Pour le chroniqueur et éditorialiste Adam Thiam, même si le mandat de la Minusma sera renouvelé, la question de la stabilité du Mali oblige la mission onusienne à plus de résultats.

Ce 29 juin, New-York  statuera sur le sort de la  Minusma.  Trump, quant à   lui, passerait sans hésiter la mission onusienne à la moulinette. Et les concernant, de nombreux Maliens raccompagneraient Anadif a l’aéroport. Ils dénoncent un manque de résultats et ne se consolent même pas du fait que la Minusma est,  à la date d’aujourd’hui, la première économie du Mali. C’est elle qui loue, achète et emploie le plus dans notre pays désertés par les touristes depuis 2005 et  peinant -tout se tient- à attirer des investisseurs en raison de sa situation sécuritaire volatile.

L’administration malienne est certes revenue  aujourd’hui au Nord. Mais il reste  le nœud gordien : Kidal. Et la cité de l’Adrar cristallise toutes les rancœurs. Celles des partisans des ex-mouvements persuadés que l’Azawad,  qui a existé comme entité géo-historique même s’ils ne savent pas quand, est gommé par un État central animé par une élite urbaine boulimique. Celles ensuite des « unionistes » convaincus que l’instabilité du Mali est provoquée par et scandaleusement entretenue pour une poignée d’aventuriers pas représentatifs des populations du territoire revendiqué. Celles également des « légalistes », selon lesquels l’accord pour la paix et la réconciliation, outre qu’il viole sa constitution, dépèce le Mali, crée juridiquement l’Azawad aujourd’hui qu’il met en embuscade  plus tard pour son projet indépendantiste. Toutes  les théories, des plus anodines aux plus conspirationnistes, sont entendues, alimentant un sentiment anti-français spécifique et anti-communauté internationale dans une large mesure.

Profonde détérioration

Il faut ajouter au Nord la question extrêmement préoccupante du Centre. La Minusma pointe l’État malien. Extravertis, les Maliens accusent la communauté internationale.

A New York, le Mali sera sur la sellette de nouveau, par rapport à deux sujets : d’abord, les lenteurs accusées ou reprochées dans la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation, ensuite  la détérioration croissante de la situation sécuritaire au Centre du Mali.  Pour ce qui est de l’accord, les piétinements dans son application ont  élargi les cercles qui le rejettent et rendu plus recevables leurs arguments.

Deux aspects sont particulièrement  questionnés : la réintégration des ex combattants dans l’armée nationale et les mesures exigeant une révision constitutionnelle dont la création d’un Sénat. Que dire sur ces points ? La première  vérité est que les mesures de DDR n’exigent pas une révision constitutionnelle et sont liées à l’acceptation sincère d’autre part, par l’establishment militaire d’une seconde vague d’intégration des ex combattants rebelles, après celle consécutive au Pacte national de 1992, source de bien des controverses en 2012, soit vingt ans après, où les intégrés furent accusés d’avoir rejoint le MNLA, Ansardine ou le MAA.

La seconde vérité est que les mesures impliquant une révision de la constitution sont, en fait,  issues des Assises de la décentralisation, avant  l’Accord pour la paix et la réconciliation. Cette réalité questionne le  sérieux de la communication gouvernementale pour l’appropriation collective de l’accord. Mais le répéter finit par passer.

Pour le Centre, la situation a couvé pendant cinq ans, avant de métastaser avec l’ampleur d’aujourd’hui. La gravité de la crise relègue au second plan l’accord d’Alger. Le cadre formel, mis en place hier jeudi autour du Premier ministre (en fait un PSIRC politique au niveau de Bamako), ne manquera pas d’être perçu par New York comme un bon signal. Il permet à tout le monde de sauver la face, en particulier le gouvernement et la Minusma. Qui sera prorogée mais que la stabilisation du Mali oblige à plus de résultats.

 

Source: benbere