Mme Bah Assitan Traoré, présidente de la Fnam, chevalier de l’Ordre national du Mali depuis 2014, est une femme battante. Selon elle, l’artisanat est un secteur pourvoyeur d’emplois. A l’en croire, la Fédération nationale des artisans du Mali (Fnam) et le Fonds d’appui à l’apprentissage et à la formation professionnelle (Fafpa) en sont des soutiens constants.

Pouvez-vous-vous présenter à nos lecteurs?

Je suis Mme Bah Assitan Traoré teinturière et couturière de profession, présidente de la Fédération nationale des artisans du Mali (Fnam).

Comment avez-vous eu l’idée de mettre en place une Fédération des artisans du Mali ?

Dans les années 1960 après l’indépendance du Mali, le secteur de l’artisanat était en ballotage entre différentes structures comme l’Office de la main d’œuvre et le ministère de la Jeunesse. C’est ainsi que le projet BIT fut instauré en 1980 avec comme seul objectif, l’organisation du secteur non structuré qu’était l’artisanat. De 1980 à 1982 jusqu’en 1986, le projet BIT, en partenariat avec l’Office de la main d’œuvre, et avec le soutien de feu Kary Dembélé, pu faire des activités pouvant renforcer le secteur de l’artisanat. C’est en 1986 que le projet BIT, à travers ses activités, a pu regrouper les artisans en différentes associations et différents regroupements.

A l’époque, il a été constaté que tous les artisans au sein des associations et regroupements étaient confrontés à de nombreuses difficultés comme le problème de la fiscalité, la formation qualifiante, l’accès aux marchés et le manque de financement fiable. Parlant de financement, bon nombre manquait de moyens pour préfinancer les activités de leurs entreprises. Pour pallier ces quatre problèmes, il y a eu la nécessité de mettre en place une Fédération artisane et convaincre l’Etat de suivre et accompagner les artisans. Cela ne saurait être possible pour chaque artisan d’être accompagné financièrement et théoriquement à l’époque.

La Fédération à son début concernait les artisans du district de Bamako dont la Fédération des artisans du district (Fad). C’est à partir de 1986 jusqu’en 1992, avec l’appui du projet BIT, que la Fédération s’est implantée en dehors de Bamako, dans les régions, les cercles et les arrondissements tout en se transformant en Fédération des artisans du Mali (Fam). Dans la même optique avec l’appui du projet BIT et l’accompagnement sans faille de l’Etat, la Fédération nationale des artisans du Mali (Fnam) a été mise en place en 1992, suivie de la création des chambres de métiers.

Quelles sont les missions de la Fnam ?

En plus des aspects sus cités, la Fnam a toujours comme mission la création de jumelage entre les artisans maliens et ceux d’autres pays de l’Afrique et des autres continents ; la promotion de la formation professionnelle qui est source du renforcement et le développement des entreprises artisanales. Pour anecdote, la Fnam est membre d’une organisation regroupant les Fédérations d’artisans de l’espace Uémoa.

Quels sont les partenaires de la Fnam ?

La Fnam travaille en partenariat avec des structures étatiques telles que le Fonds d’appui à la formation professionnelle et de l’apprentissage (Fafpa), l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi (ANPE) et l’Agence pour la promotion de l’emploi des jeunes (Apej). En ce qui concerne les chambres de métiers et d’industries, elles sont liées à la Fnam à travers une relation de complémentarité car les chambres de métiers et d’industries sont des constituantes de l’Assemblée permanente des chambres de métiers qui a été mise en place par la Fnam. Autrement dit, l’Assemblée permanente des chambres de métiers est la structure représentante de la Fédération nationale des artisans du Mali auprès de l’Etat.

La Fnam regroupe combien d’associations artisanes en son sein présentement ?

Actuellement, 1226 associations se regroupent au sein de la Fnam. Et toutes ces associations sont aussi constituées de plusieurs chefs d’entreprises artisanes. Ce qui fait qu’aujourd’hui, la Fnam a 80 000 chefs d’entreprises comme membres actifs.

Quelles sont les modalités d’adhésion à la Fnam ?

L’adhésion à la Fnam est volontaire et le respect strict des règles du statut et règlement est obligatoire pour les membres dès leur adhésion à la Fédération.

Vous disiez tantôt que le Fafpa est parmi les partenaires de la Fnam, expliquez-nous comment le Fafpa vous accompagne ? 

La Fnam, bien qu’étant accompagnée par des ONG à travers le projet BIT, ses membres se sont posé la question à l’époque. Si la Fnam reste toujours en marge des activités de l’Etat tout en travaillant avec les ONG dans l’ombre, qu’est-ce qu’elle va devenir au terme des missions du projet BIT ? C’est ainsi que la Fnam a entrepris les démarches nécessaires auprès du Fafpa qui est une structure de l’Etat en charge de la formation professionnelle pour qu’elle soit reconnue. Alors, le Fafpa tout d’abord été une porte d’entrée en contact avec l’Etat du Mali pour la Fnam. En plus, la relation Fnam-Fafpa s’inscrit dans le financement de la formation des chefs d’entreprises ou des apprentis des entreprises membres de la Fnam. C’est dans cette optique que le Fafpa et la Fnam ont élaboré un projet de formation scindé en deux branches.

