Ancien Premier ministre du Mali, Moussa Mara était l’invité surprise des XIes Rencontres internationales des PPP qui viennent de se tenir les 21 et 22 mars à Paris, au Pavillon Dauphine. Candidat à la présidentielle du 29 juillet prochain, où il espère bien succéder au président sortant Ibrahim Boubacar Keita, il a insisté à Paris sur la lutte contre la corruption et la nécessité d’« une gouvernance vertueuse » pour rétablir la confiance et améliorer le climat des affaires.

« Toutes les contrées du monde ont leur stratégie en matière de PPP, mais il est souhaitable qu’en Afrique nous ayons aussi nos propres stratégies. Il ne faut pas se contenter de voir ce que les Chinois, les Français ou les Allemands veulent faire. Il faut voir d’abord ce dont nous avons besoin, ce qui est le plus utile pour nous et, en fonction de cela, établir des partenariats sur ces bases ».
Moussa Mara, qui improvise avec talent puisque son intervention n’était pas initialement prévue, pose d’emblée les termes du débat. Des Partenariats Public Privé, c’est très bien, à condition qu’ils profitent à la relance de l’économie malienne, car c’est l’intérêt national qui le préoccupe en priorité.

« Le Continent a régulièrement plutôt pour habitude de recevoir les idées de l’extérieur et ces idées ne sont pas toutes les plus pertinentes pour son développement, précise-t-il. C’est pourquoi j’insiste beaucoup sur les capacités nationales, aussi bien en termes de planification, d’organisation et de négociation afin que tous ces partenariats se négocient au mieux des intérêts de nos pays et du Continent ».

« La plupart des PPP s’établissent plutôt au niveau national, observe-t-il, mais l’on ne parle pas suffisamment des collectivités locales et du niveau supranational, ce sont deux pistes importantes sur lesquelles s’engager pour essayer de mettre en place des initiatives nouvelles de partenariat. Des infrastructures supranationales peuvent ainsi parfaitement être envisagées, d’autant que nous disposons déjà en Afrique d’organisations régionales, comme l’UEMOA ou encore la CEDEAO. Ce sont deux axes qui permettraient aussi de contourner un peu les injonctions ou vétos du FMI. »

« On peut difficilement imaginer le développement
du pays en dehors de la diaspora »
Et l’ancien Premier ministre d’IBK, qui prône désormais un changement de génération et une troisième voie entre la majorité et l’opposition – « elles mènent un combat de circonstance mais sont en réalité bien souvent d’accord pour éluder les questions de fond » – d’insister sur la nécessité de rétablir au plus vite une « bonne gouvernance » au Mali, indispensable à un meilleur climat des affaires et à la reprise économique.

« Tout ce dont nous parlons aujourd’hui ne peut être possible que si l’on a au niveau national une gouvernance responsable et vertueuse, qui puisse inspirer la confiance. Vous aurez beau disposer des meilleurs réseaux du monde, si votre gouvernance n’inspire pas la confiance, vous n’arriverez jamais à faire venir les gens. Il faut que, sur le Continent, les questions de leadership, de gouvernance, de corruption et de fonctionnement étatique, de lourdeur administrative… soient toutes valablement adressées et traitées afin que nous puissions attirer des partenariats et que les initiatives s’épanouissent. »

Une vue de la salle des participants aux XIes Rencontres Internationales des Partenariats Publics Privés (Paris, 21-22 mars 2018). © AM/AfricaPresse.Paris

Moussa Mara met également l’accent sur l’importance de la diaspora malienne « qui représente environ un quart de la population du territoire national » et constitue donc un potentiel important « en termes d’investissement, d’épargne, d’apport intellectuel ou d’idées de développement » du Mali.
« On peut difficilement imaginer le développement du pays en dehors d’un quart de la population », observe l’ancien chef du gouvernement, soulignant que « la politique nationale d’émigration adoptée l’an dernier, mais qui n’est pas suffisamment mise en œuvre, contient justement un volet d’encouragement au retour des Maliens de l’extérieur pour plusieurs motifs, à commencer pour des raisons d’investissement et de développement. »

« Les premiers arrivés seront les mieux lotis »
Les Maliens sont d’ailleurs venus en force à ces XIes Rencontres Internationales des PPP pour convaincre les investisseurs de revenir et de s’engager dans leur pays. Coordinateur de l’Unité PPP à la Primature, Issa Diallo salue ainsi le lancement du Club G5 Sahel PPP, auquel « il faut maintenant donner un contenu et des moyens financiers », et souligne « la pertinence de la fédération des efforts de nos cinq pays ». Avec un appel direct à la France « qui a suffisamment de moyens » pour financer la première rencontre de ce nouveau Club PPP. « Nous avons pris le train en marche, explique-t-il, mais cela est devenu une charge supplémentaire pour des États comme les nôtres qui, affectés par le terrorisme, sont déjà dans de grandes difficultés. »

Nouveau Directeur général adjoint de l’Agence pour la Promotion des Investissements (API Mali), Smaïla Camara fait quant à lui le « job » en énumérant la longue liste des atouts du Mali, premier producteur de coton et troisième producteur d’or en Afrique.
Ce pays enclavé, mais qui dispose de deux grands fleuves (le Niger et le Sénégal) « avec d’énormes potentialités hydrauliques », reste bien sûr ouvert à bien d’autres projets en PPP comme la prochaine construction d’un quatrième pont (qui sera à péage) à Bamako, afin de tenter de désengorger la capitale dont toute l’activité est quotidiennement ralentie par d’énormes bouchons. Non sans rappeler en guise de conclusion la règle d’or que connaissent tous les investisseurs : « Les premiers arrivés seront les premiers servis et les mieux lotis ». Qu’on se le dise !

Source: africapresse