Depuis son accession à la démocratie dans les années 90, le Mali a opté pour le multipartisme, en remplacement du parti unique institutionnel et constitutionnel : Union Démocratique du Peuple Malien (UDPM). Ce parti, tirant sa légitimité dans la constitution du 2 juin 1974, il a été créé par le Général Moussa TRAORE le 30 mars 1976, alors Président de la République. De nos jours, le Mali est l’un des pays de l’Afrique de l’ouest comptant le plus de formations politiques, environ 202 partis politiques. De surcroît, les postes électifs deviennent de plus en plus un rempart contre le chômage et une porte pour bénéficier d’un nombre de privilèges et immunités. Cette sphère est donc vraisemblablement en train d’être envahie par une masse de personnes ignorant le sens, les principes de la redevabilité d’un élu et les valeurs du leadership managérial des gouvernants à l’égard des gouvernés.

Avec la convocation du collège électoral et de la fixation des périodes des campagnes électorales par le DECRET N°2020-0010/P-RM DU 22 JANVIER 2020, l’on a assisté à la réception de plus de 1000 candidatures par la Cour Constitutionnelle. Or, il n’y a que 147 sièges à pourvoir à l’assemblée nationale. Il faut noter que les candidatures reçues sur l’ensemble du territoire sont majoritairement celles des jeunes, ce qui paraît être très salutaire. Mais au Mali, il est rare de voir un employé démissionner de la fonction publique ou du privé pour se consacrer au développement de sa localité et de ses populations afin de servir leurs intérêts. Dans la plupart des cas, les candidats ne s’engagent pas par conviction et beaucoup d’entre eux manquent vrais semblablement à leur actif le moindre engagement citoyen, civique et ou bénévole en faveur de la communauté pour laquelle ils prétendent vouloir défendre les intérêts à travers le post électif. Ou pire, certains ne sont pas vraiment résidants des circonscriptions pour le compte desquelles ils se présentent, vu qu’ils peuvent faire des années sans y faire un tour. Et ils ont tendance à se présenter pour les postes électifs non seulement pour améliorer leurs situations économiques au regard du chômage et de la pauvreté de masse qui prévaut dans le pays. Mais aussi pour tirer profit des avantages et immunités accordés aux personnalités politiques avant de penser au bien-être et au développement de leurs électorats. Ceux d’entre eux qui n’arrivent pas à se faire élire restent éternellement présidents des partis politiques qu’ils ont eux-mêmes crée ou en créent d’autres pour continuer le même circuit. Il suffit de voir le fossé qui se trouve entre élus et électorat après les élections pour justifier de cet état de fait. Rare sont les sessions de restitution entre députés et citoyens. Les sessions des conseils communaux desquelles les communautés sont informées ou assistent, sont quasi inexistantes.

De telles situations, dans toute démocratie, sont une menace pour le champ politique. A cela s’ajoute la question de la transparence et la légalité quant à la mobilisation des fonds aux fins des financements des campagnes politiques. En effet faisant allusion au contexte du pays, nul risque n’est à prendre pour ce qui est d’un quelconque financement (peu recommandé) ou provenant d’un « argent mal acquis » ou encore d’un enrichissement illicite. Pour cela, il serait judicieux que les acteurs de ce secteur soient soutenus et accompagnés dans l’application stricte des dispositions déjà prises en ce sens pour le suivi des campagnes électorales.

Le Mali regorge d’une élite capable de faire opérer son émergence et son développement aussi bien au sein de la classe politique que dans la classe apolitique. Et si on se demande pourquoi ce n’est pas cette élite qui est aux affaires, et pourquoi le Mali n’avance presque pas, c’est sûrement parce que cette dite élite est rarement élue ou ne se fait pas élire en grand nombre pour pouvoir changer la donne.  Il faut aussi savoir que lors des élections, rare sont les maliens qui votent pour des candidats parce qu’ils ont proposé un bon projet de gestion de la cité. Ce qui veut dire que les voix vont souvent à l’endroit de ceux ou celles qui, une fois élus, seront utiles à certains électeurs proches de leur camp, à décrocher un emploi, un marché public, ou tout autre avantage. Si nous analysons alors le contexte malien, le plus grand nombre de votants sont en milieu rural, surtout les femmes. Et celles-ci sont très souvent non instruites. En milieu rurale, les populations votent soit par affinité soit par consignes des chefs de familles, de village ou du canton ou pire par « achat des voix » à travers quelques billets de banque ou des promesses non tenables. Tandis qu’en milieu urbain, il y a moins de votants et ceux­­-ci, de leur côté, votent souvent en comptant sur un poste nominatif ou pour profiter des avantages des candidats qu’ils avaient alors soutenus.

 

Mahamadou A TRAORE