Le rapport individuel du Bureau du vérificateur général (BVG) sur les  opérations de recettes et de dépenses liées au Pèlerinage à la Mecque pour les exercices 2016, 2017 et 2018 vient d’être rendu public.  La mission de vérification, qui a démarré le 29 mars dernier, a permis de constater des irrégularités financières de plus de 639 millions de FCFA. Elle a aussi permis de découvrir  » le laxisme qui entoure la gestion des fonds destinés à l’organisation des campagnes de pèlerinage. Le compte épargne pèlerinage, créé dans le but de recevoir les paiements successifs des frais des pèlerins qui ne peuvent pas payer l’intégralité à la fois, est devenu pour le Ministère et la Maison du Hadj une source de financement de leurs activités dans le mépris total des procédures d’exécution des dépenses et des principes de la comptabilité publique « .

L’objectif de la mission était de s’assurer que les recettes collectées ont été entièrement transférées sur le compte spécial pèlerinage et que les dépenses exécutées l’ont été conformément aux procédures en vigueur et qu’elles sont sincères et régulièrement justifiées. Malheureusement tel n’est pas le cas.

Il ressort du rapport que les frais de pèlerinage payés par les pèlerins servent à leur prise en charge concernant les transports aérien et terrestre, leur hébergement et leur restauration.  Ils sont versés dans le compte spécial pèlerinage. L’Etat intervient essentiellement dans l’encadrement des pèlerins. A cet effet, il alloue des ressources financières pour la prise en charge de la Commission Nationale d’Encadrement (CNE). Pendant la période sous revue, les sommes collectées auprès des pèlerins se sont élevées à 10 072 343 925 FCFA et la part du budget d’Etat pour la prise en charge des membres de la CNE  à 1 486 610 065 FCFA.

Le montant total des irrégularités financières constatées par les vérificateurs s’élève à 639 859 502 FCFA.

Les irrégularités portent notamment sur le fait  les marchés n°0248/DGMP 2016 et n°01883/ DGMP 2018 tous deux relatifs au transport aérien des pèlerins et de leurs bagages de la filière gouvernementale, au titre des années 2016 et 2018 ont fait l’objet d’enregistrement gratis au service des impôts, alors qu’ils ne sont pas exemptés du paiement du droit d’enregistrement.

Le montant des droits d’enregistrement, qui aurait dû être payé aux impôts, s’élève à 46 716 102 FCFA après que le Centre des Impôts de la commune III du district de Bamako ait procédé à un recouvrement des droits d’enregistrement auprès du titulaire du marché n°01883/ DGMP 2018.

La mission a constaté que le Directeur des Finances et du Matériel et le Secrétaire Général du MARC ont indûment payé le chèque n°1051557 au nom de l’Agence Danaya pour un montant de 50 000 000 FCFA retiré sur le compte spécial pèlerinage à la date du 16 octobre 2017. L’émission et le retrait dudit chèque ne sont soutenus par aucune prestation et pièce justificative.

Elle a constaté que les mêmes responsables ont émis le chèque n°0651592 d’un montant de 130 000 000 FCFA au nom de l’Agence AMASER/EGYPTAIR au titre des frais de transport des pèlerins. Le montant dudit chèque a été prélevé sur le compte BIM n°025128108201 dans lequel le trésorier payeur a viré l’appui financier exceptionnel. Cette prestation relative au transport des pèlerins, qui constitue une opération du compte spécial pèlerinage, n’est pas éligible à ce fonds.

Un surplus de frais de plus de 13 millions de FCFA de frais de mission

Elle a constaté que le régisseur spécial a payé des indemnités de mission non justifiées aux membres de la CNE. En effet, suivant l’ordre de mission n°3076-SGG-RM du 24 aout 2016, sur une prévision de 50 jours, les missionnaires n’ont effectué que 20 jours. Cependant, le Régisseur spécial leur a payé la totalité des indemnités de 50 jours. Ainsi, il en résulte un reliquat d’indemnités de 30 jours non reversé et non justifié, représentant 13 500 000 FCFA.

Il a été aussi constaté que des chèques ont irrégulièrement été émis pour des retraits non justifiés pour un montant total de 225 000 000 FCFA.

Dans le cadre du pèlerinage 2017, le Trésor public a mis à la disposition du MARC un montant de 354 810 045 FCFA suivant mandat n°287 du 03 juillet 2017, pour la prise en charge des membres de la Commission Nationale d’Encadrement. Ledit appui, qui devrait être exécuté par le régisseur spécial, a fait l’objet d’un virement sur le compte BIM et d’émission de chèques n°651590 du 18/07/2017 d’un montant de 200 000 000 FCFA, n°651591 du 07/08/2017 de 16 000 000 FCFA et n°651593 du 03/11/2017 de 9 000 000 FCFA au nom du Régisseur d’avances ordinaire. Sur le montant total viré, une partie n’a pas été justifiée. En effet, le Régisseur s’est servi de la facture n°1406 d’un montant de 101 231 000 FCFA représentant le paiement de la première tranche du contrat de restauration des pèlerins à la Mecque à travers le transfert par swift n°10 à la date du 10 juillet 2017, pour également justifier une partie des chèques émis en son nom. Ainsi, le Régisseur a doublement utilisé le même justificatif pour des dépenses séparées.

Des faits portés à la connaissance de la justice

En somme, le BVG a procédé à la transmission et à la dénonciation de faits au président de la section des comptes de la Cour suprême et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de la commune III chargé du Pôle économique et financier les faits suivants :

– enregistrement irrégulier gratis au profit des titulaires de marchés pour un montant de 46 716 102 FCFA ;

– non-paiement du droit d’enregistrement pour un montant de 19 571 141 FCFA ;

– non- paiement de la redevance de régulation pour un montant de 12 465 710 FCFA ;

– paiement indu à une agence de voyage pour un montant de 50 000 000 FCFA ;

–  l’octroi d’indemnités indues au personnel du consulat pour un montant de 7 651 814 FCFA ;

–  paiement d’Indemnités de mission non justifiées pour un montant de 13 500 000 FCFA ;

– double utilisation de mêmes pièces pour justifier deux dépenses pour un montant de 4 275 000 FCFA ;

– dépenses irrégulières effectuées par l’Agent comptable de la MAD sur le fonds épargne pèlerinage pour un montant de 130 679 737 FCFA ;

– émission irrégulière de chèques au nom du régisseur d’avances ordinaires pour des retraits non justifiés sur le compte BIM pour un montant de 225 000 000 FCFA ;

– dépenses inéligibles effectuées sur le compte BIM pour un montant de 130 000 000 FCFA.

Synthèse de YC

Source: l’Indépendant