Suite à un accord tripartite entre le Gouvernement, le Conseil National du Patronat et l’UNTM, il y a eu un procès versable de conciliation en date du 29-01-2019. Dans l’article 3-1 dudit procès-verbal, il est clairement mentionné que le gouvernement donne son accord pour le relèvement de trois (3) ans par catégorie, des âges de départ à la retraite.

Photo utilisée juste à titre d`illustration.

Cet accord a-t-il force de loi ? Il est à la source d’une bataille judiciaire entre le corps de la police et son département de tutelle. Nous vous faisons vivre le film d’un long procès gagné finalement par le corps de la police.

Le Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile représenté par la Direction Générale du Contentieux de l’État et ayant pour conseil Me Modibo Diakité a saisi la Cour de céans aux fins de révision de son arrête N° 638 du 13-08-2020 rendu dans l’affaire l’opposant aux sieurs Moussa Yarre et autres et dont le dispositif est ainsi libellé : « En la forme :- reçoit le recours comme régulier ; Au fond :-le déclare bien fondé ; -Annule l’arrêt n° 2019 du Ministre de la Sécurité et de la Protection Civile en ce qui concerne les réquerants ; -Ordonne la restitution de la consignation versée ; -Met les dépens à la charge du trésor public…

En effet, l’argumentaire avancé pour ce recours en révision se repose sur deux poutres avec à la clé la fausse interprétation de la loi sur : l’article 254 de la loi n°2016-046 du 16 décembre 2016 régissant la cour suprême ; et le fait de se référer uniquement au procès de conciliation du procès-verbal entre le Gouvernement, le Patronat et l’UNTM.

Au regard de cette lecture de la situation, la requérante a sollicité conformément, selon elle, à l’esprit de l’article 254 de la loi organique n°2016 du 23-09-2016, la révision de l’arrêt n°638 du 13-08-2020 de la section administrative qui annule l’arrêté n°2019-4186-MSPC-SG du 14-11-2019 du Ministère de la Sécurité et de la Protection civile.

Mémoire en défense

Me Seydou S. Coulibaly, conseil de Moussa Yarré et autres a avancé ces arguments contraires.

Selon lui, le requérant ne précise pas les dispositions de l’ordonnance n°2018-015-P-RM du 15 mars 2018 qui auraient fait l’objet de non application, tout comme il ne précise pas en quoi, l’application du procès-verbal de conciliation tripartite des fonctionnaires de trois (3) ans pourrait constituer une fausse interprétation de la loi. Mieux, Me Seydou Coulibaly avance que les mémorants ne voient pas comment le requérant pourrait reprocher quoi que ce soit à l’arrêt si l’on sait qu’il n’a même pas daigné participer à la procédure ayant abouti à l’arrêt dont révision est sollicitée, acquiesçant ainsi aux termes de la requête des mémorants. Selon Me Coulibaly, surabondamment, les mémorants constatent avec stupéfaction que c’est autour de l’ordonnance n°2018-0158-P-RM du 15 mars 2018 portant statut des fonctionnaires de la police nationale que s’articule le présent recours de révision. Une ordonnance qui n’a trait qu’aux structures des personnels de la police, qu’à leurs droits, devoirs et garanties, à leurs organes consultatifs, aux conditions générales de leur recrutement, au stage probatoire et à la titularisation, à leurs activités de congés qu’à leur détachement, disponibilité, suspension, mutation, avancement, rémunération et avantages, sécurité et retraite et enfin à la démission et au licenciement. A cet effet, il ne ressort nulle part, selon Me, dans cette ordonnance que les fonctionnaires de la police ne doivent nullement bénéficier d’autres avantages que ceux prévus par leur statut. C’est ainsi, que Me précise qu’il y a lieu de rappeler que le corps des fonctionnaires de la police n’est pas le seul corps ayant un statut particulier en sus de leur statut de fonctionnaire de l’État. Les fonctionnaires de la police sont des fonctionnaires de l’État et, comme tels, doivent bénéficier de tous les avantages résultants de l’accord tripartite Gouvernement-Patronat-UNTM, et ce, au même titre que tous les autres fonctionnaires de l’État.

Un passage même de ce procès-verbal notamment son article 3-1 précise clairement que le Gouvernement donne son accord pour un relèvement de trois 3 ans par catégorie, des âges de départ à la retraite. En ces termes précis, les travailleurs en activités en 2019 n’iront pas à la retraite le 31 décembre 2019. Qu’à la lecture de cet article 3-1, l’on se rend compte qu’il s’agit de tous les travailleurs sans exception et la correspondance n°638-UNTM-SG du 16 décembre 2019 du Secrétaire général de l’UNTM adressée au Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile confirme le caractère entièrement inclusif du procès-verbal de conciliation en date du 29-01-2019.

C’est au bénéfice de cet accord tripartite que l’âge de départ à la retraite des mémorants qui avaient tous cinquante-huit (58) ans à la date du 31 décembre 2019 a été relevé de trois (3) ans les faisant ainsi passer de 58 à 61 ans. En clair, les mémorants n’auraient dû aller à la retraite qu’au 31 décembre 2022.

C’est au regard de la méconnaissance des termes de ce procès-verbal de conciliation que l’arrêté querellé a été soumis à la censure du juge administratif et sanctionné par l’arrêt n°638 du 13 Août 2020 de la cour de céans. Ce qui n’est que justice.

Compte tenu de tout cela, la Cour Suprême (Section administrative) a tranché en défaveur du ministère de la Sécurité et de la Protection civile.

Et dans une note intitulée : « signification de titres exécutoires avec commandement aux fins de réintégration de fonctionnaires de leur corps » de l’Huissier Me Silvain M. Keita, en date du 20 novembre, il a été fait commandement à la Direction du Contentieux de l’État, d’avoir à réintégrer les requérants dans leur corps.

En résumé : Force doit rester à la loi. L’État doit aussi trouver une formule pour profiter de l’expérience des partants à la retraite. Au regard de la situation sécuritaire, il est aussi nécessaire de faire appel aux retraités de l’armée.

Kèlètigui Danioko

Source : LE PAYS