Mali: des soldats français à la recherche du sous-terrain secret dans Gao

Le tunnel secret dans Gao partirait des vestiges d’une mosquée du 14ème siècle et pourrait cacher des armes, pourquoi pas des otages. Pour tenter de le découvrir, les soldats français creusent la terre rouge.

 

Depuis deux semaines, les sapeurs spécialisés dans la Fouille opérationnelle spéciale (Fos) interviennent, tôt le matin, sur renseignements recueillis auprès de la population, à la recherche de caches d’armes, de munitions ou de tout ce que les combattants jihadistes auraient pu avoir dissimulé dans leur retraite.

Un vieil homme en boubou bleu roi les regarde faire. Trois soldats du 31ème Génie, basé à Castelsarrasin, genou à terre, fouillent la latérite avec leurs pelles pliantes. “Et là, ils ont creusé ? Ils ont recouvert ensuite ?” lui demande l’adjudant Christophe.

“Nous cherchons une plaque de métal qui pourrait recouvrir l’entrée d’un sous-terrain” explique-t-il à l’AFP. “Il y a une rumeur en ville qui dit qu’un tunnel relie ce site archéologique à certaines maisons. Les jihadistes auraient pu s’en servir pour cacher des armes, pourquoi pas des otages. . . Mais nous ne sommes même pas sûr qu’il existe vraiment. Il faut tout vérifier”.

Ses hommes ne trouvent que des morceaux de sacs plastiques. “OK, c’est pas çà. On referme”.

Dans son blindé le capitaine Benoît (lui aussi n’accepte de révéler que son prénom) précise que “l’opération Boa nous a permis de trouver dans Gao quelques armes, du matériel médical correspondant à deux hôpitaux de campagne, pour plus de 10. 000 euros de cigarettes qui permettait à l’ennemi de se financer, de quoi payer une soixantaine de jihadistes étrangers”.

“La population de Gao nous est favorable, elle est soulagée d’avoir été libérée des jihadistes, alors elle nous parle. Ici comme ailleurs les gens voient tout, savent tout, ils ne perdaient rien de ce que faisaient les jihadistes”.

Les hommes du Fos reviennent de Tessalit, en pays touareg plus au Nord. “Là, c’est beaucoup plus dur” dit l’un d’eux. “Les gens ont peur. Ils nous disaient: +on est regardés, on ne peux pas parler. Vous les Français vous allez partir et nous on reste là+. Mais malgré çà nous avons trouvé beaucoup de choses”.

La prochaine cible du détachement, dans le même quartier, est un secteur où les égouts, ailleurs à ciel ouvert, sont couverts par des plaques de béton. Idéal pour des planques. L’un des sapeurs descend à l’intérieur du boyau, sale mais sec en cette saison, avance, binette de jardin dans une main, lampe électrique géante dans l’autre. Comme il progresse un camarade déroule une corde, ligne de vie attachée à sa ceinture pour pouvoir le tracter en arrière en cas de problème. Rien.

Des habitants ont évoqué la grande enceinte dans laquelle un transporteur routier gare ses camions, qui aurait abrité des jihadistes.

Précédés par deux gendarmes maliens, sans lesquels les soldats français n’ont pas le droit de pénétrer dans des habitations, ils arrivent devant. “Nous allons fouiller l’ensemble, comme pour un +compound+” dit à ses hommes l’adjudant Christophe, évoquant l’Afghanistan d’où ils reviennent et où le concept de Fos a été créé dans l’armée française, sur un modèle mis au point par l’armée anglaise en Irlande.

A l’intérieur, une petite fille est seule avec de tout jeunes enfants, qui pleurent à la vue de blancs armés et que l’on rassure avec des biscuits en attendant l’arrivée du gardien qui vient au pas de course.

Il apporte les clefs des cadenas fermant les deux petites pièces, autorise la fouille des camions et des remises. L’adjudant Christophe a repéré un endroit où le sol semble retourné. Un coup de détecteur de métaux, qui repère n’importe quelle sorte de métal jusqu’à trente centimètres de profondeur, les dissuade de creuser.

Le maître-chien conduit Kappa, son animal spécialisé dans la recherche d’armes et d’explosifs, de véhicule en véhicule. Il renifle, tourne, vire, ne trouve rien. Le contenu d’un petit sac suspect trouvé dans de vieux climatiseurs est analysé avec des produits chimiques réactifs: négatif, sans doute des sels de déshydratation.

Pendant la fouille, l’un des soldats prend le gardien à part: “Et il y a des gens qui passent par ici, la nuit, avec des armes ?”

 

Source: Jeune Afrique