En jetant en pâture, la végétation des forêts du Mali, à ses potes et en autorisant une nouvelle fois par arrêté, l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage sous toutes leurs formes sur toute l’étendue du territoire national, la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, Mme Bernadette Keita a, au fil des jours, nourrit l’hostilité des maliens à son endroit. Mais surtout, celle de ses collaborateurs, qui n’hésitent plus à réclamer sa démission, jugée salutaire pour la faune et la flore de notre pays, désormais, en voie de disparition.

 

« Après toutes ces imprudences, commises à tort ou à raison dans ce dossier, la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable doit avoir le courage de rendre le tablier. Ne serait-ce que pour le salut de son âme ».

En colère, un responsable du département de l’Environnement –qui a requis l’anonymat –passe, outre la solidarité départementale, pour fustiger ce qu’il appelle, volontiers, les « sottises de Mme Bernadette autour de la levée de la mesure d’interdiction de l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage sous toutes leurs formes sur toute l’étendue du territoire national ». Et d’ajouter, avec un sourire crispé : « Nous espérons qu’elle le fera, avant que d’autres scandales n’éclatent à sa figure».

Bref, en quelques jours, la « ministre chouchou » du Mali transitoire est passée de la grâce à la disgrâce. Du statut de « sauveur » de l’environnement à celui de «dame de fer » de l’Assainissement. Et sans transition, aucune.

Même au sein de l’attelage gouvernemental, certains ministres n’hésitent plus à prendre leur distance, vis-à-vis d’une femme, devenue, subitement, encombrante. Les organismes de protection de l’environnement et les jeunes de plusieurs villages opposés à la destruction de leurs forêts ont mis sa tête à prix. C’était, le 31 mars dernier, après la publication de la décision sur ‘’ La levée de la suspension de l’exploitation du bois d’œuvre ou bois de sciage’’ en république du Mali.

Plus grave encore, certains organismes de protection de l’environnement menacent même de multiplier les actions, soit, pour la contraindre à revenir sur sa décision de lever la suspension de l’exploitation du bois d’œuvre ou bois de sciage. Et ce n’est qu’un début.

À l’origine de la descente en enfer de la « locataire » du département de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, sa décision de lever la mesure d’interdiction de l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage sous toutes leurs formes sur toute l’étendue du territoire national.

Pourtant, cette décision d’interdiction avait été prise par son prédécesseur pour protéger le peu de forêt qui nous reste. Sans surprise, cette décision qui confirme les présumées accointances malheureuses entre Mme Bernadette KEITA et les responsables de certaines sociétés d’exploitation et d’exportation de bois vers la Chine, suscite des indignations à plusieurs niveaux. Les organismes de protection de l’environnement et les jeunes de plusieurs villages opposés à la destruction de leurs forêts ne décolèrent pas. Pour eux, cette décision qu’ils assimilent à une haute trahison, annonce la fin programmée de nos ressources naturelles au profit des prédateurs fortunés, à la solde de la Chine.
Certainement que la ministre Bernadette Keita aurait bénéficié de la légendaire générosité  de la Générale Industrie du Bois (GIB), seule société habilitée à exploiter et à exporter du bois au Mali. En attendant, des réponses claires à cette interrogation, le mal est déjà fait. Et le risque d’affrontement entre les jeunes et les exploitants forestiers est très élevé. De la part de celle qui a effectué sa carrière au service de la protection de la femme, de l’enfant et de la famille, cette mesure menant tout droit, à long terme, à la paupérisation de ces couches vulnérables étonne plus d’un. Comme la plupart des décisions du gouvernement de transition, cette dilapidation de nos ressources forestières doit  interpelle tous les patriotes maliens.

Le Mali dispose de 12 millions d’hectares de forêts. Selon l’Organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), le pays perd 100 000 hectares chaque année à cause de l’exploitation abusive du bois.

Ainsi, pour préserver les ressources forestières, notre pays a interdit, en 2014, l’exportation à l’état brut de tout type de bois dont le bois de vène (N’guenou en bambara) par le biais d’un arrêté interministériel.

En levant cette mesure d’interdiction de l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage au Mali, l’actuel ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du développement durable, Mme Bernadette Keita, semble avoir confondu vitesse et précipitations. Par cette décision périlleuse, la prétendante « dame de fer » de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, vient de créer l’effet inverse.

Accointances entre la Ministère et les sociétés d’exploitation du bois 

Aujourd’hui, on peut dire qu’avec l’existence de textes législatifs et réglementaires tronqués en matière de protection et de gestion durable des ressources forestières, le gouvernement transitoire est résolument engagé dans la déforestation des végétations de notre pays. Cela s’atteste à travers la levée de la mesure de suspension de l’exploitation du bois par la ministre Bernadette Keita. Une décision qui autorise désormais la société de coupe de bois, dénommée « la Générale Industrie du Bois », seule usine autorisée au Mali à exploiter et à exporter le bois.

