L’être humain, dans son cadre de vie, connaît une évolution qui est loin d’être linéaire, parce que faite de hauts et de bas. Ces variations portent tout autant sur sa situation sociale que son état physique, et mental. Ces dimensions étroitement liées s’influencent mutuellement et marquent l’individu plus ou moins profondément.

La sagesse populaire dans nos régions a assimilé cette conception de la réalité, et des personnes familières entre elles la véhiculent dans leurs échanges quotidiens, en cherchant à savoir sur un ton badin, si l’autre «domine ou subit les événements du jour». Mais plus gravement, dans l’agencement de cette alternance, lorsqu’un certain équilibre vient à se rompre durablement, cette situation conduit souvent au désarroi de l’individu, ouvrant la voie à des comportements insolites. En évoquant ces phénomènes, les exégètes rappellent entre autres références, ce passage du Livre saint de l’islam : « Nous faisons alterner jours heureux et jours malheureux parmi les hommes afin de déceler les vrais croyants et de faire surgir d’entre vous des témoins de la foi. Dieu ne saurait aimer les pervers » (3:140).
Les ressources humaines permettant de traverser ces jours moins heureux revêtent des aspects divers. Certaines de ces formes ont été rapportées il y a quelques temps de cela par la presse. Ces faits relevés dans un environnement à dominante musulmane, concernaient différentes catégories socioprofessionnelles. Hommes et femmes de conditions diverses, recouraient aux services de personnages se faisant passer pour des magiciens. Ils se précipitaient vers une localité réputée pour offrir un large éventail de sciences occultes. Ces pratiques allaient de l’usage du marc de café à l’exorcisme, en passant par des séances devant permettre aux protagonistes d’apercevoir dans une tasse d’huile, des scènes supposées se passer ailleurs. Les initiateurs de ces pratiques disposaient même de rabatteurs chargés d’aiguiller les clients potentiels vers «le meilleur spécialiste» dans le domaine de leur préoccupation.
Posant un regard lucide sur ces phénomènes, un sociologue les reliera aux problèmes économiques entrainés par les mutations sociales. Selon lui, «les contrariétés offrent un terrain propice aux charlatans qui proposent ainsi le surnaturel aux désespérés cherchant des solutions miracles à leurs soucis». Aux yeux des oulémas, l’utilisation de la religion à des fins de charlatanisme relève de pratiques des plus déplorables, proscrites par l’islam. Les exégètes rappellent à cet effet un épisode de l’histoire de Salomon. Une partie de ses hommes s’était alors laissée aller à suivre ce que les démons avaient imaginé contre son royaume.
Ces créatures maléfiques « avaient enseigné aux hommes la magie et la science qui ont été données aux deux anges Harout et Marout à Babylone ». Selon les théologiens, elles prenaient soin cependant de déclarer à celui qu’elles instruisaient de leur art : « Nous sommes la tentation, prends garde de devenir infidèle ». Néanmoins les hommes apprenaient ce qui leur était nuisible et non pas ce qui pouvait leur être avantageux. Ils savaient bien cependant que ceux qui avaient acheté cet art étaient déshérités de tout mérite dans la vie future. à ce sujet, les théologiens rappellent que « la foi et la crainte du Tout-Puissant leur auraient procuré une meilleure récompense, s’ils l’eussent su » (2:97).

A. K. CISSÉ

Source: Journal l’Essor-Mali