Eco », et ses premières récoltes (si tout va bien) auront lieu dès 2020.

Ah! de l’Ecoen abondance! Des billets made in Africa plein les poches!  On se frotte déjà les mains à une telle perspective.

N’aura-t-on pas enfin là notre destin monétaire entre nos mains? Ne disposerons-nous pas de cet instrument de fierté et de souveraineté que nous réclamons? Ne serons-pas dès lors les vrais ordonnateurs de nos politiques économiques? Voilà assurément les arguments-clés exposés par la galaxie des enthousiastes de l’Eco.

S’ils ont toutes les raisons de s’enthousiasmer, ils ne doivent pas pour autant ignorer ou sous-estimer les péripéties nombreuses qu’engendre toute nouvelle aventure monétaire.

Le premier défi sera la stabilité de l’Eco. Car, le tout n’est pas de créer une monnaie. Le plus difficile est de mettre en place les mécanismes efficaces pour la rendre stable et la mettre à l’abri d’un effondrementvertigineux. Voyons les mésaventures dela monnaie zimbabwéenne qui perd toute sa valeur de jour en jour.

Le second défi concernera la création soutenue de richesses et la compétitivité de nos économies. Ces deux facteurs sont nécessaires au renforcement de la monnaie. Or, beaucoup d’économies de la sous-région (du fait de l’insécurité djihadiste, des crises et des migrations forcées, du surendettement, des gestions financières déplorables etc.) ressemblent plus à des corps malades qu’à des athlètes aguerries.

Enfin, il y a l’impératif de la bonne gouvernance. Aucune monnaie ne portera en elle  la croissance et la recette du développement tant que la corruption à grande échelle et la gabegie demeurent le talentmajeur de nos gouvernants.

« L’argent n’a point d’odeur ». Mais le sous-développement a une saveur amère que nous avons assez goûtée à cause de l’incompétence de nos dirigeants.

Alors, que nous ayons le porte-monnaie garni de « WARI », de « Nafolo » ou d’« Eco », nous sommes preneurs!

Ce qui nous intéresse en priorité, c’est voir le chômage réduit, le pouvoir d’achat augmenté, la précarité reculée, nos deniers bien gérés, l’eau, l’électricité et le riz baissés de prix.

Cela, qu’importe la monnaie qu’on nous servira !

Mohamed Meba Tembely

Les échos