Le discours qu’il a prononcé devant les nombreux participants réunis au palais de la Culture Amadou Hampâthé Ba, avait l’allure d’un procès contre ceux qui ont choisi le boycott à la place de la participation. Mais le chef de l’Etat ne leur ferme pas définitivement les portes du train de la paix et de la réconciliation au Mali.

ibrahim boubacar keita ibk president baba akhib haidara mediateur conference entente nationale

« A  ceux-là et à tous les autres qui n’auront pu être là, je rappelle que cette Conférence d’entente nationale est un train  qui  démarre. Et ceux qui ne l’auront pas pris dans cette  gare  peuvent  toujours  le  rattraper  à  une  autre  gare,  à une  autre  station.  L’essentiel  est  qu’à  l’arrivée,  toute  la famille  soit  réunie.  Et  la  dernière  gare,  le terminus de ce voyage porte le nom : Entente nationale ».

IBK ne comprend pas que certains Maliens, en l’occurrence l’opposition et la CMA, puissent se mettre en marge de cette initiative ; qu’ils n’ont pu transcender leurs rancœurs, leurs égos pour la cause de la mère-patrie qui est le Mali. Parce que pour lui, « c’est  en  famille  que  se  lave  le linge sale, et non dehors ».

Pour le président de la République, ceux qui ont décidé de boycotter, se sont abrités derrière des prétextes de la mal organisation, or aucune œuvre humaine ne saurait être dans la perfection absolue.

Ibrahim Boubacar Kéita a salué le courage de ceux qui ont bravé les interdictions de leurs organisations pour répondre à l’appel de la patrie, sans oublier ceux qui n’ont pu le faire, mais qui sont de cœur avec la conférence. « Un immense merci, également, à ceux qui sont là  et  qui  se  le  verront  reprocher par ceux pour qui l’adversaire politique ne peut être qu’un ennemi. Une pensée triste et affectueuse pour ceux qui auraient aimé être là, mais qui craignent de devoir le payer très cher, parce que telle est la règle, dans le parti, l’organisation, le groupe dont ils sont membres, car dans leur monde, saluer, tendre la main à un frère avec qui l’on a un désaccord, c’est trahir ».

Le chef de l’Etat a trouvé la séante parabole, en assimilant le Mali à une famille dans laquelle se trouve une vieille mère dont il faut absolument s’en occuper. « Certes, il faut à cette vieille mère quelqu’un pour veiller sur elle  jour  et  nuit,  et  c’est  un président,  qui  se  trouve  être, aujourd’hui, ma modeste personne.  Et, croyez moi,  cette grande famille est exigeante. Pour mériter de se voir confier la garde de la mère, il vaut mieux, dans ses comportements d’hier et d’aujourd’hui, avoir fait preuve de constance et de présence.  Dans  quelle  famille laisserait-on  la  garde  de  la vieille  mère  à  un  fils capricieux,  qui  déserte  la  maison chaque fois qu’il est mécontent, à une fille inconstante, qui  boude  et  disparaît  chaque  fois  qu’elle  a  une  petite contrariété ? Sachons  donc,  par  notre  exemplarité,  notre  rigueur,  notre constance  en  toute circonstance,  mériter  la  confiance  de  la famille pour mériter la garde de la vieille mère, l’Etat. Notre égoïsme  et  nos  incohérences  d’aujourd’hui,  peuvent facilement  nous disqualifier  et nous  rendre indigne  de  la garde de la mère ! ». Comme pour dire que celui qui ne répond pas aujourd’hui à l’appel de la mère patrie en s’associant au diagnostic de sa maladie, se disqualifie pour sa plus haute charge demain. Les opposants sont donc avertis.

« Je ne serai pas celui qui jettera la première pierre. Mais, que chacun,  en  son  âme  et  conscience,  en  permanence,  se demande en quoi ses postures enrichissent la démocratie, en  quoi  les  actes  qu’il  pose  contribuent  à  l’essor  de  la nation malienne. Je faillirais  à  mon  devoir,  si  je  ne  déplorais  pas,  ici, certaines absences et le discours qui les justifie. Aussi, même en étant rivaux dans le combat politique, nous ne devons jamais perdre de vue que, sur cette terre du Mali, la  démocratie  n’approchera  les  abords  de  la  perfection  que lorsque  chacun  comprendra  qu’il  lui  appartient  d’apporter constamment  ses  idées  et  son  talent  à  l’œuvre  de  la perfection patriotique.  C’est l’addition de nos talents et de nos différences qui nous permettra d’enrichir la construction de la démocratie sur cette  terre  sacrée.  Et  l’on  ne  peut  espérer  bâtir  une  grande nation en se tenant à l’écart, en dehors, chaque fois que l’on n’est pas satisfait. Ou, pire, affirmer que l’on a en réserve ce qu’il faut pour améliorer l’Etat et les conditions de vie des Maliens, mais que, pour que notre peuple puisse en profiter, il devra attendre que vous arriviez aux responsabilités. Non, la nation se  construit sur la durée,  et ce que vous ferez viendra s’ajouter, dans la continuité, à ce qu’auront fait vos prédécesseurs.  Si  vous  pouvez  aider  votre  patrie,  votre peuple, c’est ici, maintenant qu’il faut le faire ».  

La  meilleure  des  organisations  comporte  toujours  des failles.  Le  travail  des  plus  grands  génies  présente  toujours quelques insuffisances, et l’on ne refuse pas d’assister à un important événement familial, parce que l’organisation n’est pas  parfaite.

Comme principales  ambitions  de  la Conférence d’entente nationale, il s’agit pour les quelques 300 participants de réfléchir  pendant une semaine sur  les  causes  de l’enchaînement  des  crises  qui  ont  frappé  le  Nord  de  notre pays et dont  les effets menacent  désormais de s’étendre au Centre.  Il  sera question de se  mobiliser  pour  la préservation  de  notre  capacité  de  résilience  qui  a  été considérablement  sollicitée  au cours  de  ces  cinq  dernières années ; se  concerter  et  s’accorder sur la meilleure manière de revitaliser notre vivre-ensemble.

Une  fois  que  le président de la République aura reçu  les recommandations  de  la Conférence, il décidera  du  cadre,  des  modalités  et  de l’agenda  de  l’élaboration définitive  ainsi  que  de  son appropriation par l’ensemble des composantes de la nation de la charte pour la paix, l’unité et la réconciliation nationale. La Conférence d’entente nationale n’ayant pour but que d’élaborer des éléments constitutifs de la future charte.

Abdoulaye Diakité  

 

La rédaction