Trois personnes ont été tuées jeudi 29 octobre, dont au moins deux égorgées, à l’intérieur de la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, lors d’une attaque au couteau dont l’auteur, un jeune Tunisien fraîchement débarqué en Europe, a été arrêté et grièvement blessé. Un homme a été interpellé ce vendredi, soupçonné d’avoir été en contact avec l’assaillant.

Un homme de 47 ans, soupçonné d’avoir été en contact avec l’assaillant la veille de son triple assassinat au couteau dans la basilique Notre-Dame de l’Assomption, à Nice, a été placé en garde à vue jeudi soir, a-t-on appris ce vendredi de source judiciaire.

L’assaillant est un jeune Tunisien de 21 ans, nommé Brahim Issaoui, arrivé en France en octobre depuis l’Italie. Il n’était ni inscrit au fichier des empreintes digitales, ni connu des services de renseignement français et tunisiens, rapporte notre envoyé spécial à Nice, Stéphane Burgatt. Mais les enquêteurs retracent son parcours à partir d’éléments trouvés en sa possession.

« Il était porteur, au moment de son interpellation, d’un document sous forme d’un papier de la Croix-Rouge italienne au nom d’un ressortissant tunisien né en 1999, révèleJean-François Ricard, le procureur national antiterroriste. Il ressort des premières investigations que cette identité est bien celle de l’auteur. »

Une identité également confirmée par les autorités tunisiennes, selon France 24. Elles ont ouvert une information judiciaire selon une loi antiterroriste de 2015 permettant d’examiner les crimes commis hors du territoire et qui porteraient atteinte à la Tunisie.

Le jeune homme de 21 ans vivait à Sfax, ville côtière située à 270 km de Tunis. C’est là que se trouve encore sa famille, qui a été perquisitionnée ce jeudi après-midi par la police tunisienne. Il est arrivé en Europe par l’île italienne de Lampedusa le 20 septembre dernier, avant de débarquer sur le continent à Bari le 9 octobre, sa dernière apparition connue avant de refaire surface à Nice.

Il avait été mis en quarantaine par les autorités italiennes, puis visé par une obligation de quitter le territoire italien et laissé libre. Il n’a pas fait de demande d’asile en France. Pour l’instant, la date exacte de son entrée sur le territoire et les raisons qui l’ont poussé à venir en France restent inconnues, note Pierre Olivier, du service France de RFI.

Brahim Issaoui était un jeune bien élevé, selon un voisin de son quartier populaire en banlieue de Sfax, rapport notre correspondant à Tunis, Michel Picard. Le terroriste vient d’une famille de dix enfants dont le père est selon certains, agent de sécurité, selon d’autres, berger.

Il avait abandonné ses études au collège pour réparer des mobylettes et enchaîner les petits boulots précaires, de quoi économiser le prix de la traversée vers Lampedusa. Son entourage ignore tout de ses motivations et se contente d’affirmer qu’il s’était mis à fréquenter la mosquée depuis deux ans et demi. Ses antécédents judiciaires concernent des faits de violence et de possession de drogue.

avec :François ThuillierAncien officier des services antiterroristes, chercheur associé au Centre d’études sur les conflits. Auteur du livre « La révolution antiterroriste : ce que le terrorisme a fait de nous » et « Homo Terrorismus » (août 2020), aux éditions Temps présentMgr Bruno Valentinévêque auxiliaire de Versailles.

En moins d’une demi-heure, trois victimes parmi les paroissiens

C’est à 8h29 ce jeudi matin que le jeune homme entre dans la basilique. « Il y restera un peu moins d’une demi-heure, période durant laquelle il s’attaque à 3 victimes », relate le procureur.

La première victime, trouvée près de l’entrée principale, « est âgée de 60 ans, elle présente un égorgement très profond de l’ordre d’une décapitation », souligne Jean-François Ricard.

L’assaillant a ensuite égorgé mortellement le sacristain. Vincent L., 55 ans, était père de deux filles. La troisième victime est « une Brésilienne de 44 ans, mère de trois enfants et résidant en France », selon le ministère brésilien des Affaires étrangères. Après s’être enfuie de la basilique à 8h54 par le côté gauche de l’édifice, elle « est décédée dans un restaurant situé à proximité de la basilique des suites des multiples plaies », ajoute le procureur antiterroriste.

Un couteau avec une lame de 17 cm

C’est alors que la police municipale, alertée par un témoin, intervient et se retrouve face au tueur dans le couloir de cette entrée latérale de l’église.

« Cet homme s’était avancé vers eux de manière menaçante en criant « Allah Akbar », les contraignant alors à faire usage d’abord d’un pistolet à impulsions électriques, puis en faisant feu à plusieurs reprises avec leur arme de service », rapporte Jean-François Ricard.

Quatorze étuis de balles seront retrouvés au sol. L’arme du crime est un couteau de 30 cm, avec une lame de 17 cm. Deux autres non utilisés ont été retrouvés parmi ses effets personnels, ainsi qu’un Coran et deux téléphones. Son état de santé ne permet pas pour le moment d’interrogatoire.

« Il a été transporté en urgence à l’hôpital afin d’être opéré, précise le procureur. Il est très sérieusement blessé. Son pronostic vital reste actuellement engagé. »

Projeté en France par une organisation terroriste ?

Le parquet antiterroriste a ouvert immédiatement une enquête pour « assassinats et tentatives d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et « association de malfaiteurs terroriste criminelle », coordonnée par la Sous-direction antiterroriste (SDAT).

L’une des principales questions désormais va être de savoir si le jeune Tunisien a, par exemple, été envoyé par une organisation terroriste sur le territoire dans le but d’y commettre un attentat. Et c’est là que l’interpellation et l’audition de l’homme de 47 ans, qui aurait été en contact avec lui, pourra s’avérer très utile pour comprendre si l’auteur de l’attaque a pu bénéficier de complicités en France ou hors de France.

Source: Rfi.fr