«La route vers la vérité est pleine d’embûches, c’est à travers les erreurs que l’esprit progresse vers la vérité.» (Alexandre Koyré). Il n’est plus un secret pour personne que les ténors du Mouvement démocratique qui ont accédé aux affaires ont, dans leur écrasante majorité, travaillé à plonger le Mali dans la cacophonie sans orientation aucune. Notamment, le régime Alpha a inauguré l’ère du «chacun pour soi et le diable pour tous».

 

L’on rappelle qu’à l’occasion de la Biennale artistique et culturelle de 1980, Alpha Oumar Konaré, alors ministre de la Jeunesse, des Sports, des Arts et de la Culture a jeté à la face de Moussa Traoré que dans un pays où tout est moi, moi, le progrès est illusoire. C’est ainsi qu’il a posé sa fameuse question: «Où va le Mali ?» Dès lors, bien de Maliens voyaient en lui l’homme qui se soucie des masses laborieuses.

La guerre ouverte contre le régime udpmiste a été engagée par ce qu’il convenait de nommer ‘’le Mouvement démocratique’’. A l’issue de cette guerre atroce, on  dénombrait 224 morts. Moussa Traoré a été chassé du trône un mardi 26 mars 1991, consacrant ainsi la fin d’un processus et le début d’un nouveau départ dans notre pays.

Une transition de quatorze (14) bons mois a été gérée par différentes sensibilités composant la nation malienne. La Conférence nationale organisée par le Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP) avait nourri bien d’espoirs chez les Maliennes et les Maliens.

Hélas comme le dira cette locution latine: «Parturiunt montes; nascetur ridiculus mus» (les montagnes sont en travail : il en naîtra une souris ridicule). La  transition a passé le flambeau à un président que l’on va dire «démocratiquement élu» en la personne de Alpha Oumar Konaré.

Mais la première grosse bêtise commise par le Mouvement démocratique était d’avoir mis entre parenthèses le cri de cœur  de notre peuple travailleur à savoir le kokadjè, le changement véritable. Comme on le dit souvent, à beau chasser le naturel, il revient au galop. Les dix (10) ans de gestion de nos affaires par Alpha Oumar Konaré ont cimenté, aux dépens de notre peuple travailleur, la gabegie, la surfacturation, la délinquance économique et financière, les détournements de deniers publics, le favoritisme, l’affairisme, etc.

Aujourd’hui, nous assistons, hélas, à la désagrégation du tissu socio-moral dans  notre pays. Rappelons que sous Alpha Oumar Konaré, le Mali a dénombré ses 21 milliardaires dont 15 hauts fonctionnaires. Le «moi, moi» sous Moussa Traoré s’est transformé en ce fléau qui consiste à laisser le régime et ses mandibules directes se gaver du bien public.

Au terme du second mandat de Alpha Oumar Konaré, la question qu’il a posée, en 1980, à Moussa Traoré se pose à lui-même: «Où va le Mali ?» En tout cas, Alpha a tout entrepris pour la phagocytose de notre armée nationale et de nos forces de sécurité. Sous le président Alpha, le recrutement dans notre armée, à la gendarmerie et à la police est devenu «une affaire d’Etat»: n’y vont pas ceux qui veulent, qui aiment le corps et qui ont la ferme détermination de défendre la patrie malienne même au prix de leur vie. Il a fait de notre armée un dépotoir.

Amadou Toumani Touré (ATT) est arrivé aux affaires en qualité de candidat libre. Sachant que les politiciens maliens sont prêts à vendre leur âme au diable pour «arriver», ATT les a emballés tous en leur qualité d’opportunistes hors-pair.

La suite, on la connaît. Le travail de sape de notre dignité d’homme a pris un tournant nouveau à savoir que le président malien a déjà rassuré les délinquants financiers qu’il ne va ‘’humilier personne’’. Ils ont désormais les mains libres quant à la dilapidation des fonds publics aux dépens de nos travailleurs, des hommes de défense et de sécurité.