Cependant, il convient aux maliens de prendre leurs responsabilités, face à cette décision de déforestation programmée du pays. Comment comprendre que la ministre Bernadette Keita lève la mesure de suspension d’exploitation du bois afin de favoriser des maliens et des chinois de piller les ressources naturelles de toute une nation ? En tout cas, couper du bois est un crime passible de lourdes peines en Chine. Et pourquoi la ministre Bernadette en charge de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable accepte que le Mali aussi souverain que la Chine soit défié en envahissant ses forêts ? Quand on sait que les Chinois ont déjà beaucoup investi dans l’industrie du bois en Afrique en dégradant la forêt, faut-il les laisser faire en les regardant piller toutes les ressources de la terre ?

Mais que constate-t-on aujourd’hui ? Les années d’efforts et de sacrifices des maliens dans la protection de l’environnement et de la biodiversité sont tout simplement en train d’être anéantis par la ministre de l’Environnement  et des sociétés de coupe de bois qui n’ont qu’un seul but : la satisfaction de leurs intérêts égoïstes.

En tout cas, il est inadmissible qu’un pays sahélien comme le Mali, menacé par la désertification, brade des rares parties du pays encore à l’abri de ce fléau.

Disparition d’espèces protégées de bois

Le bois de vène, de son nom scientifique “Pterocarpus erinaceus”, est une espèce de bois de rose. En Chine, il est appelé “Hongmu” et au Mali il est connu sous le nom de “N’guénou”.

Présent dans plusieurs pays du Sahel, ce bois précieux est utilisé pour la fabrication de meubles de luxe en Chine. Il est protégé par la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (Cites) qui l’a inscrit en 2016 dans son annexe II des espèces vulnérables.

L’exploitation et l’exportation de ce bois doivent donc être strictement contrôlées par les États. Mais avec cette levée de la mesure d’interdiction de l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage au Mali par la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, on assiste à une surexploitation des ressources disponibles de nos forêts.

L’exportation du bois de vène est très régulée à l’international. Mais dans la région de Kayes à Kéniéba, les arbres sont coupés, sans contrôle à cause des Chinois. Cela provoque la déforestation. Depuis, nous subissons les effets des changements climatiques. Et les arbres ne devraient pas être coupés n’importe comment.

Le bois de vène est une espèce menacée, mais la ministre malienne de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable, contre toute attente, vient de lever au Mali l’interdiction de l’exploitation du bois d’œuvre ou de sciage sous toutes leurs formes sur toute l’étendue du territoire. Du coup, cette nouvelle mesure favorise la société Générale Industrie du Bois, d’exploiter et d’exporter le bois. D’où la disparition des espèces protégées de bois.

« C’est inacceptable pour un pays comme le nôtre, dont les ressources naturelles sont menacées de disparition. Cela doit s’arrêter d’autant que notre pays subit déjà les aléas du réchauffement climatique », rétorque un autre cadre du département de l’Environnement.

Pour lui, seule la destitution ou la démission de Mme Bernadette Keita pourra mettre fin à cette tendance suicidaire. Non seulement pour la relance des richesses forestières de notre pays ; mais aussi, pour l’ambitieux programme de développement durable sous la transition.

Par ailleurs, les responsables des organismes de protection de l’environnement sont sur les dents. Selon eux, leur message est clair : « La levée de la mesure d’exploitation du bois par la ministre Keïta confirme ses accointances avec les sociétés d’exploitation et d’exportation de cette matière au Mali », déclarent-ils. Avant d’assener leur quatre vérités : « Lever la mesure dexploitation du bois d’œuvre ou de sciage sous toutes leurs formes sur toute l’étendue du territoire national, marque la destruction de la faune et de la flore de notre pays »

La disgrâce…

En confiant le département de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable à Mme Bernadette Keita, le Président de la transition était loin d’imaginer le pire. La preuve : de sa nomination à la tête de ce ministère à aujourd’hui, les irrégularités se succèdent. Alternant, parfois avec les youyous des casseroles. Une addition trop salée pour celle en charge du département de l’Environnement.

Pour certains proches de la Ministre Mme Bernadette Keita, elle est victime d’une campagne lancée par des organismes de protection de l’environnement, décidés à saboter les reformes du département. Ceux-ci, indiquent nos interlocuteurs, auraient débloqué des sous pour lancer ce qu’ils appellent une « campagne anti-déforestation et anti-Bernadette ».

En attendant la preuve de cette affirmation, la démission du ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du Développement durable revient au devant de l’actualité. Sans tambour, ni trompette. Et c’est le signe d’un désaveu cinglant.

Bref, tout se passe, aujourd’hui, comme si la ministre de l’Environnement, de l’assainissement et du Développement durable est devenue persona non gratta.

De l’avis de nos interlocuteurs, elle n’est ni en odeur de sainteté avec ses collègues, ni avec les organismes de protection de l’environnement.

Pour les uns comme les autres, notre pays ne mérite plus la ministre de l’Environnement, de l’Assainissement et du développement durable, Mme Bernadette Keita. Depuis, elle n’a plus le choix : ou elle rend son tablier, ou elle sera démise de ses fonctions. Car, disent-ils, trop c’est trop.

En politique comme à la guerre, l’erreur ne se pardonne guère. Elle se paie chère. Très chère.

Jean Pierre James

Source : Nouveau Réveil