Qui veut piéger Dr Boubou Cissé ? En tout cas, le gouvernement a commis une grosse bêtise en publiant, il y a une semaine, un document dans lequel il explique, chiffres à l’appui, les efforts consentis dans la majoration des salaires des soldats de la craie et du savoir. Ces déclarations et arguments n’ont pas suffi à faire taire la contestation des enseignants. Bien au contraire !

Lors de sa récente visite dans la cité des 333 saints, l’annonce du Premier ministre sur les salaires des enseignants a fait une vague d’indignation et de colère dans les rangs des enseignants grévistes. Une enquête nous a permis de découvrir qu’il y a anguille sous roche. En effet, il semble bien que derrière cette volonté affichée de la Primature à résoudre la crise se trouve caché un gros mensonge. Pendant que le Dr. Boubou Cissé se trouvait à Tombouctou, des voix se sont élevées dans les rangs des enseignants grévistes pour battre en brèche ses déclarations sur la crise de l’école. Tout ceci n’a pas fait changer le gouvernement de langage. Aujourd’hui encore, la population ne sait à qui croitre dans ce combat. Les parents d’élèves veulent toujours savoir qui du gouvernement ou des enseignants dit la vérité. Loin de vouloir remuer le couteau dans la plaie, votre fidèle serviteur s’est livré à l’exercice d’éclairer la lanterne des lecteurs sur cette affaire qui continue de faire débats. Nos entretiens et témoignages recueillis auprès de certains enseignants en disent long sur de graves soupçons de détournements sur le traitement des salaires des enseignants.

Des chiffres erronés !
Prenant l’exemple sur une catégorie, le gouvernement avance les arguments suivants : « Un enseignant débutant de la catégorie B2, classe 3, 1er échelon, avait un indice de 250 et un salaire brut de 184 004 FCFA suivant le statut général des fonctionnaires (loi n° 02-053 du 16 décembre 2002, modifiée). Aujourd’hui, grâce au statut autonome, ce même enseignant a un indice de 275 et un salaire brut de 225 291 FCFA mensuel, soit une augmentation de 41287 FCFA par mois ». Cette déclaration est formellement démentie par les enseignants. Approché par nos soins, PG, un enseignant généraliste intégré à la fonction publique des collectivités en 2017 et affecté à l’académie de Tombouctou pour le compte du CAP de Goundam, s’étonne et s’indigne : « Je crois que le gouvernement doit au moins respecter les enseignants. Tout ce qui est vrai dans ce soi-disant communiqué, ce sont les deux indices. Tout le reste est faux. Quand je débutais, je percevais un salaire mensuel brut de 100 000 FCFA cash. Aujourd’hui, avec tout ce qu’il dit, y compris la prime de zone, mon salaire global ne dépasse pas 125 000 FCFA. En tout cas, ce que le gouvernement prétend accorder aux enseignants, je ne le vois pas écrit sur mon bulletin de salaire ». Il est suivi dans la même démarche par un autre collègue en exercice, en 3è région. Recruté par voie de concours à la fonction publique des collectivités en 2011 comme enseignant de français, et affecté dans l’académie d’enseignement de Sikasso, M. Doumbia, n’en revient pas. Sans détour, il raconte sa situation : « Lorsque je débutais dans l’enseignement, j’avais un salaire net à payer un peu plus de 102 000 FCFA. En novembre 2019, avec ma catégorie B2, classe 3, échelon 3, mon bulletin de salaire affichait un montant brut de 126 000 FCFA et un net à payer de 174 441 FCFA. Même avec ça, l’écart est grand par rapport au chiffre avancé par le gouvernement. Ce sont des mensonges que le gouvernement avance. A quoi bon mentir sur nos propres salaires. Tout est vérifiable. Je me demande si nous ne sommes pas dans un Etat où il y a un autre ministère des Finances parallèle à celui que nous connaissons ». Soit, il y a deux bulletins de salaires que nous ignorons, a-t-il lancé. A l’entendre, si ce que le gouvernement dit est vrai, la question qui se pose est de savoir qui coupe les salaires des enseignants. Abondant dans le même sens, le jeune M.S., enseignant des mathématiques et physique-chimie en fonction depuis 2014, a juré que de nos jours, son salaire global ne dépasse pas 180 000 FCFA. Auparavant, il nous a confié que son salaire brut au moment de son intégration était plafonné à 100 000 FCFA. Avec tous ces « bla-bla », le gouvernement a le devoir de faire toute la lumière sur cette affaire, s’il ne se reproche rien. Avisé, il revient au Bureau du Végal de fourrer son nez dans la gestion et dans le traitement des salaires des enseignants pour que la vérité soit sue et dite.
Jean Goïta

source : La lettre du peuple