Autorisés par le gouvernement à s’installer sur les terres dont ils avaient été chassés par l’Etat en 1995, les déguerpis de Niamakoro-Diallobougou font face à la résistance du maire de la commune 6 de Bamako.Regroupés au sein d’une Coordination, ils ont animé une conférence de presse le 2 juillet 2017 pour dénoncer le comportement du maire.

Adama Sangare maire bamako

La conférence était animée par Soungalo Keita, président de la Coordination, en présence d’Abdoulaye Coulibaly, mandataire de la Coordination, et de Bréhima Samaké, secrétaire général (photo).

Comment les déguerpis sont revenus

Selon le président Soungalo Keita, par décret n°95-252 P-RM du 15 septembre 1999 portant classement de parcelles de terrain à usage d’emprise aéroportuaire, 4.712 familles avaient été appelées  à quitter les lieux. Les déguerpis se réuniront en plusieurs associations pour réclamer une indemnisation à l’Etat. Pour avoir plus de poids, elles créent une Coordination commune. Après 20 ans de combat, ils ont gain de cause. En effet, en 2016, le gouvernement instruit en conseil des ministres au ministre de l’Administration territoriale de l’époque, Mohamed Ag Erlaf, de procéder à la réinstallation des déguerpis sur leur ancien site. Le ministre autorise alors le maire du District de Bamako, Adama Sangaré, à répartir les lots concernés entre les bénéficiaires. Après le morcellement effectué par les services techniques et le recensement des déguerpis, le maire du District signe 720 notifications sur lesquelles 480 sont remises aux déguerpis. Le maire agit en l’occurrence en étroite collaboration avec une commission de distribution composée, entre autres, de représentants de la mairie du district, de l’Institut géographique du Mali (IGM), du ministère de l’Administration territoriale et de la Coordination des déguerpis.

L’intrusion du maire de la commune 6

Au moment où la commission de distribution œuvre à la répartition des lots, le tout nouveau maire de la commune 6 de Bamako, Alou Coulibaly, se pointe sur les lieux et menace de faire arrêter les acteurs chargés de distribuer les notifications. Selon le conférencier, le maire de la commune 6, dit ne pas reconnaître la décision de réaffectation prise par le gouvernement et prétend que le maire du District n’a pas qualité pour attribuer des parcelles situées en commune 6. Le maire aurait enfin menacé les membres de la Coordination de les faire jeter tous en prison s’ils persistaient à revendiquer la zone. Toujours selon le conférencier, le maire (il appartient au parti d’opposition URD) est allé jusqu’à déclarer qu’à travers cette distribution de parcelles, le président de la République Ibrahim Boubacar Keita entame une campagne électorale. Pour appuyer ses dires, le conférencier a fait auditionner par les journalistes présents un enregistrement sonore  des déclarations du maire. Et ce n’est pas tout! Selon le conférencier, le maire de la commune 6 a dépêché sur les lieux des jeunes gens armés dans le but d’agresser les membres de la commission de distribution.

IBK remercié par les déguerpis

Le conférencier remercie le président IBK et son gouvernement pour avoir remis les déguerpis dans leurs droits en les réinstallant sur leurs parcelles. Il demande à présent au gouvernement de s’impliquer pour faire échec aux intrusions du maire de la commune 6 dans un dossier légalement réglé.

Version du maire de la commune 6

Intervenant sur « Renouveau Télévision » sur la question, le maire de la commune 6, Alou Coulibaly, justifie son opposition par le seul fait que certaines personnes ne figurant pas parmi les anciens déguerpis occupaient les lieux. « Pour une justice sociale, les déguerpis n’ayant pas bénéficié de parcelles doivent être priorisés », a ajouté Alou Coulibaly. A l’en croire, il ne conteste ni la légalité de la procédure, ni les notifications délivrées par le maire du District; il dénonce plutôt l’occupation des parcelles par des « usurpateurs ».

 Adama Sangaré aussi donne sa  version des faits

Le maire du district de Bamako, Adama Sangaré, interrogé à son tour par « Renouveau Télévision », a affirmé que les déguerpis sont dans la plus plus parfaite légalité. Selon le maire du District, c’est suite à une décision prise par le gouvernement que le ministre de l’Administration territoriale de l’époque, Ag Erlaf, l’a autorisé à réinstaller ces déguerpis sur leurs parcelles.  Adama Sangaré a reconnu que se sont  les communes de base qui doivent, en principe, s’occuper du recasement dans les nouveaux quartiers, mais il fait savoir que la gestion de l’ancien tissu domanial (comme le cas d’espèce) continue de relever de la mairie du district.  Sangaré déplore que son homologue de la commune 6 n’ait pas pris la peine de le consulter pour comprendre l’affaire.  « L’opposition du maire de la commune 6 à cette opération que nous sommes en train d’exécuter sur le terrain n’est pas légale, indique le maire du district. Il vient d’être élu et ce dossier est plus ancien que son élection. L’administration publique est une continuité. Il aurait dû demander des informations à l’ancien conseil municipal de la commune 6 ou au maire qu’il a remplacé. ».

Abdoulaye Guindo

 

Source: proces-verbal