La première branche est la formation professionnelle de type duel qui concerne la formation des artisans et des apprentis au sein des entreprises et dans les centres de formation professionnelle. Avec l’évolution de la technologie, la formation continue devient une nécessité pour les artisans. C’est pourquoi, le Fafpa s’est intéressé à un deuxième type de formation qualifiante basée sur la formation continue des maîtres artisans (chefs d’entreprises). Cette formation qualifiante est organisée par une structure nommée la Cofpa mise en place par la Chambre des métiers et la Fnam.

Comment se fait le choix des bénéficiaires de la formation ?

Les formations sont organisées par le Fafpa et la Fnam, mais les demandes de formation sont adressées à la Fnam. Quand un chef d’entreprise constate une nécessite de formation au sein de son entreprise, il formule une demande adressée à la Fnam à travers la représentation de sa région, commune ou cercle au nom de la personne ou l’entreprise qui est dans le besoin. La Fnam, à travers la cellule composée de chargés de formations, fait une planification des demandes et formule une demande de formation au bénéfice de ses adhérents  auprès du Fafpa. Le Fafpa, à son tour, finance les formations à part entière.

Peut-on dire sans risque de se tromper que toutes les 80 000 entreprises ont bénéficié de l’aide du Fafpa ? 

Etant donné que les formations sont faites selon les demandes exprimées par spécialités, toutes les entreprises ne peuvent pas en bénéficier ensemble. Par exemple, il peut y avoir des demandes de formation sur les techniques de séchage de bois, la transformation alimentaire telle que celle du fonio etc. Présentement, les 40 % des entreprises membres de la Fnam ont bénéficié de l’appui du Fafpa. Je suis même persuadée que les 100 % se réaliseront au fur et à mesure de l’engagement sans faille de la Fnam et du Fafpa.

Avez-vous une idée du nombre d’enfants introduit dans le secteur de l’artisanat ? 

Aujourd’hui au Mali, c’est l’artisanat qui est le secteur le plus pourvoyeur d’emplois et utilise le plus grand nombre de jeunes et d’enfants. Cela est dû au fait que l’artisanat demeure le dernier rempart pour bon nombre de parents quand leurs enfants ne sont pas bons à l’école ou abandonnent l’école. Ainsi je peux dire aujourd’hui, sans risque de me tromper que les 60 % des membres de la Fnam sont des jeunes entre 25 à 40 ans. En ce qui concerne les apprentis au sein des différentes entreprises, ils représentent 70 % et ont entre 10 à 25 ans. Avec ces résultats, il est incontestable d’admettre que l’artisanat demeure le plus grand pourvoyeur d’emplois au Mali.

Avec tous ces projets entrepris avec le Fafpa, qu’attendez-vous de lui dans l’avenir ?

Au-delà de la Fnam, j’exprime le souhaite de tous les Maliens à l’endroit du Fafpa et de l’Etat. Ce souhait est le renforcement des capacités du Fafpa par les autorités en charge de son fonctionnement. Le Fafpa joue un rôle prépondérant dans la formation professionnelle et devient indispensable pour le développement des activités génératrices de l’artisanat malien. J’exhorte les dirigeants du Fafpa à œuvrer davantage pour rester l’irremplaçable espoir et partenaire toujours prêt à intervenir auprès des artisans du Mali.

L’artisanat est un pourvoyeur d’emplois et le Fafpa est son soutien de tous les temps, il est indispensable qu’il soit doté de plus de moyens pour endiguer le problème du chômage qui gangrène la stabilité du monde aujourd’hui. J’ai eu à le dire lors d’une rencontre africaine et je le réitère, que Dieu nous en préserve, mais s’il doit y avoir une Troisième Guerre mondiale, elle aura sa source dans le chômage des jeunes.

Nos universités produisent des jeunes chômeurs chaque année. Ces jeunes passent leurs temps à prendre du thé sous les arbres. Si l’Etat procure plus de moyens au Fafpa, il pourra à travers la Fnam aider ces jeunes à se lancer dans le domaine de l’artisanat.

Votre mot de fin ?

Mes sincères remerciements aux médias nationaux et internationaux qui font la promotion de tout ce que nous faisons et qui constituent la voix et les yeux du citoyen lambda. Mes remerciements à l’endroit du département du ministère de l’Emploi, de la Formation professionnelle, à travers le Fafpa ainsi qu’à tout le personnel du Fafpa partout au Mali.

Je remercie également toutes et tous les artisanes et artisans membres ou non membres de la Fnam partout au Mali. Que le Tout Puissant ramène la paix et la quiétude d’antan au Mali en Afrique et partout dans le monde !

Propos recueillis par Dognoumé Diarra

Le Confident