Bismilahi Rahmani Rahimi

Mes chers compatriotes,Hôtes qui vivez parmi nous,

A cette heure, vous avez, certainement, toutes et tous, pris connaissance du communiqué du gouvernement rendu public ce matin et annonçant que deux cas présentés aux autorités sanitaires dans la nuit d’hier, mardi 24 mars 2020, ont été testés positifs au COVID-19, communément appelé Coronavirus.

La nouvelle nous attriste mais elle ne nous étonne pas. Nous savions tous jusqu’où le Mali était exposé en tant que pays, voire encerclé. Nous sommes une terre de départ et d’accueil ; nos voisins sont contaminés ; la sous-région est contaminée ; l’Afrique, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest est contaminée ; nos compatriotes séjournent dans les pays considérés aujourd’hui comme épicentre du fléau tant redouté.

Dès lors, la question n’était pas si le Mali allait être atteint à son tour, mais quand et à quelle échelle.

Quand ? Nous y sommes hélas. Les deux cas confirmés démontrent que notre pays n’est pas un ilot, mais qu’il est partie intégrante d’un monde déboussolé et bouleversé par la fulgurance du mal et à sa capacité à remettre en cause notre sociologie, notre économie, notre liberté.

A quelle échelle ce mal nous frappera t-il ? Cela dépendra de chacune de nous, de chacun de nous, de nous toutes et de nous tous, sans exception, sans complexe, sans relâche, chacun avec la pleine conscience de ce que ses écarts entraînent comme risque pour tout le monde, et de ce que le respect des mesures-barrières représente comme chance de salut pour la collectivité.

Mes chers compatriotes,

Le temps est lourd de défis et il nous interpelle individuellement et collectivement. Ne laissons pas, par l’insouciance, l’ignorance ou la fuite, le Coronavirus prendre ici l’ampleur qu’il a prise ailleurs.

Des systèmes qui passaient pour être bien rodés cèdent sous le poids de l’épidémie. Des infrastructures sanitaires que nous croyions parées à toutes épreuves montrent aujourd’hui leurs limites face à l’étendue du mal. En occident, c’est un long mythe d’imprenabilité qui s’écroule.
Alors, les leçons des grandes puissances économiques dans la tourmente doivent nous servir. Elles doivent nous conforter dans la certitude que le salut d’Etats vulnérables comme le nôtre réside dans la prévention, c’est-à-dire notre volonté et notre aptitude à limiter au maximum le risque de nous infecter les uns les autres.

Je suis le premier serviteur de la nation surtout lorsqu’elle en péril comme aujourd’hui et je reste à votre entière disposition. Nos services de santé qui sont ceux d’un pays pauvre mais volontariste et fier restent à votre entière disposition.

Le gouvernement dont le Premier ministre et les ministres ne ferment pas l’œil depuis plusieurs semaines, et cela avant la découverte des cas signalés, reste à votre entière disposition.

L’Etat sera à vos côtés, dans tous ses démembrements. Les forces de défense et de sécurité, là ou besoin est, seront mobilisés, pour votre confort.

Nos moyens sont justes. Ils peuvent même être considérés comme dérisoires face à ceux des puissances mondiales. Mais nous nous battrons. Tous les jours, nous renforcerons ces moyens. Et vous nous trouverez, nuit et jour, sur le front du Coronavirus, sans jamais déserter les deux autres fronts qui nous préoccupent et qui nous ont toujours préoccupés : la sécurité et le développement.

Telles sont les exigences du temps. Nous ne nous y déroberons pas, car c’est du présent et du devenir du Mali qu’il s’agit. Et le Mali est infiniment supérieur à chacun d’entre nous.

Maliennes et Maliens, hôtes du Mali,

Aidons-nous donc. Aidons-nous à aider les uns et les autres ; prenons l’exacte mesure des dangers que le pays court désormais ; évitons les procès stériles ; évitons les analyses sommaires et les discours biaisés ; évitons les stigmatisations et respectons, chacun et chacune, les mesures-barrières.

