Pour libérer Kidal et, au-delà l’ensemble des régions du nord, le Gatia donne 30 jours maxi. Le défi vous parait surréaliste ? Pourtant, les chefs de guerre du Groupe d’autodéfense imghad et alliés jurent de ne faire qu’une bouchée les bandits armés du Hcua et ses complices qui occupent Kidal, si aucun soutien occulte ne s’invite dans le jeu.  Pourquoi ?

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Kidal échappe, depuis plus de deux ans, au contrôle de l’Etat malien. Et l’espoir des Maliens semble désormais placé en la Plateforme –groupe armé favorable au Mali-, précisément le Gatia, pour laver l’affront du 24 mai 2014 et faire revenir cette localité dans le giron de la République. Cette espérance, palpable au sein de l’opinion nationale, est nourrie aussi bien par l’engagement patriotique des responsables du Gatia que leur aptitude guerrière. Ils ont fait leur preuve sur le terrain. Nul besoin de rappeler ici leurs faits d’arme. Mais le cas Kidal reste encore pour eux une énigme. Pourtant, cette localité est loin d’être une forteresse, comme le font croire certains membres de la CMA qui, d’ailleurs, n’est en réalité qu’une coquille vide. Militairement, elle ne tiendra pas plus qu’une journée, face au Gatia. Et pour cause….

La CMA se résume aujourd’hui au Hcua. Or, celui-ci n’a aucune force militaire. Il est adossé au groupe terroriste Ansar Dine, dont le chef Iyad Ag Ghaly le manipule à souhait. Quant aux deux autres mouvements composants la CMA, le Mnla et MAA, eux, n’existent plus que de nom. Il est connu que le Mnla ne sait jamais remis de sa défaite face aux djihadistes du Mujao, pendant l’occupation du nord. Pour mémoire, le bras armé de ce mouvement séparatiste (Mnla) avait, à l’époque, été carrément anéanti. Il tentera de se remettre en selle à l’avènement de l’opération Serval. En vain. Depuis, le Mnla n’existe qu’à travers ses seuls leaders politiques qui, à coup de propagandes sur les médias internationaux, arrivent encore à retenir l’attention de la communauté internationale. Idem pour le mouvement MAA qui joue de la figuration au sein de la Coordination des mouvements de l’Azawad. Les limites militaires de ce mouvement sont palpables.

C’est dire que la CMA ne doit point l’occupation de Kidal à ses capacités militaires. Les raisons profondes sont ailleurs. Selon un chef militaire du Gatia, cette occupation est due à trois facteurs.

Primo : la faiblesse de l’Etat.  En effet, face à la faiblesse du régime en place et survoltés par leur percée militaire, les rebelles de Kidal ont multiplié les pressions pour la satisfaction de leurs désidératas. La dernière pression exercée par la CMA était d’exiger de l’Etat malien la signature d’un protocole d’entente sur la mise en place des autorités intérimaires dans les régions du nord. Le gouvernement a cédé devant la CMA qui avait suspendu sa participation au Comité de suivi de l’Accord et conditionné son retour à la table du dialogue à la mise en place diligente de ces autorités prévues dans certaines localités du nord. Le gouvernement, qui ne trouvait pas cet aspect prioritaire ni urgent, s’est finalement plié. Les parties ont adopté, lors de la 9ème session de ce comité, une sorte de protocole d’« ENTENTE » préjudiciable à l’unité du pays.

Aujourd’hui, tous les principes sacro-saints d’égalité, de justice et de solidarité sont malmenés au profit de bandits armés. Avant, pendant et après la signature de l’accord de paix des 15 mai et 20 juin 2015, les rebelles alignent les victoires sur l’Etat-nation du Mali, dont le premier responsable cède sur toute la ligne, aux prix de compromis et de compromissions. Le Mali s’est finalement empêtré dans un accord qui ne peut s’appliquer.

Secundo : les rebelles de Kidal bénéficient de soutiens étrangers. Selon notre source, la CMA est adossée à la communauté internationale qui, depuis la libération des régions du nord, lui apporte conseil et assistance. Ainsi, toutes les stratégies de ces gens sont maintenant élaborées soit en Europe ou à Alger. Le principal médiateur (Algérie) de la crise malienne est, en réalité, le premier soutien des rebelles de Kidal.

Et tertio : la France. Le soutien de l’Hexagone aux occupants de Kidal  n’est plus qu’un secret de polichinelle. En effet, la question de l’opportunité et la nécessité de l’intervention militaire française ne se posait pas à son déclenchement en 2013, mais les opinions ont vite commencé à changer. Et depuis les évènements mais 2014 à Kidal, le doute qui était palpable dans l’opinion publique malienne s’est désormais transformé en réelle conviction de l’existence d’un agenda caché pour la France. Des observateurs pensent que les terroristes ne sont pas l’objectif de cette guerre. Ils sont seulement le prétexte. A long terme, soutient le député belge Laurent Louis, l’objectif pour la France est de maintenir en permanence sa présence militaire au Mali, en faire un Etat sous tutelle des occidentaux pour leur réserver l’exclusivité des richesses du pays. De plus en plus, il est question de l’acheminement au nord du Mali d’engins lourds de génie civil. A quelle fin ?

 Chasser les rebelles si…

Ainsi, la France entretient un flou sur sa présence au nord du Mali. Cependant, l’opinion malienne est de plus en plus remontée contre les français. Et pour cause. Le mois dernier, de violents affrontements avaient opposé les combattants du Gatia aux éléments de la CMA. La suite est connue… Le Gatia avait fini par abandonner la ville de Kidal, sous la pression (l’intervention ?) des forces françaises et de la Minusma. Des responsables du Gatia et de la Plateforme avaient dénoncé cette ingérence française en ces termes : « les français ont sauvé leurs protégés ». Cette ingérence n’était pas la première. On se souvient, la plateforme avait pris la localité de Ménaka, le 27 avril 2015. Elle sera contrainte, à la faveur d’un « arrangement sécuritaire » de quitter cette localité. Il s’est avéré que la pression de la médiation visait surtout à satisfaire les exigences de la CMA, qui avait fait de ce retrait un préalable à la signature de l’accord de paix déjà entériné le 15 mai 2015 par le gouvernement malien et ses alliés. Aussi, toujours sur fond de chantages et de fourberies, la CMA avait aussi réussi à retrouver ses positions à Anéfis, d’où elle avait été chassée par la Plateforme, en septembre dernier.

Aujourd’hui, la France fait tout pour maintenir Kidal sous le contrôle des rebelles de la CMA. Une stratégie de partage du Mali que Paris avait déjà dévoilé en 2013. A cette époque, l’opération Serval, après avoir libéré les régions de Gao et Tombouctou, avait interdit l’accès de Kidal à l’armée malienne.

Hormis ces trois facteurs, les responsables du Gatia se disent capables de libérer les régions du nord du Mali dans un petit délai de 30 jours maximum, si aucune intervention étrangère n’est faite pour sauver les rebelles. Et si les autorités maliennes manifestent leur volonté de libérer Kidal.

 

Sambou Diarra

Source : L’ Aube