Passation de marchés de gré à gré, achats sans bons de commande, paiements de frais de missions sans ordres de mission… Autant de dysfonctionnements qui, selon le rapport du Vérificateur général, ont fait perdre à l’Assemblée Permanente des Chambres d’agriculture du Mali (APCAM) plus de 200 millions CFA. Sans justificatifs. Ou presque.

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Créée par la loi n° 93 du 04 août 1993, sous le statut d’Etablissement Public à caractère professionnel, l’APCAM a pour but de promouvoir une activité agricole durable, moderne et compétitive. Elle vise à garantir la souveraineté alimentaire du Mali ; mais aussi, à faire de l’agriculture le moteur de l’économie nationale, tout en assurant le bien-être des populations.

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Elle reçoit, pour ce faire, d’importantes subventions de l’Etat. De janvier 2011 à mars 2015, l’APCAM a bénéficié de 802,43 millions CFA. Des fonds, hélas, mal gérés. Près de 150 millions ont, ainsi, disparu des caisses. Sans justificatifs. Du moins, si l’on en croit le dernier rapport du Vérificateur général.

« L’agent comptable n’a pas émis de bons de commandes pour des achats d’un montant total de 7,13 millions CFA. Or, la réglementation en vigueur précise que les achats d’un montant inférieur à 500.000 CFA font l’objet de bons de commande, conformément aux règles de la comptabilité publique », précise d’entrée de jeu le rapport du Vérificateur général.Pour le Vérificateur général, le président de l’APCAM, Mr Bakary Togola, n’a pas conclu de contrat simplifié pour l’achat de biens ou prestations de service, dont le montant par acquisition atteint le seuil à partir duquel l’établissement d’un tel contrat est exigé. Et d’ajouter : « Le montant total de ces dépenses est de 32,80 millions CFA. Cette situation a eu pour conséquence la non-perception, par l’administration fiscale, des droits d’enregistrements ».
Près de 104,5 millions CFA payés, sans contrat, à une agence de communication de la place

Autres dysfonctionnements relevés dans la gestion des fonds, alloués par l’Etat, à l’APCAM : le paiement de factures ne comportant pas toutes les mentions obligatoires. Le montant total de ces factures s’élèvent à 36,63 millions CFA.S’y ajoutent des factures payées sans bordereau de livraison estimées à 10,27 millions CFA ; mais aussi, des dépenses d’un montant total de 104,50 millions CFA. Sans passer de marché public, ni d’établir de contrat, en violation du code des marchés publics.Un exemple : deux factures d’une agence de communication de la place, dont nous tairons le nom pour l’instant, de 50 millions CFA et de 9,5 millions CFA ont été payées, sans contrat, dans le cadre de l’organisation du Salon International de l’Agriculture (SIAGRI) en 2012.Aussi, lors du SIAGRI de 2014, l’agent-comptable a payé, à la même agence de communication 45 millions CFA. Sans contrat.Et comme si cela ne suffisait pas, poursuit le rapport du Vérificateur général : « L’agent-comptable a payé 17 opérations de dépenses d’un montant total de 8,90 millions CFA, inéligibles sur les fonds du SIAGRI. Ces dépenses concernent, entre autres, l’entretien trimestriel des locaux de l’APCAM et l’achat d’intrants agricoles ».Pire encore, l’agent-comptable a effectué un paiement de 636,5 millions CFA sur la seule base d’un bon de commande lors du Salon International de l’Agriculture de 2011. « Aucune facture n’a été produite à l’appui de ce paiement, contrairement, aux dispositions de l’arrêté n° 04-1866/MEF-SG du 24 septembre 2004 fixant la nomenclature des pièces justificatives des dépenses de l’Etat ».

40,5 millions CFA
de frais de missions
sans justificatifs

En outre, l’agent-comptable s’est, selon le rapport du Vérificateur général, montré incapable de justifier la somme de 40,5 millions CFA de dépenses de missions à l’extérieur du pays pour participation au Salon International de l’Agriculture. Ces dépenses portent sur l’achat de billets d’avion pour 33 personnes, non soutenues par des ordres de mission.
Sans compter le paiement de deux factures, jugées « irrégulières » pour un montant de 8 millions CFA, lors du Salon International de l’Agriculture de 2015. Selon le rapport du Vérificateur général, « les numéros d’identification des bénéficiaires et les adresses figurant sur ces factures indiquent des mentions différentes de celles des entreprises supposées avoir produit lesdites factures ».Pour le Bureau du Vérificateur général, l’agent-comptable de l’APCAM doit être mis sous main de justice. Afin qu’il s’explique sur la gestion, pour le moins catastrophique, de ces centaines de millions CFA, disparus des caisses de l’APCAM. Sans justificatifs.
Affaire à suivre et à rattraper !

Source: Le Canard Déchaîné