Sans verser dans les amalgames et les schémas réducteurs, la configuration du Gouvernement SBM II délesté de certaines grosses pointures n’est pas sans interpeller. Autopsie d’une séquence truculente.

Deux catégories de ministres ont été sorties du premier Gouvernement de la seconde mandature du Président Ibrahim Boubacar KEITA.
Il y a, d’une part, ceux qui quasi inamovibles durant les 5 premières années ont mouillé le maillot pour permettre au Président de mettre en œuvre sa vision et qui ont joué un rôle prépondérant dans sa réélection.
D’autre part, il y a ceux qui sont censés être l’incarnation de l’unité nationale.

La stabilisation du pouvoir
Dans le premier lot se trouve le ministre sortant du Commerce et de la concurrence, Abdel Karim KONATE, en poste durant 5 ans, sans interruption. L’on retiendra que c’est sous son impulsion que les prix des denrées de première nécessité ont toujours été maîtrisés, notamment durant le mois sacré du ramadan.
M. KONATE a été l’initiateur du processus de réforme de la Direction nationale du commerce et de la concurrence (DNCC) qui est devenue Direction générale du commerce et de la consommation (DGCC) qui redonne ses lettres de noblesse à la structure, à travers une règlementation plus stricte du commerce et qui protège les droits des consommateurs.
Pour permettre la pleine opérationnalisation de la DGCC, le ministre KONATE s’est employé à lui trouver un logement digne de ce nom, un R+5 qui sort de terre et qui regroupera l’ensemble des services techniques.
Dans la même veine de la protection des droits des consommateurs, le ministre KONATE est l’initiateur d’un projet de texte sur les loyers qui est pour le moment en stand-by.
À l’actif du ministre KONATE, on peut également citer le logement de l’Agence nationale de métrologie dans un immeuble ayant coûté plus de 800 millions de francs CFA et doté des équipements de dernière génération. Désormais, soutien-on, elle réunit toutes les conditions pour veiller à la justesse des mesures. Ce qui participe également de la protection des droits des consommateurs.
À cela, peut-on ajouter tous les efforts visant à ramener la sérénité dans le milieu des commerçants, notamment après l’interminable bataille de succession de Jeamille BITTAR à la CCIM. Le résultat est probant puisque la CCIM retrouve ses marques.
Il y a aussi tous les efforts de stabilisation du pouvoir entrepris par le ministre Abdel Karim KONATE à travers une gestion adroite des crises sociales. On se rappelle qu’il a négocié avec l’UNTM jusqu’à 5 h du matin pour éviter une grève générale projetée. Aussi, son intervention avait permis le retour des médecins dans les hôpitaux, après la mort d’une dizaine de patients.
L’on se rappelle également sa médiation dans la crise de la FEMAFFOT qui a évité in extremis une suspension de notre pays de toutes les compétitions.
De l’avis des acteurs, le ministre sortant, en 5 ans, a fait pour le secteur du commerce plus que cela n’aurait pu l’être en 20 ans en d’autres circonstances.
Du point de vue purement politique, il est de ceux qui ont manœuvré pour obtenir un ralliement du Parti, Alliance pour la démocratie au Mali/Parti africain pour la solidarité et la justice (ADEMA/PASJ) dont il est vice-président, à la candidature du Président sortant Ibrahim Boubacar KEITA.
Mieux, il est descendu à la base, pour convaincre les électeurs de voter IBK. Le triomphe du candidat de l’Alliance ‘’Ensemble pour le Mali’’, à Koro, avec plus de 30 000 voix au premier tour de l’élection du Président IBK, alors que son poursuivant immédiat était crédité d’environ 13 000 voix, lui est fortement imputable.
Grâce à la mobilisation exceptionnelle de M. KONATE, le candidat IBK a engrangé 55 000 voix, au second tour de la présidentielle, à Koro. Un résultat qui a permis de battre Soumi champion dans la région de Mopti.
Il faut dire qu’il a réussi le même exploit auparavant, témoignant ainsi de sa constance dans le soutien au Président Ibrahim Boubacar KEITA, tout en restant dans la ligne tracée par son Parti.
Empé, comme on l’appelle, peut donc être fier d’avoir servi honorablement son pays, en un moment critique de son histoire et surtout de pouvoir se retirer sans casseroles, sans scandale.