Je ne le dirai jamais assez : respectons les mesures-barrières. Au niveau des familles, faisons en sorte de ne pas exposer ceux du troisième âge, la catégorie qui a payé jusque-là, le tribut le plus lourd, le plus tragique, à l’épidémie. Surveillons-les mouvements des enfants ; évitons les allées et venues non nécessaires car ils accroissent le risque de contagion pour la famille.

Il y a deux jours, je disais sur les plateaux de la télévision nationale que le spectacle de la Kaaba vide un jour de vendredi, était plus qu’éprouvant pour un croyant. De même que l’image des églises vides.

Oui, que les autorités sunnites, les chiites, les chrétiens, les judaïques aient décidé de ne pas exposer leurs disciples montre la sagesse du Livre.
Dieu est miséricorde, mansuétude et bonté infinie. Il est partout. Il est dans nos cœurs. Il sera davantage avec nous, en l’occurrence, si nous ne décidons pas d’exposer nos épouses, nos enfants, nos vieux parents, par le refus de nous conformer aux mesures-barrières prises par les gouvernants dans l’intérêt de chacun et de tous.

Le maintien de la date des élections législatives ou la non-fermeture des marchés ne sauraient servir d’alibi à la décision de garder ouverts les lieux où les attroupements peuvent être évités sans remettre en cause l’essentiel.

Les élections législatives émanent de la décision du Dialogue National Inclusif qui en avait, rappelez-vous, fixé les échéances. L’Exécutif s’est gardé d’interférer dans ce Dialogue salué par tous et considéré comme un grand acquis de notre Histoire immédiate.

Ces élections se tiendront le 29 mars, c’est-à-dire, ce dimanche, et ce dans le respect scrupuleux des mesures-barrières. Le gouvernement fera tout pour que cela soit le cas.

Les marchés seront, eux aussi, assujettis au respect desdites mesures. Tout ce qui doit être fait pour casser la chaîne de contamination sera fait. Mais nous ne pouvons oublier que c’est du marché quotidien qu’une grande partie de nos compatriotes, trouve sa survie et qu’une grande partie de nos foyers arrive à s’alimenter. La question ne peut pas être banalisée.

Le gouvernement s’assumera et entreprendra tout pour contenir le mal. En plus de l’Etat d’urgence qui prévaut dans notre pays en raison du contexte sécuritaire, l’état d’urgence sanitaire est décrété.

Un couvre-feu est également décrété qui sera rigoureusement appliqué de 21h à 5h du matin jusqu’à nouvel ordre, et ce à compter de ce jeudi 26 mars 2020 à zéro heure.

Les frontières terrestres du Mali seront fermées, sauf au fret et transport des marchandises, en particulier les denrées de première nécessité.

Mes chers compatriotes,
Hôtes du Mali,

Je sais le coût de ces mesures pour notre économie, qui est celle d’un pays enclavé. Mais tel est le prix à payer, si nous voulons éviter au Mali la tragédie.

Je voudrais, en ces moments d’épreuves, convoquer toutes nos ressources en tant que nation. Au nombre de ces ressources, j’en appelle à la capacité de chacune de nos familles à être la toute première barrière à la pandémie du Coronavirus.

Que chaque ménage, chaque concession, se dise aujourd’hui que vaincre ce fléau est possible et faisable !

A la résilience qui nous caractérise, il nous incombe d’ajouter le sens de l’anticipation.
Le bon comportement est requis. Notre bon comportement, celui de chacune de nous, de chacun de nous, mais aussi de notre ensemble.
Les gestes qui nous sauveront dépendent de nous. Et ils ne sont pas au dessus d’un peuple aussi grand que le nôtre.

Mettons-nous en ordre de bataille ! Et livrons à cette épidémie une guerre sans merci !

Qu’Allah bénisse le Mali !

Présidence de la République du Mali