Sous la pression de l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) et sur le rapport du ministre du Travail, de la Fonction publique et du Dialogue social, le conseil des ministres a adopté, le 30 juin 2021, un projet de loi portant grille indiciaire unifiée des militaires et personnels relevant des statuts des fonctionnaires de l’Etat, des collectivités territoriales et des statuts autonomes. Objectif déclaré, selon le gouvernement : rétablir l’équité entre les agents de l’Etat. Quelques heures après le conseil, l’UNTM n’a pas manqué d’exulter en remerciant ses militants pour leur persévérance dans dans lutte avant de les inviter à savourer cette avancée avec humilité et prudence. En revanche, le projet de loi a été rejeté en bloc par les Syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016, qui y voient une remise en cause de l’article 39 à peine entré en vigueur et dont ils sont décidés à défendre les acquis et avantages. Et cela, malgré la rencontre avec le Premier ministre, Dr Choguel K Maiga, le vendredi dernier, aux fins de désamorcer la bombe. Conséquence : la Synergie des syndicats de l’éducation reste sur pied de guerre tél qu’en atteste son communiqué rendu public lors d’un point de presse animé par son porte-parole, Ousmane Almoudou.

Dans ledit communiqué, les syndicalistes rappellent au Premier ministre le caractère sacré de leur loi et leur attachement à l’application stricte de l’ensemble de ses dispositions, y compris l’article 39.  Et selon le porte-parole de la synergie « Toute majoration des rémunérations des fonctionnaires relevant du Statut général s’applique de plein droit au personnel enseignant de l’Enseignement secondaire, de l’Enseignement fondamental et de l’Education préscolaire et spéciale ». Et d’ajouter que «les enseignants doivent bénéficier des 15% que le gouvernement projette d’accorder aux fonctionnaires du statut général». M. Almoudou en a profité pour régler ses compte avec le PM, en lui rappelant qu’au même titre que «la justice pour ses compagnons de lutte du M5-RFP» lui tient à cœur les enseignants sont prêts à tout pour défendre ce qu’il qualifient de « sacré », en occurrence l’article 39.

La synergie des syndicats des enseignants, qui estime qu’il ne lui reste d’autre choix que de se battre, a invité ses militants et militantes à la mobilisation générale afin de faire face au nouveau défi. En attendant l’adoption d’un programme d’actions urgentes, les ils les ont également appelés à la rétention de toutes les notes à partir du 1er  juillet 2021 jusqu’à nouvel ordre.

Ainsi, la hache de guerre des enseignants qui n’avait jamais été complètement enterrée risque d’être mise en action au grand dam de l’avenir des enfants, du moins des élèves à parents pauvres des établissements publics.

Amidou Keita

 

Uniformisation des grilles salariales  

Entre la foudre Untm et la tempête Synergie, le PM a choisi 

En optant pour l’harmonisation des grilles salariales, le dernier conseil des ministres aura tranché – mais sans forcément dénoué – une situation qui n’a que trop perduré. En effet, le Gouvernement Choguel Maiga, à la différence de l’équipe précédente, donne l’air de ne pas se méprend sur le rapport des forces UNTM – Synergie, mais en risquant aussi de ne pas obtenir la stabilité nécessaire à la conduite des politiques publiques.

Plusieurs corporations dont l’armée et les collectivités territoriales voient leur statut changer, par le biais notamment d’une nouvelle grille salariale avec un indice unifié comme solution à la sensible équation des augmentations d’indemnités. Ce faisant, le PM a sans doute sous-pesé les poids de l’UNTM et de Synergie et fait sa préférence. Secoué par la puissante centrale syndicale lors dès sa visite de prise de contact, Dr Choguel Maiga a visiblement mesuré toute l’ampleur des menaces brandies par ses interlocuteurs de réactiver l’épée de Damoclès suspendue suite au renversement du régime défunt longtemps ébranlé par les éclats du choc à distance entre les camps de Yacouba Katilé et d’Almoudou Toure. L’intensité de leur bras de fer était d’ailleurs mesurable à l’atmosphère des récentes interpellations parlementaires du gouvernement au sujet du Conseil économique et social, que Yacouba Katilé et ses camarades ont prises en mal en y voyant une arrogance voire une défiance de la part de l’honorable Adama Fomba.

L’harmonisation intervient en définitive comme un avant-goût de victoire pour la centrale syndicale historique, qui devrait logiquement en reconquérir son statut  d’interlocuteur et de partenaire social le plus prioritaire et le plus redoutable aux yeux des hautes autorités. Cela facilitera-t-il pour autant la tâche au nouveau gouvernement en quête d’apaisement du climat social ? Rien n’est moins sûr, à en juger par la levée de bouclier consécutive à l’harmonisation des grilles salariales. En effet, la rencontre de clarification entre la Synergie et le chef du Gouvernement – quant aux implications de la nouvelle mesure sur l’article 39 – a tourné court, la semaine dernière. Elle a notamment accouché d’un nouveau feuilleton de l’interminable péril sur l’école malienne avec comme avant-scène la rétention des notes par les syndicats d’enseignants.

Entre les deux forces de nuisances, laquelle fallait-il en définitive s’épargner ?

La décision du dernier Conseil des Ministres prouve manifestement que le PM a choisi de cheminer avec l’UNTM pour éviter une paralysie de l’administration, quitte à affronter le courroux de Synergie, en passe de se traduire par un coup de grâce au système éducatif. Le PM et son gouvernement pourront-ils résister aux pressions du front enseignant et d’une population manifestement lassée des perturbations incessantes des années scolaires ?

Les assises nationales de la refondation s’annoncent selon toute vraisemblance avec des étincelles dans l’air.

A. K

 

Source : Le Témoin