La loyauté à toute épreuve
Une autre personnalité qui a fait les frais de ce remaniement/réaménagement ministériel, c’est l’ancien ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale Tieman Hubert COULIBALY. Il fait partie des rares ministres fidèles au poste tout au long des 5 années de la première mandature du Président IBK, avec seulement les parenthèses du Gouvernement remanié du 3 septembre 2016 du Premier ministre Modibo KEITA où il est écarté et remplacé par Abdoulaye Idrissa MAIGA au ministère de la Défense et des Anciens Combattants. Déjà, dans le Gouvernement Tatam LY, il a été successivement ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, ministre des Domaines de l’Etat, des Affaires Foncières et du Patrimoine, ministre de la Défense et des Anciens combattants, ministre de l’Administration territoriale, enfin ministre des Affaires étrangères et de la Coopération Internationale et de la Coopération Internationale. C’est donc un homme expérimenté, mais surtout à la loyauté à toute épreuve qui est ainsi remercié.

Un engagement reconnu
Le ministre des Maliens de l’extérieur et de l’intégration africaine, le Dr Abdramane SYLLA, s’illustre par 5 ans de présence sans interruption dans le Gouvernement. Proche du Président IBK avec qui il a partagé un mandat de député, il a bénéficié, à maintes reprises, des éloges de celui-ci pour le travail titanesque qu’il abat en faveur de nos compatriotes de l’étranger. La crise libyenne et le refoulement de nos compatriotes d’Algérie ayant fini de convaincre de son engagement pour la sécurité de nos ressortissants.

La promotion du PUS
Malick ALHOUSSEINI, ministre de l’Énergie et de l’eau sortant fait figure de baroudeur. Il a été l’un des plus en vue dans la mise en œuvre du Programme présidentiel d’urgences sociales (PUS) durant les derniers mois de la première mandature d’IBK. Il ne fait l’ombre d’aucun doute que son dynamisme qui lui a permis de parcourir quasiment tout le pays pour la promotion de ce Programme a été déterminant dans le choix des électeurs pour un second mandat du Président IBK.
Il faut noter également qu’à l’instar des trois ministres ci-dessus cités, Malick ALHOUSSEINI justifie d’une solide expérience puisque dans le premier Gouvernement de l’ère IBK, il était là, ministre délégué auprès du ministre de l’Administration territoriale, chargé de la Décentralisation.
Les valeurs et principes
Dans le second lot figure le ministre de la Réconciliation nationale et de la cohésion sociale, Mohamed El Moctar. L’une des dispositions phares de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issu du processus d’Alger est l’inclusivité. En effet, l’article 1er dudit Accord stipule : ‘’les Parties, dans l’esprit de la Feuille de route, réitèrent leur attachement aux principes ci-après : (…) reconnaissance et promotion de la diversité culturelle et linguistique et valorisation de la contribution de toutes les composantes du peuple malien, particulièrement celle des femmes et des jeunes, à l’œuvre de construction nationale’’.
L’article 5 stipule : ‘’outre les mesures visées ci-dessus, le règlement définitif du conflit nécessite une gouvernance qui tienne compte des spécificités locales et qui s’articule autour des éléments suivants : (…) une plus grande représentation des populations du nord au sein des institutions nationales’’.
Cependant, le Président IBK, dans son discours d’investiture, avait annoncé que le programme ‘’Notre grand Mali avance’’, qu’il a proposé pendant la campagne devra être scrupuleusement appliqué. Aussi, sera-t-il sous-tendu par une vision basée sur les valeurs et principes que j’entends imprimer à l’action publique, dont : ‘’la poursuite de la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation reste ma priorité. Pour ce faire, j’exigerai de chacun la plus grande des loyautés. Au risque que ceux qui pratiquent le double jeu s’excluent définitivement de ce processus’’.
Si la sortie de El Moctar n’est pas une sanction individuelle, elle pourrait par contre être perçue comme un message fort à l’endroit des Mouvements signataires maintes fois accusés d’atermoiement. Comme pour dire qu’il n’y a de droit acquis.

Par Bertin DAKOUO

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