Le monde entier est témoin et déplore la mauvaise  gouvernance  qui  sévit dans notre  pays depuis trois décennies. Parmi tous les pouvoirs qui se sont  succédés, l’actuel régime est champion, toutes catégories, de tous les faits caractéristiques de mauvaise gouvernance. Les détournements, la corruption à ciel ouvert, le vol électoral, l’impunité, les injustices sociales ont connu un essor sans précédent depuis 2013. A cela s’ajoutent,  les morts inexpliqués de manifestants venus réclamer un peu de dignité. Que les défunts reposent en paix!

Le peuple, à  l’agonie, pleure ses martyrs et prie pour un changement radical de ses conditions de vies. Les partis politiques, dans une cacophonie générale, tentent de récupérer les revendications sociales pour forcer un changement de régime. Les mesures envisagées à cette fin sont anticonstitutionnelles  et contraires aux principes élémentaires d’une démocratie acquise au prix du sang. Mais la nécessité de trouver une solution politique conforme au droit constitutionnel, incite tous les partenaires de la république du Mali à tenter une médiation. C’est dans cette perspective qu’une mission de la CEDEAO s’est rendue à  Bamako.

Les solutions proposées par ladite mission et réaffirmée par le groupement de chefs d’État ont été rejetées en bloc par le mouvement M5. Ce dernier se focalise sur le départ forcé d’un président démocratiquement élu. Cette attitude  réfractaire, d’une fraction du peuple qui ne peut s’attribuer la souveraineté  appartenant au peuple entier, étonne. On est donc en droit de se demander si cette lutte noble n’est pas menée pour de nouvelles raisons.

En effet, la CEDEAO a proposé un gouvernement d’union national afin que toutes les sensibilités  politiques soient représentées.   Cela aurait permis d’améliorer la gouvernance sans entraver les principes élémentaires de la démocratie. En refusant cette solution salutaire, en persistant dans sa logique anticonstitutionnelle, le M5 fait douter de ses motivations. On se souvient que ce sont les mêmes acteurs qui étaient  montés au créneau pour défendre corps et âme le premier mandat d’IBK.

Ce sont eux qui avaient  poussé  le peuple  à redonner sa confiance en 2018 à un président qui avait déjà révélé ses limites. On signalera également que certains  acteurs du M5 ont  participé  à, au moins, un gouvernement de ce soi-disant “mauvais Chef d’Etat”. Certains étaient membres de l’Assemblée nationale mais n’ont jamais su impulser une quelconque dynamique propice au changement de gouvernance. Et la nouvelle assemblée, parce qu’elle a une configuration similaire et surtout parce qu’elle est contestée fortement, doit être dissoute par application de l’article 42 de la Constitution.

Aussi, sommes-nous étonnés de voir les anciens soutiens du régime refuser un compromis qui pourrait mettre un terme à  des crises interminables et complexes. Pourquoi ne pas saisir l’occasion de revenir aux affaires pour contribuer à l’amélioration de la gouvernance ? Des maliens craignent, même s’ils  ne le souhaitent  guère, que cette soi-disant révolution populaire se terminera par un partage du gâteau entre oligarques. Alors pourquoi le faire languir et pourquoi maintenir le pays dans le chaos?

Le mémorandum soumis par le M5-RFP témoigne d’un manque de volonté  de trouver une solution politique conforme au droit. L’exigence relative à la nomination d’un premier ministre plein pouvoir par la rue est absurde. Cette nouvelle révolution, aussi qu’elle soit, ne peut aboutir  qu’au piétinement de la Loi fondamentale qui garantit nos libertés fondamentales. La  période de trêve aurait dû être utilisée pour approfondir la réflexion. Les parties auraient dû faire des concessions réciproques pour la sauvegarde de la nation.

Vive le Mali !

Vive la république !

Dr Moussa Dougouné

Source: Le Pélican