Après neuf (09) ans de gestion calamiteuse  des affaires du Mali dont il s’est rendu coupable, ATT a été évincé du trône par le capitaine Amadou Haya Sanogo. Le constat patent a été que notre peuple s’est levé comme un seul homme pour soutenir le coup d’Etat militaire, espérant que le pays sera débarrassé à jamais des manœuvres politiciennes apatrides et de la souillure de notre dignité nationale.

Machiavel a  coutume de dire: «L’histoire est un guide qu’il faut suivre.» Pour donner un coup d’arrêt à l’œuvre patriotique de la junte militaire dirigée par le capitaine Sanogo, les politiciens sans foi ni loi et des chefs religieux englués dans la politique politicienne ont entretenu des valses ininterrompues entre Bamako et Kati pour faire plier le capitaine quant au travail patriotique qu’il s’était donné pour gage.

Aujourd’hui, Sanogo reste en prison sans que ces mêmes religieux lèvent le petit doigt pour demander sa libération. Penser que les mêmes gens pourraient servir utilement le peuple malien, c’est vraiment sombrer dans les aberrations les plus terrifiantes.

IBK est élu au terme de ce que certains veulent bien appeler ‘’transition’’. Pour les observateurs avertis, par ce choix, les électeurs ont adopté le profil bas pour porter IBK aux affaires. L’histoire étant un guide, les Maliens auraient mieux fait d’opter pour un homme nouveau et surtout connu pour son engagement pour les causes populaires.

Hélas ! Les billets de banque ont fait leur choix: pas de  changement, on se tait !  Aujourd’hui encore et toujours, il faut se poser la sempiternelle question: «Où va le Mali ?».

De plus en plus, l’horizon s’assombrit et la lueur d’espoir d’un changement véritable à l’avantage du peuple s’est volatilisée avec le mouvement en cirque du capitaine Sanogo. L’insécurité criarde, la sape de l’école malienne et des services de santé et les massacres continus des civils et militaires viennent confirmer, si besoin en était, que le Mali est plongé dans l’impasse. Les grèves à répétition des enseignants, la marche organisée, vendredi 5 avril, par Mahmoud Dicko et M’Bouillé Haïdara ne sont pas de nature à faire croire aux lueurs d’espoirs tant attendues par notre peuple travailleur.

Qu’on ne se trompe pas tout de même sur la nature politicienne de la marche ainsi indiquée de ceux qui se font dénommer les religieux. Mais indubitablement, la solution véritable de la crise endémique qui frappe notre pays n’a de solution que dans les seules concertations nationales, seul cadre de mettre à plat les problèmes de fond du Mali et en situer toutes les responsabilités de la sape de notre système de défense nationale, de notre système éducatif et de notre santé.

A ce seul prix, le Mali pourrait amorcer un nouveau départ. C’est la seule voie pour que notre peuple retrouve sa liberté et sa dignité confisquées. Les mensonges réguliers ont montré toutes les limites objectives. Il ne reste qu’à s’en remettre à cette vérité plausible.

C’est en cela qu’il convient de rappeler Alexandre Koyré: «La route vers la vérité est pleine d’embûches, c’est à travers les erreurs que l’esprit progresse vers la vérité.» Ces concertations, si elles sont menées par des hommes crédibles sans appartenance ni politique ni religieuse avérée, conduiront à sortir l’école du tourbillon politicien dans lequel elle patauge, hélas !, depuis longtemps. C’est dire que l’école est le moyen idoine de redonner confiance à notre peuple laborieux parce que susceptible de forger des hommes véritablement nouveaux pour un Mali radicalement nouveau débarrassé à jamais de la surenchère politico-religieuse.

A ce sujet, rappelons Nelson Mandela qui disait: «L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde.» Les concertations nationales seules permettent au Mali de sortir de l’engrenage  dans lequel les politiciens et les religieux doublés de politique l’ont plongé.

Fodé Keita

Inter De Bamako