Dans cet entretien exclusif, le président de l’Amicale des Anciens du Cesti de Dakar, notre confrère Alassane Souleymane, évoque, entre autres, les objectifs et les ambitions de son regroupement. S’agissant des perspectives, l’Ama-Cesti a décidé de faire de 2019 une année de grandes actions en termes de formation et de reconnaissance aux anciens de la presse malienne.

Aujourd’hui-Mali : Si on vous demande de vous présenter, que diriez-vous à nos lecteurs ?

Alassane Souleymane : Je suis un journaliste malien. Agent de l’Etat, je suis du corps des journalistes et réalisateurs et travaille à l’Ortm. Je suis, depuis novembre 2016, président de l’Amicale des Anciens du Cesti.

Pourquoi l’Amicale des anciens du Cesti ?

Je suis sorti de cette école qui est au Sénégal, mais qui est surtout connue pour sa vocation panafricaine, accueillant des ressortissants de la sous-région ouest africaine francophone, des deux Congo, du Gabon, du Tchad et des Comores pour la plupart. Le Mali a exactement fait former 126 journalistes de la première promotion en 1973 à nos jours. Les trois membres de cette première promotion sont alhamdoulilah vivants et ont pris leur retraite.

Lesquels ?

Nous avons Abdoul Kadri Cissé de l’Amap, Vincent Traoré qui a fini à l’Uemoa et Amadou Tidiane Traoré qui vit en Europe, ayant pris sa retraite à l’Union européenne. Comme quoi, le journalisme mène à tout à condition d’en sortir.

L’actuel Premier ministre aussi est un ancien du Cesti…

Avant cela, je vous apprends que dès la deuxième promo sortie en 1974, le Mali avait un contingent fort de huit sortants sur 23 au total. Le Sénégal qui est le pays d’établissement de l’école en avait 5, le Benin 1, la Côte d’ivoire 7 et le Burkina Faso 2. C’était la promotion de Souleymane Drabo, ancien directeur général de l’Amap, de feu Mohamed Maïga qui fut éminent journaliste à Jeune Afrique et aussi père de Aïssé Maïga l’actrice franco-malienne, de Baba Djourté de l’Ortm, ou encore de l’ambassadeur Modibo Diarra.

Oui pour parler du Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga, il est de la 6è promotion (1978) de même que Mamadou Kouyaté alias Jagger, ancien de L’Essor à la retraite, ancien chargé de communication de la Direction des impôts, aujourd’hui chroniqueur à L’Indépendant, de Amadou Siby également ancien de L’Essor à la retraite et qui a travaillé au Ministère des Finances ; de Djibril Mbodge, ancien journaliste de l’Ortm à la retraite, feu Baba Dagamaïssa, ancien directeur général de l’Ortm, pour ne citer que ceux-là.

Comment est organisé ce regroupement ?

L’Ama-Cesti est une association sous le régime de la loi 04-038 qui régit les associations. Elle été formellement créée par récépissé 0152/G-DB du 21 avril 2017. Nous sommes apolitiques et nous entendons apporter de la plus-value dans le secteur du journalisme et de la communication.  D’abord en serrant les liens entre les membres de l’association. Nous sommes de plusieurs générations de journalistes dont beaucoup sont à la retraite. Il y a aussi des jeunes. Il y a presque une différence de cinquante promotions entre les premiers sortants et les derniers. Beaucoup d’anciens ne connaissent pas les nouveaux et vice-versa. Et cela est une richesse qu’il faut exploiter et mettre au service de tout le monde. L’Amicale entend faire de sorte qu’on demeure une masse critique capable de porter des actions positives pour le développement de la presse au Mali.

Nous avons un bureau exécutif de neuf membres et nous essayons chacun de prendre un peu de son temps à accorder à l’Association. La vie associative est d’abord un apport bénévole et elle implique un sacrifice en efforts et en disponibilité. Chaque membre fait de son mieux pour y travailler.

Quelles sont réellement vos ambitions ?

Nous voulons être là pour tout le monde, les journalistes et acteurs des médias, ancien cestien ou pas. Je pense que si vous lisez nos statuts, vous comprendrez que nous ne voulons pas seulement être une amicale de jeunes et vieux qui se réfèrent à leur passage commun dans une école hors du pays. Cette école nous a forgés et nous lui serons éternellement reconnaissants de même que notre pays et tous les partenaires qui ont contribué à porter toutes ces promotions. Mais l’école est notre lien qui nous permet de partager des ambitions communes au Mali dans notre secteur propre. C’est pourquoi l’Ama-Cesti est là pour tous les acteurs du secteur des médias et de la communication, chaque personne qui veut apporter un plus, en termes d’idées, à travers une session de formation, une conférence, une contribution dans les médias, etc.

Le Mali a beaucoup formé ses journalistes au Sénégal, en France et en ex URSS. Depuis deux ans il y a une école de journalisme au Mali. Qu’est-ce que vous en pensez ?

