Au Mali, les réserves de faune et de flore, ainsi que les forêts classées, sont confrontées à de fortes pressions des populations riveraines. Coupe abusive du bois, occupations anarchiques pour faire des champs de cultures et même des habitations, feux de brousse, surpâturages…Au Mali, rien n’est épargné aux aires protégées qui sont nécessaires à la sauvegarde denos réverses de faune et de flore. Les agents des Eaux et Forêts sollicitent l’accompagnement des élus locaux pour la sensibilisation des populations riveraines.

 

Pour toucher du doigt la réalité, l’équipe de reportage de l’AMAP a approché certains responsables du secteur. «Le Mali n’a même pas encore touché les 10% de son territoire classé, or il est recommandé à chaque pays d’atteindre les 15 à 17% pour pouvoir lutter contre les effets du changement climatique, la désertisation et la sécheresse », affirmait le directeur national des Eaux et Forêts, l’inspecteur général Mamadou Gakou, lors d’une visite de forêts classées.

Le ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, Housseini Amion Guindo, avait révélé, à la même occasion, que nos forêts sont confrontées à de fortes pressions dues, notamment, aux défrichements anarchiques, au surpâturage et aux feux de brousse. Cette situation, ajoutée à la démographie galopante, entraîne une dégradation des ressources naturelles. Elle crée, également, des conséquences néfastes sur le milieu physique et sur l’économie de la nation.

«L’incivisme de la population vis-à-vis des textes et des agents des Eaux et Forêts dans l’exercice de leur fonction constitue l’un de nos problèmes majeurs», indique le chef de cantonnement des Eaux et Forêts de Bougouni, le capitaine Seydou Dao. Il soutient que son cantonnement a, en sa charge, huit forêts classées dont trois forêts classées simples et cinq aires protégées pour une superficie totale de 224.562 hectares.

Le capitaine Dao ne manque pas de mots pour décrire les difficultés en matière de protection des forêts classées. Il évoque, entre autres, la coupe frauduleuse du bois, les installations illicites (exploitations agricoles et minières), l’orpaillage avec son cortège d’insécurité, d’insalubrité et de maladies. S’y ajoute le manque de personnel et de matériels pour le bon déroulement de leurs activités. Se prononçant sur les relations avec la population, le chef de cantonnement des Eaux et Forêts de Bougouni a laissé entendre qu’elles sont marquées par la méfiance et l’indifférence.

 Le capitaine Seydou Dao invite, également, le gouvernement à instaurer une vraie politique affichée afin de renforcer la sauvegarde et la protection de l’environnement. «Au Mali, la loi n°10-028 du 12 juillet 2010 interdit toute exploitation de bois ou toutes autres activités humaines dans toutes les forêts du domaine protégé et celles du domaine classé », rappelle le directeur régional des Eaux et Forêts de Sikasso, Mohamadou Seïdou, ajoutant que c’est seulement des droits d’usage pour le ramassage des bois morts et des fruits qui sont accordés aux riverains.

Tout comme le capitaine Dao, le responsable des Eaux et Forêts de Sikasso se plaint de la protection des forêts classées. Il a cité, notamment, l’insuffisance des effectifs et des moyens pour l’accomplissement des missions régaliennes et l’occupation des forêts classées par les hameaux de cultures, les habitations et les éleveurs. «C’est la population riveraine de ces forêts qui constitue la principale menace», a-t-il affirmé, ajoutant que ce sont ces mêmes populations qui doivent les aider dans leur mission de protection.

En outre, Mohamadou Seidou révèle que les forestiers travaillent dans l’insécurité. Il a évoqué l’assassinat de deux de ses agents : le chef de poste de Kaboïla (Sikasso), le lieutenant Ibrahima Diabaté, le 7 mai 2019, et du chef de poste de Mondoro, le lieutenant Mahamane Amadou survenu le 1erjuillet 2015.

Les forêts classées de Koba, de Zangasso et de M’Pessoba qui relèvent du cantonnement des Eaux et Forêts de Koutiala couvrent une superficie totale de 11.335 ha. Son chef de cantonnement, le lieutenant-colonel Harouna Camara a estimé que la non dénonciation des délinquants aux services techniques compétents, le surpâturage, la destruction des jeunes plants par les animaux et le non respect des textes législatifs en vigueur par les populations riveraines constituent les problèmes majeurs. En outre, Harouna Camara a souligné que son cantonnement mène, de façon périodique, des missions d’information et de sensibilisation à l’endroit des populations. «Ce qui leur permettra de comprendre les droits d’usage des forêts classées», a-t-il précisé.

Par ailleurs, le responsable du cantonnement des Eaux et Forêts de Koutiala sollicite une forte implication des élus locaux dans l’information et la sensibilisation des populations ainsi qu’une large diffusion des textes législatifs et réglementaires.

MFD/MD

(AMAP)