Député sortant élu en Commune II et candidat aux législatives dans cette même circonscription, Hadi Niangadou ne décolère pas contre l’ancien ministre de la justice, Mohamed Ali Bathily. Au détour de la confirmation d’une décision de justice exécutée en sa faveur à hauteur de plusieurs milliards, l’opérateur immobilier – non moins président et fondateur du parti MPM – est tombé à bras raccourci sur celui qu’il soupçonne d’avoir engagé le gouvernement dans la procédure de haute trahison contre ATT par simple esprit de vengeance. Et dont l’adversité acharnée a déteint sur l’ensemble des députés, par-delà les ennuis infligés à la personne de Hadi Niangadou.

Le Témoin : Confirmez-vous, Honorable député, que le litige en rapport avec votre expropriation foncière à Gouana a définitivement atteint son épilogue ?

Hadi Niangadou : Oui, je confirme que c’est terminé. La justice avait condamné l’Etat en ma faveur depuis 2013 à me payer plus de 10 milliards trois cent millions francs CFA. La condamnation est désormais exécutée. Je ne dispose certes pas pour l’instant de la totalité du montant, mais dès lors que l’Etat en a accordé le principe, je considère que c’est un acquis.

  • L’Etat n’avait donc pas consenti à s’exécuter malgré la condamnation ?

Je considère qu’auparavant l’Etat n’avait pas accepté parce qu’aucun compromis de paiement n’avait été ouvert avec moi, depuis ATT jusqu’à IBK en passant par Dioncounda Traoré.

 Mais votre nom est également associé à un litige similaire à N’Tabakoro où un bras-de-fer vous a même opposé au ministre Bathily

Effectivement, il y a eu un bras-de-fer avec le ministre Bathily en son temps à N’Tabakoro où nous sommes propriétaires d’un domaine en compensation d’une autre expropriation à Toubana. Ledit bras-de-fer a un rapport, j’en suis sûr, avec le rejet par les parlementaires de la procédure de poursuite du président ATT pour haute trahison.

  • Pouvez-vous être plus explicite ?

La procédure était portée devant l’Assemblée nationale par Mohamed Ali Bathily. En tant que députés, nous nous sommes opposés à l’initiative du ministre de la Justice qu’il était à l’époque parce que nous avions estimé que le dossier était totalement vide et qu’il avait plus l’air d’une dénonciation que d’une accusation. Il nous a paru bizarre et intrigant qu’un homme de droit aussi avisé que Mohamed Ali Bathily mélange les pédales à ce point – mais nous avons vite compris que nous lui avons refusé quelque chose auquel il tenait tant. Je me rappelle avoir eu personnellement des chaudes discussions avec lui sur le sujet, en ignorant toutefois qu’il y avait un problème personnel entre lui et l’ancien président. C’est plus tard que j’en ai été édifié à travers son acharnement.

  • Et c’est un contentieux de quelle nature, selon vous, qu’il entretenait avec ATT ?

Je ne sais pas, je ne lui ai pas demandé à propos. Mais je l’ai compris par son insistance sur un dossier dont l’inconsistance lui avait été démontrée par toutes les preuves. Il n’avait aucun argument solide pour démontrer le contraire en dehors des insultes qu’il proférait a notre endroit. Nous avions compris qu’il y avait un problème qu’on a toutefois minimisé. On s’est contentés tout simplement de ne pas retenir de charges contre l’ancien président ATT, mais il a réagi en s’attaquant à ma personne dans la presse parce que j’étais particulièrement au devant du combat contre l’inculpation de l’ancien président pour haute trahison. Je n’avais jusque-là pas encore fait le rapport puisqu’il ne me paraissait pas imaginable qu’un responsable de cette envergure puisse lier un dossier aussi important avec ses problèmes personnels. Pour moi, un ministre ne pouvait pas profiter d’un dossier pour aller dans un autre.

  • Quand est-ce que vous l’avez compris ?

C’est lorsque le président IBK a envoyé un avion pour faire rapatrier ATT. La réaction du ministre Bathily a été d’enfiler aussitôt le manteau d’opposant pour s’en prendre à coups d’insultes à la personne du président de la République en exercice, alors qu’à peine un mois auparavant il était sur les réseaux sociaux pour remercier le même IBK pour leurs quatre années de collaboration. Nous avons ainsi réalisé qu’ATT était au cœur de toutes ses agitations. Or ATT est de retour et personne ne pouvait rien contre. Ni lui, ni personne d’autre. S’il a un problème personnel à solder, il lui était loisible de le résoudre au lieu de sortir tous les jours pour s’attaquer aux députés en profitant de ma personne en tant que promoteur immobilier. Il aurait pu parler uniquement de Hadi mais s’il en a toujours profité pour y associer l’ensemble des députés, tout simplement parce qu’ils ont refusé d’inculper ATT avec qui il a des problèmes personnels.

  • Vous estimez en définitive que vos ennuis à N’Tabacoro découlaient des problèmes personnels entre Bathily et ATT ?

Sinon, il y’a rien d’autre car tout était clair dans le dossier. Et j’estime que n’importe quel avocat ou ministre de la République digne de ce nom aurait usé de la possibilité qui s’offre à lui pour s’opposer à la décision des députés en prenant l’opinion et le peuple à témoin par des arguments plus solides. Au lieu de quoi, lui Bathily s’en prenait aux députés parce qu’il était à court d’arguments, sachant pertinemment que le dossier n’était pas défendable. Il ne pouvait donc s’acharner à le défendre devant l’Assemblée nationale que par méchanceté gratuite. Et, en l’absence de tout élément au soutien de la poursuite qu’il réclamait, je suis donc en droit d’en déduire que c’était de la malhonnêteté de sa part. Au contraire des députés qui se sont montrés plus républicains et sérieux dans la suite qu’ils ont donnée au dossier. Un ministre sérieux, tel qu’on en voit d’habitude aux États-Unis, en France et ailleurs dans toutes les démocraties, s’en remettrait tout simplement à l’issue parlementaire et à la volonté des représentants du peuple ou les aurait peut-être défiés sur le terrain de l’argumentation publique. Bathily, quant à lui, tout juriste qu’il est, a préféré les insultes au débat tout simplement parce que c’est un menteur. Il a menti dans le dossier d’ATT.

  • Peut-on dire à présent que tout est rentré dans l’ordre pour vous à N’Tabacoro ?

Au fait, tout était rentré dans l’ordre depuis qu’il était au gouvernement. Ce n’est pas faute d’avoir tenté par tous les moyens mais il n’y pouvait rien. Il a attaqué au tribunal il a perdu, il a attaqué partout il a perdu parce qu’il n’y avait rien de consistant dans toutes ces attaques. Mais ce n’était pas une question de N’Tabacoro, c’est à Amamdou Toumani Touré qu’il en voulait. C’est d’ailleurs pourquoi il s’est présenté à l’élection présidentielle et s’en est sorti bredouille. A sa place j’allais me résigner à présenter des excuses à ATT parce que lui au moins s’est présenté et devenu président de la République. Mais s’il continue à parler après tout c’est qu’il n’a plus de dignité.

 

Propos recueillis par A KEÏTA

 

Source: Le Témoin