Cinq mois après la chute du Président Ibrahim Boubacar KEITA, le Mali des colonels et des alliés est à la croisée des chemins. L’ambitieux programme d’action gouvernementale avalé par le Conseil national de Transition (CNT) comme le sésame de la vie ne semble pas apaiser le pessimisme des milieux syndicaux et politiques. En attendant la moisson d’un bel optimisme, les Maliens s’interrogent et scrutent la profondeur de l’horizon.

 

La concupiscence habituelle des syndicats et l’impatience des populations maliennes à goûter aux fruits de l’après-IBK deviennent pressantes. L’accord de dupes avec la Centrale syndicale est loin de mettre sous contrôle le front social agité par plusieurs spasmes et la flambée des prix de plusieurs denrées de grande consommation devrait inquiéter et appeler à redoubler de vigilance. Mais, voilà, où étaient la plupart d’entre nous en décembre 1983 quand l’augmentation du prix de pain en Tunisie a entraîné des émeutes et la fin du règne de Habib Bourguiba ? Le Mali n’est pas la Tunisie. Mais le pain, c’est aujourd’hui la vie, un produit incontournable. La pénurie de pain, suite aux frictions et mouvements d’humeur toujours en cours dans la filière ne plaident pas pour la popularité des autorités de Transition.
S’il n’y avait que le pain qui manquait ! Le cycle vertigineux de hausses, souvent artificielles, constatées ces dernières semaines, commence à faire monter le mercure dans le thermomètre social. Signe de cette déception généralisée, l’émergence d’un front dit Populaire Contre la Vie Chère au Mali. Dans le silence jugé complice, en tout cas compromettant des Associations connues de consommateurs, des voix populaires prennent le relais. Regroupé au sein d’une plateforme d’associations de consommateurs, le Front populaire contre la vie chère qui porte aujourd’hui la voix et les aspirations des Maliens a frappé ce week-end un grand coup qui devrait faire réfléchir les autorités tout comme le constat de l’augmentation du prix de plusieurs denrées de grande consommation (la viande, la farine, le maïs, l’huile…).
Mais voilà, au lieu se pencher sur cette bombe sociale à quelques encablures du mois de ramadan synonyme d’augmentation systématique de prix, le gouvernement se donne des vacances, pardon se tape une excursion et savoure sa retraite touristique, pour ne pas dire farniente kaysienne comme si tout allait au mieux dans le meilleur des Mali possibles après IBK.
Sans être un oiseau de mauvais augure, le Premier ministre ferait mieux de rappliquer de s’occuper dare-dare de cette augmentation de prix des produits de première nécessité potentiellement dangereuse. Parce que présentement, dans notre pays, tous les indicateurs affichent une cherté de la vie. La vie chère se définissant comme l’inadéquation de l’évolution des prix des produits de grande consommation avec celle du revenu des ménages dont le pouvoir d’achat est relativement faible. Sommes-nous en train de rendre le gouvernement de la Transition seul responsable de la vie chère que nous connaissons ? Comme toute augmentation des prix réduit le pouvoir d’achat et rend la vie chère, celle que nous connaissons actuellement est certainement une bien triste réalité économique résultante de plusieurs phénomènes qui pourraient provoquer une hausse durable et générale des prix.
C’est pourquoi nous pensons simplement que pour y faire face, le gouvernement et toutes les parties prenantes devraient entreprendre des actions concourant à lutter contre tous les facteurs et les déterminants qui engendrent cette vie chère. La rareté et l’indisponibilité des produits sur le marché, l’absence de produits de substitution adéquats sont autant de facteurs aggravant la vie chère par le renchérissement des prix à travers l’inflation spéculative.

PAR BERTIN DAKOUO

Source : INFO-MATIN