C’est la meilleure chose qui puisse nous arriver au Mali, dans ce secteur. C’était revendiqué, c’était attendu. Et ça y est ! Nous en sommes heureux et nous sommes déjà partenaires de cette école. C’est dans nos statuts. Nous sommes là pour accompagner toutes les structures de formation en journalisme et communication car nous avons du vivier de formateurs pour elles. Je me réjouis que beaucoup d’anciens cestiens enseignent dans les écoles de formation.

En mai dernier, lors de la Journée internationale de la Liberté de la Presse, nous avons co-organisé une conférence avec l’Esjc de Bamako à la Maison de la presse. Je pense que ça s’est bien passé et ça a permis de mettre les projecteurs sur cette jeune école qui cherche sa voie et que nous allons aider dans cette optique.

Je profite pour rendre hommage à un homme, un doyen. Je veux parler de Diomansi Bomboté qui a généreusement accepté la sollicitation à lui faite par les autorités pour porter le projet de l’Ecole. Il y a travaillé en apportant toute son expertise vécue en tant qu’enseignant au Cesti et fonctionnaire de l’Unesco. Le doyen Bomboté a formé beaucoup de cestiens des premières promotions et continue de guider les premiers pas de cette école. Il a aussi encadré la mise en place de l’Amicale. Il était là. Il est comme notre patriarche aujourd’hui. Et lui et d’autres anciens comme M’bodge, feu Baba Daga, l’ancien ministre Hammadoun Touré, nous ont aidés à mettre en place l’Amicale. Le bureau leur rend tous hommage par ma modeste voix.

Quelles sont les activités que vous avez déjà menées ?

Nous allons au petit trot pour pouvoir aller sûrement. Je vous ai parlé de cette activité avec l’Esjc au mois de mai. Depuis trois ans, bien avant la création de l’Ama-Cesti, nous avons essayé d’être là à travers la Journée de la Liberté de la Presse. Nous sommes le premier bureau élu et notre première mission est de faire connaître l’Association. Cette année, nous avons essayé de faire le tour de nos membres anciens et ceux à des postes de responsabilité. Il faut qu’ils connaissent l’Amicale et ses missions.

Dans un deuxième temps, nous faisons le tour des institutions et des partenaires avec le même exercice. En fin octobre dernier, nous étions au ministère de tutelle où nous avons échangé avec les conseillers du ministre Arouna Modibo Touré. Nous avons été reçus par l’Ambassadeur du Sénégal, SEM Birame Mbagnick Diagne, qui nous a prêté une oreille attentive. Nous avons au programme d’autres visites de partenaires.

Quel est le bilan depuis la création de cette amicale ?

Nous avons tout d’abord élaboré un répertoire des membres de l’Association. Cela nous permettra de savoir ce que chacun fait, où se trouve chacun et surtout, surtout, ce que chacun peut faire lorsque nous le solliciterons pour les activités. Malheureusement, certains ne vivent plus et nous prions pour leur repos éternel. Nous avons également élaboré notre plan d’action que nous allons peaufiner chaque année pour l’adapter au contexte. Comme je vous l’ai dit plus haut, nous avons, en tant que pionniers dans l’Amicale, la mission de la faire connaître. Donc nous faisons beaucoup de communication. Nous avons un site en création, une page Facebook bien animée, créée un groupe Whatsapp pour tous nos membres de sorte de maintenir un lien permanent.

Quelles sont les perspectives ?

Si Dieu le veut, 2019 va être l’année des grandes actions en termes de formation et de reconnaissance aux anciens de la presse malienne. Nous ne serons pas en vase clos. Nous le ferons avec la Maison de la presse et toutes les associations sœurs qui le souhaiteraient.

Un mot pour la nouvelle génération de la presse malienne ?

Il y a tellement à dire. Notre métier est beau et séduisant et fait partie des plus ouverts. Les meilleurs journalistes ne sont pas forcément ceux qui sont allés à l’école de journalisme. Loin s’en faut ! Mais pour être journaliste sans une formation de journaliste, il faut être sûr d’avoir une formation solide équivalente. Après, il faut juste une adaptation et une transposition professionnelle avec les techniques du journalisme.

Même en ayant été dans une école de journaliste, aujourd’hui les temps n’ont pas que changé, les temps changent constamment ! Et votre propre métier presque chaque jour, chaque année. Je dis ça pour dire qu’il nous faut chaque fois nous remettre en question, nous reformer, nous adapter pour être toujours le meilleur dans ce que nous faisons. Je dis à mes cadets ce que j’ai appris de mes aînés : que l’humilité porte dans ce métier car c’est elle qui vous permet de discuter avec le charbonnier le matin et de diner avec le président de la République le soir.

Pour avoir ces privilèges, nous devons avoir à l’idée de rester nous-mêmes, c’est à dire journalistes. Faire le choix d’être le juge pour ce que le métier confère au minimum et de ne pas être en même temps partie pour le moindre danger que cela peut comporter. Et pour faire simple dans tout ça : sachons que le commentaire est libre, les faits sont sacrés.

 Réalisé par El Hadj A.B. HAÏDARA

Source: Aujourd’hui