Au fil des mois, la sérénité qui régnait autour de la Transition et de la volonté des autorités de s’en tenir à l’échéance initiale fait place à l’inquiétude, de plus en plus exprimée par les Maliens. La raison ? L’absence totale de perspectives réelles sur les nombreux défis qui se posent à la Transition.

La Transition, dans la compréhension de bon nombre de Maliens, est loin de connaître son plein régime. A moins d’un an de sa fin, aucun signe concret n’est à mettre sous la dent, s’agissant de la satisfaction des mesures qu’elle a elle-même initiées, à son début, marquant ce qu’on a appelé la refondation du Mali.

Le tableau est aujourd’hui franchement noir : en témoigne la dernière trouvaille du Premier  ministre, intitulée Comité stratégique sur les réformes politiques et institutionnelles, mis en place par le chef du gouvernement, et mis sous sa responsabilité directe. Six mois après le démarrage de la transition, qu’il s’agisse du ministère de l’Administration territoriale celui des Réformes, l’illustration de la faillite institutionnelle est caractéristique de la création d’un tel comité, apparaissant, en tout état de cause comme une déviance vis-à-vis des ministériels sectoriels, chargés de ces questions stratégiques,  qui ont eu du mal à bien articuler le processus en cours.

Le fait de ramener à son seul profil les compétences dédiées à ces deux ministères n’est rien d’autre que la manifestation d’une certaine impuissance gouvernementale à conduire plus efficacement les mesures annoncées.

Pareil pour le rejet d’un organe unique de gestion des élections, une demande forte des acteurs nationaux.  Là-dessus, la controverse est toujours vive et entière. Tandis que le Premier ministre, lors de la présentation de son PAG, soutient que cet outil, quoique indispensable pour la transparence des élections, ne peut pas être disponible, à l’état actuel des choses, les partis politiques et acteurs de la société civile, eux, soutiennent mordicus sa mise en place.

Pour le chef du gouvernement, il n’y a aucun moyen pour cela, car le temps imparti à la transition ne permet pas l’opérationnalité de ladite structure. Pour les acteurs nationaux, point d’avancée sur la raison d’être de la Transition tant que cet organe unique de gestion n’est pas mis en place, garantissant, en tout point de vue, la transparence et la crédibilité des futures échéances politiques. Il est donc clair qu’entre les deux bords, il y a hiatus. Une cacophonie qui est synonyme de rupture d’approche entre les deux camps.

L’autre facteur de tension : le manque d’inclusivité de la Transition. Sous ce vocable, les partis politiques, une grande proportion des acteurs de la société civile,  dénoncent le fait qu’ils sont, en tant qu’acteurs nationaux privilégies, totalement exclus des initiatives de la transition, laquelle leur est littéralement fermée.

On voit alors mal comment le processus des réformes, qui a certainement accusé un retard fou, peut véritablement prendre corps, dans le laps de temps pour la Transition, sans l’implication réelle et pleine de ces acteurs nationaux. De plus en plus, tel un cri du cœur, les différents acteurs nationaux, s’estimant exclus de la marche de la Transition, élèvent la voix, en exigeant une plus grande ouverture politique.

Pendant ce temps, en dépit d’un ciel assez brumeux autour de la Transition, le temps, qui n’est plus l’allié de cette transition, file à grands pas et ne laisse apparemment qu’une marge de manœuvre aussi réduite que compromise pour la transition de conduire tranquillement le processus en cours.

C’est donc pour tous ces écueils, prévisibles sur le terrain, sur lesquels la Transition a montré très peu d’efficacité pour les régler, au plus vite, qu’aujourd’hui, à moins d’un an sonné de la fin de la Transition, beaucoup de nos citoyens estiment que le challenge sur le respect du délai requis, sur lequel la crédibilité de cette période transitoire se mesurera, est d’ores et déjà compromis, devenant du coup un pari difficile à gagner.

Sauf à être plus inventives et plus entreprenantes, en initiant des mesures rigoureuses et radicales, allant dans le sens de la refondation du pays ; et cela, en alliant ouverture politique et performance intrinsèque, les autorités de la transition, pendant le laps de temps qui leur est compté, auront du mal à respecter l’échéance prévue des 18 mois.

Oumar KONATE

Source: La Preuve