En Guinée-Conakry et en Côte d’Ivoire, les dernières élections présidentielles ont fragilisé l’équilibre social. Au Burkina-Faso, les électeurs s’apprêtent à voter ce dimanche, 22 novembre 2020 à la présidentielle. Au Mali, l’opération Bourrasque (FAMa, Barkhane, FAN…) porte des coups sérieux aux narcoterroristes avec la mort de Ba Ag Moussa, un des lieutenants d’Iyad Ag Ghaly du “GSIM”. Au même moment, pour ancrer son pouvoir dans la Sous-Région, le président de la transition, Bah N’Daw, fait la tournée de quelques chefs d’Etat ouest africains dont le Ghanéen Nana Akufo-Addo, président en exercice de la Cédéao. En Europe, la France, l’Allemagne, etc., sont de nouveau sous cloche pour limiter la diffusion du coronavirus. Les crises sont partout et s’accumulent. Mais où allons-nous ?

 

Un seuil de tolérance à l’égard de Bah N’Daw

 “…Et si je dois donner ma vie pour que la transition soit menée à bon port, je n’hésiterai pas une seconde. Je suis prêt au sacrifice, prêt au sacrifice suprême pour que le Mali redevienne le Mali de nos rêves et de nos potentialités. Ma plus grande satisfaction résidera dans la passation de témoin au futur président de la République élu, élu proprement et élu indiscutablement…”, extrait du discours d’investiture du président de la transition, Bah N’Daw, le 25 septembre 2020.

Les propos de Bah N’Daw très explicites sur sa volonté de conduire à “bon port” la transition et d’avoir des élections transparentes ne font aucun doute. C’est ce que les Maliens veulent entendre et voir se réaliser : organiser des élections honnêtes. Cela explique en partie leur seuil de tolérance à l’égard du président de la transition. L’élimination de plusieurs narcoterroristes de l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS) et du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM) serait de nature à redorer le blason de Barkhane dans le Sahel. Mais cette dynamique sécuritaire porterait des coups sérieux aux perspectives de négociations de l’exécutif Malien avec Iyad Ag Ghaly et Amadou Kouffa du GSIM.

 

Déjouer le piège des crises postélectorales

Ailleurs, en Côte d’Ivoire comme en Guinée-Conakry, les tensions postélectorales ne favorisent pas un sentiment de tolérance des populations à l’égard de la classe dirigeante. Or, la stabilité de la Côte d’Ivoire et de la Guinée-Conakry peuvent éviter d’ajouter des tensions socio-économiques à la tension sécuritaire que connaissent déjà le Mali, le Niger et le Burkina-Faso. Le pays des Hommes intègres, le Burkina-Faso, confronté aux mêmes défis sécuritaires que le Mali, a tout intérêt à protéger le fil de la stabilité politique. Dans la région, le Burkina-Faso reste le dernier rempart contre les crises politiques aiguës depuis 2014. La capacité des différents camps politiques Burkinabés à déjouer le piège des crises postélectorales sera un marqueur indélébile pour l’ancrage démocratique dans le Sahel.

 

La course au vaccin accentue les jeux d’intérêts

Sur un tout autre plan, l’exécutif français fait face à la pression des religieux, des commerçants pour demander la réouverture des lieux de culte et des commerces, dits non essentiels. Par exemple, partout en France le weekend dernier, des croyants ont manifesté pour exiger le retour des cérémonies cultuelles, interdites à cause du Coronavirus. L’exécutif cède et promet la réouverture des lieux de cultes (chrétien, musulman, juif…) en décembre prochain, en fonction de l’évolution de la situation sanitaire. Le gouvernement du Premier ministre, Jean Castex, ne souhaite pas gérer une fronde religieuse au moment où le documentaire Hold-Up (2020) suscite des interrogations chez les Français à propos de la gestion de la crise sanitaire par l’exécutif.

Les crises sanitaires, sécuritaires et politiques secouent la planète. Elles mettent à mal l’ingéniosité des dirigeants pour garder le cap du bateau de la République. Le contexte actuel est aussi celui de la course au vaccin qui accentue les jeux d’intérêts géopolitiques des Etats et qui soulève de vraies questions :

Comment l’humanité peut-elle avoir accès au futur vaccin contre la Covid-19 de façon égalitaire ? Que ferons-nous pour résoudre les crises qui nous hantent depuis des décennies ?

Mais faisons le pari que l’humanité répondra à ces questions parce qu’elle rêve de changer le monde et de savoir où elle va.

 

Mohamed AMARA Sociologue

Source : Mali Tribune