Le scrutin présidentiel de dimanche au Mali, considéré comme crucial pour l’accord de paix de 2015, a été marqué dans plusieurs secteurs du nord et du centre du pays par des attaques jihadistes présumées et une faible affluence.

Les quelque 23.000 bureaux de vote ont commencé à fermer et à entamer le dépouillement à partir de 18 heures GMT, ont constaté des journalistes de l’AFP, les premiers résultats étant attendus dans les 48 heures, les résultats officiels provisoires d’ici le 3 août, avant un éventuel second tour le 12 août.

La communauté internationale, présente militairement avec la force française Barkhane, qui a pris le relais de l’opération Serval lancée en 2013 contre les jihadistes, et avec les Casques bleus de l’ONU, attend du vainqueur une relance de l’accord de paix signé en 2015 par le camp gouvernemental et l’ex-rébellion à dominante touareg, dont l’application accumule les retards.

Malgré cet accord, les violences jihadistes ont non seulement persisté, mais se sont propagées du nord vers le centre et le sud du pays, puis au Burkina Faso et au Niger voisins, se mêlant souvent à des conflits intercommunautaires.

Quelque huit millions d’habitants de ce vaste pays enclavé d’Afrique de l’Ouest, comptant une vingtaine d’ethnies, devaient décider de reconduire le président Ibrahim Boubacar Keïta, 73 ans, ou élire un de ses 23 concurrents, dont le chef de l’opposition, Soumaïla Cissé, 68 ans, et une seule femme, Djeneba N’Diaye.

Le président sortant a voté à Bamako, et le chef de l’opposition à Niafounké, dans la région de Tombouctou (nord-ouest).

Dans le Nord, où l’Etat est peu ou pas présent, notamment à Kidal (nord-est), bastion de l’ex-rébellion les groupes armés signataires de l’accord participent également à la sécurisation du vote.

Malgré la mobilisation de plus de 30.000 membres des forces de sécurité, nationales et étrangères, selon le ministère de la Sécurité intérieure, une série d’attaques visant le matériel et les agents électoraux ont été signalées dans le nord et le centre du pays.

Menaces, agressions, incendies

A Fatoma, dans la région de Mopti (centre), les agents électoraux ont subi des violences, ce qui a empêché la tenue du vote, selon un groupe d’observateurs maliens et le gouverneur. Plus à l’est, dans la commune rurale de Gandamia, onze bureaux de vote ont été saccagés, les agents électoraux agressés et le matériel détruit, selon les mêmes sources.

A Pignari Bana, près de Bandiagara (centre), “dans les quatre villages il n’y a pas eu de vote, des groupes armés ont interdit la présence des administrateurs de l’Etat” et les autorités locales ont préféré obtempérer, a indiqué à l’AFP le maire de la commune, Bourema Napo.

Dans la commune rurale de Lafia, à l’est de Tombouctou, le vote n’a pu se tenir, les urnes ayant été incendiées dans la nuit de samedi à dimanche par des jihadistes présumés, selon les autorités locales.

Dans cette région, “les forces de sécurité sont plutôt concentrées dans les centres urbains qu’en milieu rural”, a expliqué à l’AFP un responsable de la société civile de Tombouctou, Yehia Tandina.

“La mission européenne d’observation demande aux autorités maliennes de publier la liste des bureaux où le vote n’a pas pu avoir lieu”, a déclaré dans la soirée sa chef, Cécile Kyenge, insistant sur l’importance de la “transparence” et de “l’intégrité de l’élection”.

Des tirs de roquettes ont visé le camp de la mission de l’ONU (Minusma) à Aguelhok (nord-est), sans atteindre leur cible ni faire de victime, selon une source de sécurité au sein de la Minusma.

Le taux de participation est traditionnellement bas au premier tour de l’élection présidentielle dans ce pays connu pour son rayonnement culturel, mais où moins d’un tiers des plus de 15 ans sont alphabétisés.

Selon Oumou Diarra, une jeune femme qui accomplissait pour la première fois son devoir civique, à Niafounké, “c’est très important de voter. Je viens de voter pour le changement”.

Vendredi,le chef de la principale alliance jihadiste du Sahel, liée à Al-Qaïda, le Touareg malien Iyad Ag Ghaly, s’est invité dans la fin de campagne, dirigeant d’un des groupes islamistes qui s’étaient emparés de tout le nord du Mali en 2012.

Citant les exactions présumées de l’armée malienne à l’encontre de civils dans le centre du pays, le chef du “Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans” a assuré dans une vidéo que “ces crimes ne resteront pas impunis”.

A Mbera, le plus grand camp de réfugiés maliens, dans le sud-est de la Mauritanie, 7.320 électeurs étaient inscrits “dans 28 bureaux de vote situés à Mbera-ville, à 3 km du camp” a indiqué à l’AFP Ahmedou Ag Boukhary, l’un de leurs représentants.

Avec AFP

VOA