La chute du régime IBK a pour source la corruption et ses ingrédients. Or, ce système revient au galop. La perte de confiance entre gouvernés et gouvernants est de nature à saper les fondements mêmes du système démocratique en portant atteinte à la légitimité des institutions qui symbolisent l’État. La cote d’alerte est déjà atteinte au Mali comme l’atteste l’attribution des marchés publics par la transition aux prédateurs du tissu socioéconomique.

Les auteurs de la corruption et des malversations financières se recrutent presque exclusivement dans certaines couches sociales privilégiées et minoritaires: fonctionnaires, magistrats, agents des forces armées et de sécurité, membres des professions libérales, commerçants, industriels, notabilités traditionnelles ou religieuses. Tout comme l’activité politique, le phénomène de la corruption et des malversations financières revêt un caractère élitiste et urbain.

La semaine du 6 au 10 juin 2022 a été ponctuée par l’attribution de plusieurs marchés, de la pose de la première pierre de la nouvelle cimenterie Atlas et celle de la mine de lithium de Koulamina (Bougouni), en passant par le marché de 9 milliards de F CFA de l’Agence de gestion du fonds d’accès universel (AGEFAU) attribué à la Société Simo Télécom. Si toutes ces activités sont à saluer, elles ont suscité interrogations et soupçons de délits d’initié, voire de blanchiment d’argent, y compris même auprès de plus farouches défenseurs des autorités de la transition.
C’est ainsi que le marché de mise en place d’infrastructure de télécommunication ultra sécurisé et autonome d’après le communiqué du Conseil des ministres, attribué à la Société Simo Télécom dans des conditions floues, selon les spécialistes, pose problème. D’un montant de 9 milliards de FCFA et entièrement financé par l’AGEFAU, il s’avère que la Société Simo Télécom n’a ni la capacité technique ni la capacité financière pour exécuter ledit marché. Plus grave, selon certaines sources, la Société aurait bénéficié de la garantie de l’Agence de gestion du fonds d’accès universel (AGFAU) qui aurait mis dans la balance ses Dépôts à terme (DAT) qu’elle a dans les banques pour garantir ledit marché.
Si cette information se confirmait, on serait, vraisemblablement en face de manœuvres graves pour aider une société à faire face à des exigences financières pour exécuter un marché. Or, c’est la même manœuvre que la justice malienne reproche aujourd’hui à l’ancienne ministre de l’Économie et des Finances, Mme Bouaré Fily Sissoko, qui croupit en prison tout comme l’ancien ministre et ancien directeur de cabinet du président IBK, Mahamadou Camara.
Mme Bouaré Fily Sissoko avait donné une garantie de 100 milliards de F CFA de l’État malien pour permettre à Guo Star de Sidi Mohamed Kagnassy ou d’Amadou Kouma, c’est selon, d’exécuter le fameux marché d’équipements militaires. Le second signé, par ordre il est vrai, au bénéfice de Guo Star, le mandat N°0001/D. cab-Pr du 5 novembre 2013 donnant pouvoir à celle-ci «traiter avec tout fournisseur ou intermédiaire que ce soit, des affaires d’équipement des forces de défense et de sécurité maliennes».

On ne peut pas poursuivre des gens pour avoir commis de pareils crimes et permettre les mêmes pratiques à d’autres dans ce que les autorités actuelles appellent elles-mêmes le Mali Kura. Et puis, à notre humble avis, le pays a des besoins plus urgents que de mettre 8,4 milliards de F CFA dans la couverture téléphonique de certaines zones. Ce marché sent le souffre.

Cimenterie de Dio
Si la pose de la première pierre de la cimenterie, située près de Dio, a été saluée par beaucoup de nos concitoyens, elle a suscité beaucoup d’interrogations, lorsque les adeptes du Mali Kura ont découvert les promoteurs de la ladite cimenterie qui sont deux jeunes maliens: Papa Oumar Samaké et Amadou Sow parce que si le dernier nommé n’est pas très connu, Papa Oumar Samaké est connu comme un compagnon de Karim Keïta pour avoir bénéficié dans des conditions plus qu’opaques de plusieurs marchés surtout au niveau du ministère de la Défense et des Anciens combattants. De là, à faire de lui comme faisant partie des nombreux prête-noms des caciques de l’ancien régime est un pas que de nombreux initiés ont franchis allègrement.
Le voir aujourd’hui parmi les promoteurs de la nouvelle cimenterie d’un coût de plus de 50 milliards de FCFA, a suscité auprès de ces mêmes observateurs, un relent de blanchiment d’argent qui ne dit pas son nom. Les affidés de l’ancien régime ne s’y sont pas d’ailleurs trompé en inondant les réseaux sociaux pour dire que les autorités de la transition n’ont aucune gloriole à tirer de la construction de cette cimenterie qui est «l’œuvre de deux (02) jeunes opérateurs maliens». Une manière de dire: «ils sont des nôtres». Laissant ainsi un goût de cendre aux supporteurs de la transition qui voulaient aujourd’hui cette belle initiative au bilan de celle-ci.

Pose de la première pierre de l’usine de lithium
S’il est une chose qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive, c’est bien la pose de la première pierre, vendredi 3 juin 2022, du projet de lithium de Koulamina, à cheval entre les communes rurales de Danou et de Farakoma dans la région de Bougouni. Même notre confrère, Boubou Mabel Diawara, dont le soutien à la transition est revendiqué et entièrement assumé, s’est dit scandalisé par la caution donnée par les autorités de la transition audit marché dans lequel notre pays n’aurait que 10% comme signalé sur le site de la société chinoise Léo Lithium Ltd qui a fini par hériter du juteux marché.
20%, selon Seydou Lamine Traoré, le ministre des Mines, de l’Énergie et de l’Eau. Là aussi, au-delà la guerre des chiffres, c’est le fait même que les autorités de la transition ait reconduit le contrat dont l’autorisation de recherche date de 2016 et le décret d’exploitation de 2019 accordé à Timbuktu Ressources Sarl, une filiale de Firefinch Limited, qui fait désordre.
D’autant plus qu’au départ, beaucoup de choses ont été dites sur les actionnaires de ladite Société dans laquelle se trouveraient un ancien Premier ministre, un haut gradé et un ancien député influent de l’ancien régime. Ce dernier avait pu se faire établir un titre foncier de plus de vingt (20) hectares sur ledit site; titre foncier qui aurait été finalement annulé par le courageux ministre des Domaines de l’État de l’époque.
Les mauvaises langues disent même que ladite société a été créée à Londres par le trio de multimilliardaires qui faisait la pluie et le beau temps sous Ibrahim Boubacar Kéita et qui continuent d’en être les plus grands actionnaires par sociétés interposées.
La Rédaction

Source: L’inter de Bamako