Au-delà du renouvellement des 147 sièges de l’Assemblée nationale, dont le mandat a été maintes fois reconduit par le gouvernement, pour un nouveau contrat de 5 ans (2025), les législatives de mars-avril 2020 s’annoncent comme la guerre pour la survie politique de certains vieux politiciens. Pire, elles présagent des empoignades de belle facture entre la majorité présidentielle qui se battra pour son maintien au pouvoir et l’opposition pour qui l’heure de l’alternance a bien sonné, -et certains acteurs de la société civile, notamment les religieux,  qui ne font plus mystère de leur volonté à se lancer dans la course pour la députation. Ces scrutins seront décisifs dans la succession du président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, dont le mandat prend fin en 2023.

Décryptage !

L’échiquier politique malien est en pleine recomposition. En effet, après deux reports pour des raisons politiques et sécuritaires, selon les autorités, le renouvellement des 147 sièges de l’Assemblée nationale du Mali est prévu pour le 29 mars pour le premier et le 19 avril prochain sur toute l’étendue du territoire national. D’abord en raison du contexte sécuritaire, il ne fait l’ombre d’aucun doute que les scrutins ne pourront pas se tenir dans les zones abandonnées par l’administration malienne, sous contrôle des terroristes.

Ensuite, si certains partis iront en solo (liste propre) dans certaines circonscriptions; dans d’autres, il n’est pas exclu de voir des alliances, parfois contre nature. Par exemple à Kolondiéba, apprend-on, le  candidat du Rassemblement pour le Mali (RPM), Sidiki N’Fa KONATE, ancien DG de l’ORTM, aurait pour allié Daouda Moussa KONE, candidat de l’Union pour la République et la Démocratique (URD), le parti de Soumaila CISSE, chef de file de l’opposition.

Aussi, des empoignades de belle facture sont attendues un peu partout à travers le pays. Mais déjà la Commune IV du District de Bamako va focaliser les attentions avec les candidatures de Moussa MARA, l’ancien Premier ministre, président du parti YELEMA ( le changement en bambara), le chroniqueur,  Mohamed Youssouf Bathily alias Ras Bath, le député sortant RPM Moussa DIARRA qui va en indépendant ; la liste RPM-ADEMA ; Mahamane Mariko, ancien leader, non moins président du parti de la Convention des réformateurs pour l’alternance et la justice (CRAJ- Faso Nyeta), etc.

Par ailleurs, la constitution des listes de candidats est un moment de forte turbulence au sein des partis. Certains frustrés n’hésitent pas à se porter candidat ou soutenir des candidats autres que ceux de leurs formations politiques. Ainsi, les rivalités s’intensifient au jour le jour. A cette grogne interne des partis politiques, s’ajoutent les réformes du système politique avec l’adoption d’une nouvelle Charte des partis.

Selon l’analyste politique Balan DIAKITE, bien qu’une exigence de la démocratie, les élections législatives au Mali devront se tenir dans un contexte marqué par l’entrée en liste d’un nouvel acteur sur la scène politique, à savoir : les religieux.  Aussi, prévient-il, sur l’impact juridique et institutionnel que ce mouvement pourrait avoir sur le processus :

« La particularité de ces élections est le nouvel acteur, notamment les associations islamiques. Parce qu’actuellement, les religieux ont acquis une place prépondérante dans la vie politique du Mali avec la création du Mouvement politique mis en place pour soutenir les idéaux politiques de l’Iman Mahmoud DICKO ». Même si, apprend-on, l’iman Mahmoud DICKO, a demandé à ses adeptes de surseoir leur participation aux présentes législatives.

Quant à Abdoul Salam TOGOLA, président de l’Association pour la protection de la démocratie au Mali, la tenue des législatives est une occasion pour les plus hautes autorités de reconquérir la confiance du peuple à l’égard du parlement : « Nous pensons que les élections sont aujourd’hui un besoin. Nous pensons qu’il y a lieu pour le gouvernement de prendre des mesures pour renouveler la confiance du peuple à l’égard du parlement. Cette équipe au parlement a déjà fini son mandat et nous pensons que c’est l’occasion pour le peuple de renouveler sa confiance envers ses représentants ».

 

Toutefois, le président de l’APDM se dit inquiet : «notre inquiétude est à deux niveaux : aujourd’hui, la difficulté du pays se situe aux plans économique et sécuritaires. Et l’on se demande si, avec toutes ces difficultés, le pays est à mesure d’organiser des élections. Car les élections demandent d’énormes engagements financiers. Face à cette difficulté de trésorerie, nous sommes dans la logique de nous demander si le pays pourrait soutenir ces dépenses. »

Par ailleurs, alerte M TOGOLA, « nous souhaitons vivement la tenue de ce rendez-vous électoral, mais il faudrait prendre des mesures afin d’anticiper une crise qui amplifierait celle déjà en place. Il y a aussi la crise sécuritaire qui ne laisse personne indifférent. Pour la bonne organisation des élections sur toute l’étendue du territoire, il faudrait d’abord instaurer la confiance du point de vue sécuritaire dans toutes les zones de conflits. »

Même si jusque-là, une bonne partie de l’opposition émet des réservations quant à la sécurisation du processus électoral ainsi que la fiabilité du fichier électoral et le problème des procurations, le gouvernement rassure que les mesures sont en cours pour permettre la réussite de ces échéances.

 

Sékou CAMARA

Source: Bamakonews