Les résultats d’une nouvelle étude mettent en évidence  que les progrès pourraient être menacés si de nouveaux traitements ne sont pas développés. Car, selon le test, l’évolution récente du parasite pourrait compromettre l’efficacité des combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (CTAs), actuellement utilisé pour lutter contre le paludisme.

 

Le succès obtenu dans la lutte contre le paludisme en Afrique est menacé par la propagation de la multi résistance aux médicaments. En tout cas, ce sont les conclusions d’une étude qui vient d’être publiée dans le prestigieux Journal Science par des chercheurs de renom  africains, le jeudi 22 août.

Les travaux de cette nouvelle étude, qui met à nu la résistance aux antipaludiques les plus couramment utilisés, ont été dirigés par le Pr. Abdoulaye Djimdé, de l’Université des Sciences, des Techniques et des Technologies de Bamako (USTTB), en collaboration avec le  » Wellcome Sanger Institute« . Les scientifiques ont travaillé avec des outils de la génomique pour étudier la diversité des parasites du paludisme à travers le continent et connu sous le nom « Plasmodium Diversity Network Africa » (PDNA).

Les enquêtes menées  ont permis de comprendre la façon dont la résistance aux médicaments émerge dans différents endroits et comment ce phénomène se propage par diverses voies à travers l’Afrique. Toutes choses qui compromettent  les succès antérieurs dans la lutte contre le paludisme.

L’essai précise que les chercheurs ont dévisagé la diversité génétique des populations de P. falciparum, qui sont endémiques dans plusieurs pays d’Afrique subsaharienne, y compris l’Éthiopie et le Ghana. Ainsi, signale toujours l’enquête,  les données génomiques de surveillance aideront à suivre  de près l’émergence et la propagation de souches résistantes aux médicaments, ce qui aidera les efforts visant à éliminer le paludisme.

Il est important de préciser que le paludisme reste un problème mondial, avec l’espèce de parasite la plus mortelle, P. falciparum, répandue en Afrique subsaharienne. Entre 2000 et 2015, une campagne continue d’élimination de la maladie a vu le nombre de décès liés au paludisme dans le monde passer de 864.000 à 429.000 par année.

En 2015, 92% des décès liés au paludisme dans le monde se sont produits en Afrique, dont 74% chez les enfants de moins de cinq ans.  Mais les résultats d’une nouvelle étude suggèrent que ces progrès pourraient être menacés si de nouveaux traitements ne sont pas développés.

Les expériences de cette nouvelle étude indiquent toutefois que les parasites de P. falciparum sont génétiquement distincts selon la région d’Afrique où ils sont trouvés. Par ailleurs, les toubibs ont découvert que ces populations régionales partagent du matériel génétique dans toutes les directions, y compris des gènes qui peuvent conférer une résistance aux antipaludiques, avec de nouveaux types de résistance médicamenteuse pouvant émerger  dans différentes régions d’Afrique. Les auteurs pensent que la migration humaine, y compris celle résultant du passé colonial, a joué un rôle dans l’évolution de P. falciparum en Afrique.

Pour le professeur Abdoulaye Djimdé, chef de l’unité d’épidémiologie moléculaire et de la chimio-résistance aux médicaments antipaludiques du MRTC-Parasitologie de l’USTTB, Mali et Fellow International de Institut Wellcome Sanger de Grande Bretagne contrairement aux études précédentes, l’équipe de recherche a identifié des populations distinctes de P. falciparum en Afrique occidentale, centrale et orientale. Et aussi d’une population éthiopienne très divergente,  » le matériel génétique provenant de toutes les régions a été partagé par toutes les populations, indiquant que le flux de gènes est multidirectionnel, par opposition à unidirectionnel d’Est en Ouest, comme on le pensait précédemment. Ces informations sont cruciales pour comprendre comment la résistance aux médicaments antipaludiques se développe en Afrique« , a-t-il avancé.

Plus inquiétant encore, de fortes signatures génétiques ont été détectées sur le chromosome 12 dans des échantillons de P. falciparum du Ghana et du Malawi, ce qui soulève, selon lui, la possibilité que l’évolution récente du parasite pourrait compromettre l’efficacité des combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine (CTAs).

De son coté, Dr. Alfred Amambua-Ngwa, premier auteur de l’étude, chercheur de  » Wellcome International « , à l’Institut Wellcome Sanger et professeur assistant à MRC Gambia,  de la London School of Hygiene and Tropical Medicine, a déclaré :  » Quels que soient les facteurs historiques affectant le flux des gènes entre les populations distinctes de P. falciparum, le flux multidirectionnel que nous avons identifié soulève la perspective d’une propagation continentale de la résistance aux combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine, qui pourrait venir de n’importe où en Afrique. La surveillance génomique, et à grande échelle, sera essentielle pour suivre l’émergence et la propagation de la résistance aux combinaisons thérapeutiques à base d’artémisinine« , s’est-il inquiété.

F.Mah Thiam KONE

Source: l’Indépendant