A l’occasion de l’investiture du président Ibrahim Boubacar Kéita, le 19 septembre prochain, le souverain chérifien effectuera une visite d’amitié à Bamako. Ce déplacement va-t-il améliorer les relations diplomatiques entre le Mali et le Maroc, deux pays en froid depuis des décennies par rapport à la question sahraouie 

Roi Mohamed VI

Roi Mohamed VI

Le roi du Maroc, Mohamed VI, s’apprête à effectuer un voyage au Mali, à l’occasion de l’investiture du président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Kéita, élu le 11 août dernier. Le monarque chérifien répond ainsi à une invitation du nouveau chef de l’Etat malien. Mais surtout, ce déplacement pourrait marquer la reprise d’une diplomatie plus active, d’une coopération plus accrue entre le Mali et le Maroc, deux pays qui sont en froid depuis le début de la décennie 1970, quand le premier a apporté sa reconnaissance au Front Polisario qui voulait se défaire du joug marocain

Depuis, les relations entre les deux pays, sans s’empirer, ne se sont jamais véritablement améliorées. Surtout que le grand voisin du nord du Mali, l’Algérie, veillait à cela, comptant jouer un rôle de leadership dans le Sahel.

Successivement, les présidents Alpha Oumar Konaré et Amadou Toumani Touré se sont laissés entrainer dans cette situation, forcés de prendre position dans une guerre que se livraient à distance l’Algérie et le Maroc, la première ayant pris fait et cause pour une reconnaissance internationale de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) contre le royaume chérifien qui ne voulait pas de l’indépendance de « sa » province. Il faut reconnaitre que toute la politique malienne est allée dans le sens d’une attirance envers l’Algérie, avec laquelle nous partageons des milliers de kilomètres, plutôt que vers le Maroc, géographiquement plus éloigné

Le froid a donc persisté pendant toutes ces décennies entre notre pays et le Maroc. Malgré les tentatives de rapprochement initiées par des associations de la société civile comme l’Amama, malgré aussi une forte présence de Maliens, notamment originaires de la région de Tombouctou, au Maroc, principalement dans le sud marocain. Et, en effet, depuis des siècles des ressortissants de la région de Tombouctou ont tissé des liens séculiers entre eux et des Marocains, liens renforcés par le commerce et les échanges transsahariens.

C’est donc un grand coup diplomatique qu’Ibrahim Boubacar Kéita est en passe de réussir en amenant à Bamako un souverain chérifien. Et surtout en lui permettant de s’adresser directement au peuple malien.

Ce coup diplomatique est d’autant plus important que c’est la première fois, depuis son couronnement le 30 juillet 1999, que le roi du Maroc Mohamed VI assiste à l’investiture d’un chef d’Etat africain. Et cerise sur le gâteau, le Roi Mohamed VI est l’invité d’honneur de la cérémonie d’investiture du Président de la République, IBK.

Ce coup est aussi important parce qu’il montre l’échec d’une diplomatie nationale excessivement tournée vers l’Algérie, d’une politique prônée par certains responsables politiques comme TiébiléDramé et SoumeylouBoubèyeMaïga connus pour être très proches du voisin algérien, et qui ont tous été à un moment donné les patrons de la diplomatie malienne. Est-ce la fin d’une époque ? Quelle sera la réaction des autorités algériennes, elles qui répugnent même à s’asseoir sur la même table que les Marocains même lorsqu’il s’agit d’organiser une conférence internationale sur la paix, la sécurité et le développement dans la bande sahélo saharienne dont elles seraient le seul et l’unique maître ? La diplomatie malienne va-telle prendre maintenant le même chemin que la coopération qui, elle, n’a jamais vraiment été altérée ?

 

Le temps nous le dira, mais surtout, tout dépendra des retombées politiques que les autorités maliennes vont tirer de la visite d’un monarque marocain au Mali, de ce que le roi M6 va dire dans son discours que tout le monde attend avec impatience

Cheick TANDINA